II faut choisir : ça dure ou ça brûle ; le drame, c'est que ça ne puisse pas à la fois durer et brûler. Albert Camus
PHIL-ANALYSE
Mardi 30 Juillet 2024L'utérus artificiel n’est plus une chimère d'Aldous Huxley, pressenti dans son roman "Le meilleur des mondes" paru en 1932. La science progresse et les médecins ont bon espoir de pouvoir sauver grâce à cette technique de nombreux bébés prématurés. Rappelons qu'encore 70 femmes par an décèdent en France des suites d'un accouchement. Ainsi que les accouchements atroces qui se sont déroulés depuis des millénaires. L'utérus artificiel pourrait-il libérer les femmes ?
Au premier abord, l'utérus artificiel paraît instantanément une bonne nouvelle pour la société : sauver des vies, n'est-ce pas l'objectif de la médecine ? Libérer les femmes des contraintes de la maternité n'est-ce pas le prolongement de la révolution de la contraception ? Néanmoins, derrière l'utérus artificiel, se cachent des enjeux sociétaux importants : est-ce que l'utérus artificiel ne va pas indirectement favoriser l'eugénisme ? Peut-il remettre en question les liens de maternité et paternité ? Qu'en sera-t-il de l'amour maternel ? La place des émotions et de l'humain dans la gestation ?
Certains scientifiques pensent qu'en 2100, il existera une totale déconnexion entre le plaisir, la sexualité, l'amour et la reproduction. Ce qui risque de provoquer des sacrés chamboulements dans notre façon d'imaginer la société et notamment la sphère privée. L'utérus artificiel pourrait quant à lui provoquer la déconnexion entre la grossesse et le corps de la mère. Ce qui rapprocherait le statut des femmes à celui des hommes.
Faut-il alors s'inquiéter de la possibilité de grossesses artificielles pour des femmes qui n'auraient aucun problème de fertilité ou de santé ? Autrement dit, la grossesse naturelle participe-t-elle au bien de l'humanité et de la société ?
Certains scientifiques pensent qu'en 2100, il existera une totale déconnexion entre le plaisir, la sexualité, l'amour et la reproduction. Ce qui risque de provoquer des sacrés chamboulements dans notre façon d'imaginer la société et notamment la sphère privée. L'utérus artificiel pourrait quant à lui provoquer la déconnexion entre la grossesse et le corps de la mère. Ce qui rapprocherait le statut des femmes à celui des hommes.
Faut-il alors s'inquiéter de la possibilité de grossesses artificielles pour des femmes qui n'auraient aucun problème de fertilité ou de santé ? Autrement dit, la grossesse naturelle participe-t-elle au bien de l'humanité et de la société ?
Le symbole de l'utérus
Avant de s'interroger sur le rôle de la grossesse dans la société, arrêtons-nous quelques instants sur le symbole de l'utérus dans notre inconscient collectif. Le terme « hystérie », qui a été souvent une façon de discriminer les femmes excessives, voire de les accuser d'être des sorcières, vient du grec, qui signifie matrice, soit utérus. A l'époque de Platon, la théorie était que l'utérus est "un animal qui désire ardemment engendrer des enfants", et que lorsque la femme n'arrive pas à enfanter, la matrice "parcourt tout le corps (...) jetant le corps dans des dangers extrêmes, (...), jusqu'à ce que le désir et l'amour, réunissant l'homme et la femme, fassent naître un fruit et le cueillent comme sur un arbre ». L'hystérie chez Platon pourrait donc se confondre avec la passion. L'utérus n'est donc pas anodin, il apparaît comme une sorte de matrice du désir, avant d'être le réceptacle d'un embryon. N'est-ce pas l'utérus qui rattache la femme à la terre ?
Dans l'ectogénèse, faut-il y voir une dérive transhumaniste ?
Plus scientifiquement, l'utérus artificiel permet l'ectogénèse, une grossesse menée hors du corps de la femme. L'ectogénèse n'est pas obligatoirement associée à une procréation médicalisée. Elle peut prendre le relais d'une fécondation spontanée. La grossesse est la relation qu'entretient le foetus avec la mère, ce qui n'est pas neutre. L'utérus artificiel reviendrait à couper le cordon ombilical entre la mère et l'embryon. Cette technique ne modifierait en rien la sexualité, contrairement à la procréation assistée. Mais permet, en sortant l'embryon de l'utérus de la mère, de libérer les corps des femmes des contraintes de la grossesse. Ce qui revient à modifier indirectement une des fonctions d'un organe du corps et finalement l'usage du corps de la femme. Faut-il y voir une dérive transhumaniste qui cherche à rendre nos corps plus puissants, en le coupant de son déterminisme biologique ? La question étant finalement : est-ce que notre corps d'homo sapiens doit déterminer ce que nous sommes ? Est-ce que la grossesse permet à la femme d'atteindre un autre stade ? Comme le serait par exemple une initiation pour passer à un stade supérieur ?
