"Sita chante le blues" met en parallèle les déboires amoureux de Sita (héroïne du Ramayana, texte épique hindou de quelques siècles avant Jésus-Christ ), répudiée par son mari, et de Nina (la réalisatrice elle-même), larguée par e-mail en 2002 par son mari installé en Inde. Sur ce canevas, l'Américaine Nina Paley, qui est non seulement la réalisatrice, mais aussi l’auteur, la productrice et l' animatrice toute à la fois, livre un petit bijou de film d’animation musical.
Mêlant plusieurs techniques d’animation et de dessin, elle intercale aussi du théâtre d’ombres, et raconte le Ramayana qui à la base en gros narre l’histoire d’amour de Rama et de Sita.
Sita dans le texte et le dessin animé, enlevée par un rival, est libérée par Rama qui pourtant la répudie ensuite, persuadé que son épouse n’a pas pu rester pure, malgré les nombreuses preuves qu’elle lui présente. Nina Paley raconte en parallèle sa propre histoire, fait intervenir des historiens "rigolos"pas toujours d’accord sur la narration de la légende (montrant dans le film combien la mythologie indienne est très compliquée !) et surtout illustre le récit de chansons d’amour américaines des années 20, du blues chanté par Annette Hanshaw, de belles chansons rétros romantiques, loin d’être larmoyantes, que j’ai découvertes et que j’ai bien aimé. "Sita sings the blues" est un drôle de cocktail, techniquement loin des films d’animation qui envahissent aujourd’hui les écrans, comme « UP » (La Haut) ou l’Age de Glace, mais il est plein d’humour et de fraîcheur avec ses imperfections. Dans ce film d'1h22 au rythme hyper dynamique, pas le temps de souffler au milieu de cette richesse visuelle et colorée, si ce n’est au moment d’un interlude intégré au film pendant lequel les personnages achètent – hors cadre – leur pop-corn ou vont aux toilettes. Le sens de l’humour de Nina Paley n’a d’égal que le foisonnement esthétique et libérateur de ses créations personnelles, originales et décalées, et pleines de charme.
Une folie réjouissante et attachante, avec peu de moyens, qui semble imprégner son univers créatif, tellement authentique et vrai, peut-être dans une vision un peu trop personnel pour le grand public épris d'animation grand spectacle mais il aurait été dommage de passer à côté... malgré le fait qu'à Paris il n'ait été présenté que dans deux salles. Je ne sais pas s'il est toujours projeté ici d'ailleurs.