Avant de s'interroger sur le rôle de la grossesse dans la société, arrêtons-nous quelques instants sur le symbole de l'utérus dans notre inconscient collectif. Le terme « hystérie », qui a été souvent une façon de discriminer les femmes excessives, voire de les accuser d'être des sorcières, vient du grec, qui signifie matrice, soit utérus. A l'époque de Platon, la théorie était que l'utérus est "un animal qui désire ardemment engendrer des enfants", et que lorsque la femme n'arrive pas à enfanter, la matrice "parcourt tout le corps (...) jetant le corps dans des dangers extrêmes, (...), jusqu'à ce que le désir et l'amour, réunissant l'homme et la femme, fassent naître un fruit et le cueillent comme sur un arbre ». L'hystérie chez Platon pourrait donc se confondre avec la passion. L'utérus n'est donc pas anodin, il apparaît comme une sorte de matrice du désir, avant d'être le réceptacle d'un embryon. N'est-ce pas l'utérus qui rattache la femme à la terre ?
Dans l'ectogénèse, faut-il y voir une dérive transhumaniste ?
Plus scientifiquement, l'utérus artificiel permet l'ectogénèse, une grossesse menée hors du corps de la femme. L'ectogénèse n'est pas obligatoirement associée à une procréation médicalisée. Elle peut prendre le relais d'une fécondation spontanée. La grossesse est la relation qu'entretient le foetus avec la mère, ce qui n'est pas neutre. L'utérus artificiel reviendrait à couper le cordon ombilical entre la mère et l'embryon. Cette technique ne modifierait en rien la sexualité, contrairement à la procréation assistée. Mais permet, en sortant l'embryon de l'utérus de la mère, de libérer les corps des femmes des contraintes de la grossesse. Ce qui revient à modifier indirectement une des fonctions d'un organe du corps et finalement l'usage du corps de la femme. Faut-il y voir une dérive transhumaniste qui cherche à rendre nos corps plus puissants, en le coupant de son déterminisme biologique ? La question étant finalement : est-ce que notre corps d'homo sapiens doit déterminer ce que nous sommes ? Est-ce que la grossesse permet à la femme d'atteindre un autre stade ? Comme le serait par exemple une initiation pour passer à un stade supérieur ?
La grossesse rend-elle les femmes vertueuses ?
Si la grossesse (qui porte déjà mal son nom) est associée spontanément à une image de lourdeur et de contraintes, elle a quelques avantages que n'ont pas les pères : les mères qui portent leurs enfants sont au moins sûres que ce sont les leurs. En dehors de cet argument factuel, la grossesse permet aussi de transmettre à son bébé ses goûts culinaires, transmettre ses émotions en temps réel, l'accoutumer à sa voix etc.
Autre point qui peut paraître romantique et naïf, porter un enfant revient à engendrer la vie dans son ventre. Ce qui est absolument magique comme image. Cela revient presque à avoir un corps de déesse. Passé le stade euphorique de cette belle image de la maternité, nous savons aussi que la grossesse est synonyme de prise de poids, nausées, contraintes dans son alimentation, limitation de certaines de ses activités, accroissement de son émotivité, gonflement des jambes, voire obligation de rester alitée. Sans compter le passage obligé de l'accouchement (qui heureusement est moins douloureux grâce à la péridurale) et le corps changé à l'issue de la grossesse, qu'il faut s'empresser de re-muscler. Cela reste néanmoins moins grave que les décès des femmes mortes en couches.
La grossesse permet aux femmes de faire acte d'altruisme, en louant en quelque sorte leur corps à un petit être qui a besoin d'être cocooné. De créer un lien avec ce bébé qu'elles ne connaissent pas encore. Le fait de ne plus porter son bébé peut modifier le lien originel que les femmes ont toujours eu avec la grossesse naturelle. Retenons que l'utérus crée le lien. Cette vie intra-utérine a probablement des incidences importantes sur le bien être psychologique du nouveau né. Sans la grossesse, les femmes pourraient percevoir leur enfant comme un étranger. Dans tous les cas, il faut tenir compte des échanges physiologiques et psychologiques qui sont indispensables entre une mère et son enfant.
Si la grossesse (qui porte déjà mal son nom) est associée spontanément à une image de lourdeur et de contraintes, elle a quelques avantages que n'ont pas les pères : les mères qui portent leurs enfants sont au moins sûres que ce sont les leurs. En dehors de cet argument factuel, la grossesse permet aussi de transmettre à son bébé ses goûts culinaires, transmettre ses émotions en temps réel, l'accoutumer à sa voix etc.
Autre point qui peut paraître romantique et naïf, porter un enfant revient à engendrer la vie dans son ventre. Ce qui est absolument magique comme image. Cela revient presque à avoir un corps de déesse. Passé le stade euphorique de cette belle image de la maternité, nous savons aussi que la grossesse est synonyme de prise de poids, nausées, contraintes dans son alimentation, limitation de certaines de ses activités, accroissement de son émotivité, gonflement des jambes, voire obligation de rester alitée. Sans compter le passage obligé de l'accouchement (qui heureusement est moins douloureux grâce à la péridurale) et le corps changé à l'issue de la grossesse, qu'il faut s'empresser de re-muscler. Cela reste néanmoins moins grave que les décès des femmes mortes en couches.
La grossesse permet aux femmes de faire acte d'altruisme, en louant en quelque sorte leur corps à un petit être qui a besoin d'être cocooné. De créer un lien avec ce bébé qu'elles ne connaissent pas encore. Le fait de ne plus porter son bébé peut modifier le lien originel que les femmes ont toujours eu avec la grossesse naturelle. Retenons que l'utérus crée le lien. Cette vie intra-utérine a probablement des incidences importantes sur le bien être psychologique du nouveau né. Sans la grossesse, les femmes pourraient percevoir leur enfant comme un étranger. Dans tous les cas, il faut tenir compte des échanges physiologiques et psychologiques qui sont indispensables entre une mère et son enfant.
La pénibilité, voire la souffrance, a-t-elle une vertu éthique ?
Echapper à la souffrance d'une grossesse et d'un accouchement ne paraît pas nuire au Bien de la société. Car quelle est l'utilité de la souffrance sur le plan éthique ? Cela paraît contestable. La grossesse, par sa durée de 9 mois, favorise en revanche l'attente et donc la maïeutique. La grossesse est donc la métaphore de la pensée socratique. Peut-on réellement appréhender une naissance sans passer par cette étape ? N'est-il pas nécessaire de travailler, d'attendre pour accoucher de soi-même ? Notons que les femmes ont mis du temps à conquérir certains postes dans la société, comme si les hommes essayaient de s'accaparer un autre type de maïeutique.
La société a encore du mal à admettre que les mères ont le droit de ne pas souffrir quand elles sont enceintes ou accouchent. On parle encore de l'abus de césariennes de confort. Pourquoi les césariennes ne pourraient pas être un choix de la femme, si celle-ci ne supporte pas l'idée de l'accouchement par voie basse ? Il semblerait que l'enfantement dans la douleur reste une idée tenace même dans le corps médical.
Echapper à la souffrance d'une grossesse et d'un accouchement ne paraît pas nuire au Bien de la société. Car quelle est l'utilité de la souffrance sur le plan éthique ? Cela paraît contestable. La grossesse, par sa durée de 9 mois, favorise en revanche l'attente et donc la maïeutique. La grossesse est donc la métaphore de la pensée socratique. Peut-on réellement appréhender une naissance sans passer par cette étape ? N'est-il pas nécessaire de travailler, d'attendre pour accoucher de soi-même ? Notons que les femmes ont mis du temps à conquérir certains postes dans la société, comme si les hommes essayaient de s'accaparer un autre type de maïeutique.
La société a encore du mal à admettre que les mères ont le droit de ne pas souffrir quand elles sont enceintes ou accouchent. On parle encore de l'abus de césariennes de confort. Pourquoi les césariennes ne pourraient pas être un choix de la femme, si celle-ci ne supporte pas l'idée de l'accouchement par voie basse ? Il semblerait que l'enfantement dans la douleur reste une idée tenace même dans le corps médical.
L'utérus artificiel, même débat que sur l'allaitement ?
L'ectogénèse permettrait de libérer le corps de la femme, comme l'a déjà fait la pilule contraceptive, voire l'avortement. La contraception a été une révolution pour la femme, tout comme l'a d'ailleurs été la machine à laver pour les tâches domestiques. Le statut de la femme s'est bien modernisé dans notre pays grâce à ces avancées techniques. Même le congé paternité existe. La société reconnaît déjà l'importance de la place du père dans l'éducation des enfants.
Mais, ce qui reste surprenant est le débat sur l'allaitement. Entre ceux qui prônent que c'est meilleur pour l'enfant et celles qui souhaitent disposer librement de leurs seins, on sent un terrain houleux. Comment être certain de ce qui est bien pour l'enfant ? Jusqu'où faut-il aller dans le bien être dans l'enfant au détriment du bien-être de la mère ? La femme a toujours connu cette aliénation, cette fêlure entre le devoir d'être une bonne mère et son envie d'être une femme libre et épanouie. L'homme semble moins connaître ce paradoxe (cf. article Le paradoxe d’être une femme, https://www.wmaker.net/philobalade/Le-paradoxe-d-etre-une-femme-1ere-partie_a2.html ). Ajoutons aussi que l'utérus artificiel permettrait également aux hommes de pouvoir porter un enfant, ce qui serait totalement révolutionnaire et changerait littéralement notre vision de la maternité. Cela bousculerait le stéréotype d'une société patriarcale. Les hommes et les femmes seraient à égalité dans l'enfantement, ce qui modifierait en profondeur le rôle de l'homme. Allons-nous trop loin ? Etre maître et possesseur de la nature est-ce sans dérive ?
L'utérus artificiel, source d'un bel optimisme
Malgré toutes ces dérives possibles évoquées, l'utérus artificiel peut nous rendre optimiste : permettre aux enfants prématurés de survivre, permettre aux femmes qui ont des problèmes de fertilité de procréer (ou à des couples homosexuels grâce à la procréation médicalisée sans recourir à une mère porteuse), rétablir l'égalité homme / femme. D'ailleurs, les femmes passées un certain âge n'ont plus la possibilité de procréer, alors que les hommes le peuvent, alors que bizarrement ils meurent plus tôt que les femmes... Il semblerait que la nature soit mal faite sur ce plan. Là aussi, l'utérus artificiel pourrait apporter de l'égalité entre l'âge de procréer des hommes et des femmes. Et ainsi de mettre un terme à l'image des femmes "périmées" (et les débats incessants sur les « cougars » mariées à des hommes plus jeunes).
Mais ce sera aussi une modification de notre perception de l’origine du monde.
Avec l'utérus artificiel, l'origine du monde du tableau de Gustave Courbet sera bientôt dépassée. Le corps de la femme ne sera plus un passage obligé pour la naissance d'un bébé. Or dans la symbolique de la genèse du monde, la terre a toujours été associée à la femme, comme le réceptacle, au contraire du ciel créateur. En créant l'utérus artificiel, les scientifiques modifient complètement notre mythologie de la création du monde et de la vie. Ce qui n'est pas anodin. Si l'idée d'accroître le bien-être des mères et des enfants est tout à fait défendable, l'utérus artificiel ne fait-il pas sauter le dernier verrou de la sélection des gènes ? En effet, une fois que l'embryon sera en dehors du ventre de la mère, n'est-il pas plus facile de l'analyser et de le manipuler ? La mère protège naturellement son bébé. Qu'en sera-t-il de l'utérus artificiel ? N'est-ce pas un boulevard pour les tentatives eugénistes ? De la démesure ? Un encadrement sera donc nécessaire pour faire face à la folie humaine de la perfection. Car la perfection c'est la mort de l'être humain… de l’homme et de la femme.
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utérus artificiel hystérie
Rédigé par Marjorie Rafécas le Mardi 30 Juillet 2024 à 15:23
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Commentaires (2)
Cet article est issu de la conférence « Les Femmes et le Pouvoir » de Valérie Fauchet , écrivain et artiste, qui a eu lieu ce mercredi 8 mars 2023 à la marie du 5ème arrondissement de Paris et organisée par Florence Berthout, maire du 5ème. Valérie Fauchet intervenait aux côtés de l’avocate Martine Moscovici et Pauline Nkongo, directrice du Centre Paris Anim’ Censier. Il s’agit d’un regard philosophique et poétique sur le pouvoir des femmes. Pourquoi la femme pense avoir besoin de pouvoir ?
La femme a bien plus de pouvoirs qu'elle ne l'imagine. Pour cette raison, notre cher Schopenhauer s'en méfiait en la qualifiant de "Sépia". Je me rappelle du sentiment amer que m’avait provoqué cette petite phrase de Kierkegaard "La femme ressemble à une fleur, comme les poètes aiment à le dire et même la spiritualité a en elle un caractère de végétatif." Je l'avais d'ailleurs exprimé dans un essai "Le paradoxe d'être une femme", publié en 2000. La femme ressemble certes à une fleur, mais à une fleur puissante, à un mystère créatif, celui de pouvoir inspirer et de créer. C'est loin d'être végétatif ! C'est pour cette raison que je tiens à publier ce discours de Valérie Fauchet qui célèbre enfin le vrai pouvoir des femmes. La liberté d'être.
Plongeons-nous dans la vision optimiste, libre et bienveillante de Valérie Fauchet, auteur d’Une voyante passe aux aveux et La vie est une affaire personnelle, parus tout deux aux Editions Ipanema.
Les femmes et le pouvoir, de Valérie Fauchet
« Simone de Beauvoir disait : « On ne naît pas femme, on le devient ». Nous pourrions dire également : « On ne naît pas femme de pouvoir, on le devient . »
Quel est , ou quel a été le chemin d’une femme qui est qualifiée de femme de pouvoir ? Le chemin qui mène au fond implicitement au pouvoir...
Les Femmes et le Pouvoir : Pourquoi La femme, Les femmes peuvent-elles avoir besoin de pouvoir ? … Pourquoi plane toujours une onde particulière sur l’idée que bien souvent « on » se fait d’une femme de pouvoir . « on », vous les hommes, et parfois également, nous, les femmes.
Le ton qui y est associé, mêlé est toujours, je crois, plus ou moins ambigu, pas forcément doux, ou sympathique. L’intonation y est souvent la même.
- Oh oui, c’est une femme de pouvoir !
Un mélange étrange de jugement, d’admiration aussi, mais très souvent, mêlé d’une certaine violence quelque part, plus ou moins dissimulée. Une méfiance, une défiance, flagrante vis à vis des femmes de pouvoir, au singulier, au pluriel. Une onde, une énergie quelque peu ou même très péjorative et même si l’admiration est là, présente, ou le respect.
Comme si les femmes de pouvoir inspiraient à un endroit ou à un autre une forme de crainte. La différence s’impose là, déjà là. Dans ce détail, ce point de détail, tout à fait inscrit dans nos sociétés patriarcales.
Mais qu’est-ce qui fait qu’une femme a du pouvoir, prenne le pouvoir, veuille le pouvoir ? Veuille prendre le pouvoir ? Et surtout le pouvoir sur quoi ? Le pouvoir sur qui ? Pour faire quoi ? Pour en faire quoi ?
C’est ce point -là qui m’a interpellée profondément dans mon élaboration de questionnement. Interpellée aussi émotionnellement forcément. Je suis une femme. Une femme parmi les femmes…
Ce n’est pas forcément un choix. Cela peut être une obligation de survie. Oui, de survie.
Se battre, lutter, réfléchir et penser, développer sa force, ses forces même cachées, ses qualités. De ses défauts en faire des amis, de nouveaux amis, des compères, des alliés. Trouver sa force, son pouvoir personnel.
« Simone de Beauvoir disait : « On ne naît pas femme, on le devient ». Nous pourrions dire également : « On ne naît pas femme de pouvoir, on le devient . »
Quel est , ou quel a été le chemin d’une femme qui est qualifiée de femme de pouvoir ? Le chemin qui mène au fond implicitement au pouvoir...
Les Femmes et le Pouvoir : Pourquoi La femme, Les femmes peuvent-elles avoir besoin de pouvoir ? … Pourquoi plane toujours une onde particulière sur l’idée que bien souvent « on » se fait d’une femme de pouvoir . « on », vous les hommes, et parfois également, nous, les femmes.
Le ton qui y est associé, mêlé est toujours, je crois, plus ou moins ambigu, pas forcément doux, ou sympathique. L’intonation y est souvent la même.
- Oh oui, c’est une femme de pouvoir !
Un mélange étrange de jugement, d’admiration aussi, mais très souvent, mêlé d’une certaine violence quelque part, plus ou moins dissimulée. Une méfiance, une défiance, flagrante vis à vis des femmes de pouvoir, au singulier, au pluriel. Une onde, une énergie quelque peu ou même très péjorative et même si l’admiration est là, présente, ou le respect.
Comme si les femmes de pouvoir inspiraient à un endroit ou à un autre une forme de crainte. La différence s’impose là, déjà là. Dans ce détail, ce point de détail, tout à fait inscrit dans nos sociétés patriarcales.
Mais qu’est-ce qui fait qu’une femme a du pouvoir, prenne le pouvoir, veuille le pouvoir ? Veuille prendre le pouvoir ? Et surtout le pouvoir sur quoi ? Le pouvoir sur qui ? Pour faire quoi ? Pour en faire quoi ?
C’est ce point -là qui m’a interpellée profondément dans mon élaboration de questionnement. Interpellée aussi émotionnellement forcément. Je suis une femme. Une femme parmi les femmes…
Ce n’est pas forcément un choix. Cela peut être une obligation de survie. Oui, de survie.
Se battre, lutter, réfléchir et penser, développer sa force, ses forces même cachées, ses qualités. De ses défauts en faire des amis, de nouveaux amis, des compères, des alliés. Trouver sa force, son pouvoir personnel.
Toutes les femmes, comme tous les hommes, nous avons en nous tellement de territoires inexplorés, de parties cachées de notre cerveau, de notre coeur, de notre âme, de notre esprit. Nous ne soupçonnons pas toujours, jamais entièrement, complètement , nos capacités, nos possibilités, jusqu’au jour où, nous n’avons guère plus le choix que de trouver en nous justement de la force, du pouvoir, d’autres angles, d’autres pistes, d’autres territoires, d’autres pièces de ce puzzle qui est notre propre existence, pour avancer et tenir debout.
Le pouvoir féminin a toujours été cité, et encore une fois, bien souvent de façon négative.
La crainte du pouvoir féminin se situe à différents endroits. Il est suspicion car il est mystère aussi, ce pouvoir féminin, ce pouvoir des femmes.
Les femmes et le pouvoir féminin… Les femmes et leur beauté, leur grâce, leurs charmes au pluriel, différents et multiples, ont toujours fasciné, les hommes, et leur imaginaire, leurs désirs, mais aussi les femmes entre elles. Nous sommes toutes différentes, toutes uniques, toutes singulières, toutes complémentaires. Toutes, nous possédons des pouvoirs qui nous sont propres, encore une fois personnels.
J’ai écrit à ce sujet d’ailleurs un texte que j’avais fait mettre en musique, au piano, par l’un de mes compositeurs. Un texte que j’avais intitulé : « Lettre ouverte aux femmes… », dans lequel j’ai voulu parler des rapports des femmes entre elles, de l’importance d’être unies et non divisées, en jalousie ou en rivalité. De l’importance d’être soudées, complices, comme des soeurs véritables, aimantes et non dans le jugement plus ou moins ou bien souvent systématique, réprobateur, accusateur, facile ou bas, gratuit que les contes de fées ou certaines légendes nous ont parfois inculqué, ou notre éducation familiale ou scolaire.
Le pouvoir féminin a toujours été cité, et encore une fois, bien souvent de façon négative.
La crainte du pouvoir féminin se situe à différents endroits. Il est suspicion car il est mystère aussi, ce pouvoir féminin, ce pouvoir des femmes.
Les femmes et le pouvoir féminin… Les femmes et leur beauté, leur grâce, leurs charmes au pluriel, différents et multiples, ont toujours fasciné, les hommes, et leur imaginaire, leurs désirs, mais aussi les femmes entre elles. Nous sommes toutes différentes, toutes uniques, toutes singulières, toutes complémentaires. Toutes, nous possédons des pouvoirs qui nous sont propres, encore une fois personnels.
J’ai écrit à ce sujet d’ailleurs un texte que j’avais fait mettre en musique, au piano, par l’un de mes compositeurs. Un texte que j’avais intitulé : « Lettre ouverte aux femmes… », dans lequel j’ai voulu parler des rapports des femmes entre elles, de l’importance d’être unies et non divisées, en jalousie ou en rivalité. De l’importance d’être soudées, complices, comme des soeurs véritables, aimantes et non dans le jugement plus ou moins ou bien souvent systématique, réprobateur, accusateur, facile ou bas, gratuit que les contes de fées ou certaines légendes nous ont parfois inculqué, ou notre éducation familiale ou scolaire.
Depuis La Nuit Des Temps, les femmes intriguent par leur beauté, leurs courbes, leur corps, leur chevelure, leur regard leur intelligence, leur esprit, qu’on le veuille ou non, qu’on le réfute ou non, les femmes existent et leurs pouvoirs secrets, cachés ou affichés franchement fascinent et inspirent les artistes entre autres. Les peintres, les sculpteurs, les écrivains, les chanteurs, les dramaturges, les réalisateurs, les poètes. Les femmes, muses d’artistes, exercent, même sans le vouloir, sans en avoir toujours connaissance, un pouvoir. Un pouvoir magique, magnétique, mystérieux dans la création-même.
Le pouvoir féminin relève également d’un tout autre mystère, créatif justement et autrement, celui du mystère de l’enfantement. Que ce soit admis ou non, il reste présent encore aujourd’hui fortement dans l’inconscient collectif : ce mystère premier de la vie, même si étudié scientifiquement, expliqué de façon pragmatique, médicale. Il n’en demeure pas moins que ce mystère demeure mystère : ce pouvoir de donner la vie. De faire, de concevoir un enfant, de le porter, de le mettre au monde.
Ce pouvoir extraordinaire de pouvoir donner la vie …
Le pouvoir féminin relève également d’un tout autre mystère, créatif justement et autrement, celui du mystère de l’enfantement. Que ce soit admis ou non, il reste présent encore aujourd’hui fortement dans l’inconscient collectif : ce mystère premier de la vie, même si étudié scientifiquement, expliqué de façon pragmatique, médicale. Il n’en demeure pas moins que ce mystère demeure mystère : ce pouvoir de donner la vie. De faire, de concevoir un enfant, de le porter, de le mettre au monde.
Ce pouvoir extraordinaire de pouvoir donner la vie …
Passionnée de psychologie, de psychanalyse depuis mes dix-sept ans, mon année de Terminale, je trouve cela intriguant de tenter de comprendre et de dénouer le mécanisme psychique qui a fait dans l’existence d’une femme de pouvoir, de devenir cette femme de pouvoir. Le déroulé psychique qui s’est opéré en elle.
Ce pouvoir n’est pas forcément une décision, une volonté d’être ainsi. Ce n’est pas obligatoirement une revanche, une revanche sur quelqu’un ou sur quelque chose, un besoin terrible de jouissance de pouvoir, un peu vulgaire, sournois, ou grave. Nos rencontres et nos expériences de vie nous poussent à nous expérimenter sans cesse et à expérimenter différentes facettes de notre personnalité, de notre tempérament, de notre psyché.
Aussi, le pouvoir peut être dans certains cas, il est vrai malgré tout, une certaine forme de revanche, pour reprendre le terme, directe ou indirecte sur des blessures de l’enfance ou de l’adolescence, ou des deux, ou plus tardives dans le temps suite à des événements ou des traumatismes particuliers, spécifiques. Le besoin de pouvoir peut être là pour réparer des moments vécus, ou observés au sein de la famille par exemple, pour réparer des chocs, pour combler des observations difficiles, douloureuses, des traumatismes lourds d’abus divers et variés, de violence. Que nous ayons été directement concernés ou que nous avons pu observer.
Alors peut survenir l’idée de décider de faire différemment, d’être autre. De développer son pouvoir en soi-même pour être et rester digne pour soi -même ou pour venir en aide à d’autres êtres autour de nous, féminins ou masculin, ou à un peuple tout entier, à d’autres femmes.
Ce pouvoir n’est pas forcément une décision, une volonté d’être ainsi. Ce n’est pas obligatoirement une revanche, une revanche sur quelqu’un ou sur quelque chose, un besoin terrible de jouissance de pouvoir, un peu vulgaire, sournois, ou grave. Nos rencontres et nos expériences de vie nous poussent à nous expérimenter sans cesse et à expérimenter différentes facettes de notre personnalité, de notre tempérament, de notre psyché.
Aussi, le pouvoir peut être dans certains cas, il est vrai malgré tout, une certaine forme de revanche, pour reprendre le terme, directe ou indirecte sur des blessures de l’enfance ou de l’adolescence, ou des deux, ou plus tardives dans le temps suite à des événements ou des traumatismes particuliers, spécifiques. Le besoin de pouvoir peut être là pour réparer des moments vécus, ou observés au sein de la famille par exemple, pour réparer des chocs, pour combler des observations difficiles, douloureuses, des traumatismes lourds d’abus divers et variés, de violence. Que nous ayons été directement concernés ou que nous avons pu observer.
Alors peut survenir l’idée de décider de faire différemment, d’être autre. De développer son pouvoir en soi-même pour être et rester digne pour soi -même ou pour venir en aide à d’autres êtres autour de nous, féminins ou masculin, ou à un peuple tout entier, à d’autres femmes.
Le pouvoir des femmes, les femmes et le pouvoir n’est pas aussi simple à définir que cela. Des heures et des heures de dissertation et d’observations s’imposent …
Certaines femmes n’ont ou n’auront jamais en elles cette soif, cette possibilité d’affronter autant que d’autres les choses mais toutes nous avons cela en nous à des niveaux plus ou moins importants. Je parle de cette force, de ce pouvoir possible, existant à l’état latent quelquefois.
Certaines existent aussi et s’arrangent de cela, s’évertuent de toutes leurs forces pour ne surtout pas afficher leur pouvoir, leur désir de pouvoir en public, en société, mais l’exercent à loisir, en privé, mieux que personne de mille et une façons, lorsque la porte sur le monde extérieur est fermée à clé.
Le pouvoir des femmes est lié également à la liberté, essentiellement à la liberté, à l’indépendance financière essentielle, mais surtout selon moi, avant tout, à la liberté d’expression, à la liberté d’expression et d’action.
Le pouvoir de la femme est quelque chose de crucial à cet endroit-là précisément. Ce n’est pas une anecdote, ce n’est point un caprice, un style, un genre, une boutade, une blague, une anecdote. Etre libres d’être qui nous sommes, sans que personne ne nous dicte qui nous devons être ou ce que nous devons faire, ou penser.
Vive la liberté ! A tout jamais.
Une pensée à ce sujet toute particulière pour les femmes iraniennes… kurdes, afghanes, …pour toutes les femmes privées de cette liberté de penser et d’agir comme elles le souhaitent, avec respect et dignité.
Certaines femmes n’ont ou n’auront jamais en elles cette soif, cette possibilité d’affronter autant que d’autres les choses mais toutes nous avons cela en nous à des niveaux plus ou moins importants. Je parle de cette force, de ce pouvoir possible, existant à l’état latent quelquefois.
Certaines existent aussi et s’arrangent de cela, s’évertuent de toutes leurs forces pour ne surtout pas afficher leur pouvoir, leur désir de pouvoir en public, en société, mais l’exercent à loisir, en privé, mieux que personne de mille et une façons, lorsque la porte sur le monde extérieur est fermée à clé.
Le pouvoir des femmes est lié également à la liberté, essentiellement à la liberté, à l’indépendance financière essentielle, mais surtout selon moi, avant tout, à la liberté d’expression, à la liberté d’expression et d’action.
Le pouvoir de la femme est quelque chose de crucial à cet endroit-là précisément. Ce n’est pas une anecdote, ce n’est point un caprice, un style, un genre, une boutade, une blague, une anecdote. Etre libres d’être qui nous sommes, sans que personne ne nous dicte qui nous devons être ou ce que nous devons faire, ou penser.
Vive la liberté ! A tout jamais.
Une pensée à ce sujet toute particulière pour les femmes iraniennes… kurdes, afghanes, …pour toutes les femmes privées de cette liberté de penser et d’agir comme elles le souhaitent, avec respect et dignité.
Mon héroïne Adèle dans mon roman La cheville , premier opus de ma trilogie intitulée : La vie est une affaire personnelle … (Editions Ipanema , octobre 2022) est une femme de pouvoir dans le sens où c’est une femme libre justement, indépendante.
Le pouvoir des femmes, les femmes et le pouvoir, ce n’est pas forcément cette image parfois un peu caricaturale, entre guillemets, d’une femme qui déploie sans féminité aucune mais seulement avec férocité son besoin , ou sa rage de pouvoir.
Le pouvoir des femmes est là et magique. Réel. Authentique. De l’intuition féminine en général voire de la médiumnité, de la voyance, depuis des siècles, de celles appelées, qualifiées par trouille, par méconnaissance et non maîtrise, de manière basique et assez méprisante encore une fois de sorcières.
Le pouvoir des femmes, les femmes et le pouvoir, ce n’est pas forcément cette image parfois un peu caricaturale, entre guillemets, d’une femme qui déploie sans féminité aucune mais seulement avec férocité son besoin , ou sa rage de pouvoir.
Le pouvoir des femmes est là et magique. Réel. Authentique. De l’intuition féminine en général voire de la médiumnité, de la voyance, depuis des siècles, de celles appelées, qualifiées par trouille, par méconnaissance et non maîtrise, de manière basique et assez méprisante encore une fois de sorcières.
Le pouvoir des femmes est aussi à cet endroit-là, le mystère du pouvoir de l’intuition. L’intuition féminine...
Les sorciers, les hommes sorciers, étaient au Moyen Age et plus tard, davantage respectés et sans commune mesure, on leur octroyait le don de guérir, de soigner. Les femmes, non. Elles, elles étaient brûlées, vives sur le bûcher. Comme une légère différence dans l’air…
Certaines peuvent avoir le désir de jouer plus que de raison de ce don, de ce pouvoir, et cela, bien évidemment, est très dangereux. Peut être dramatique de conséquences directes et indirectes. C’est d’ailleurs ce dont je parle, entre autres, dans mon livre paru en octobre 2019, toujours aux Éditions Ipanema, Une voyante passe aux aveux , un livre d’Entretiens avec Marie-Noëlle Dompé, ancienne avocate et magistrate, qui dans cet ouvrage me pose un certain nombre de questions sur le sujet.
La femme, qui a des dons de voyance, exerce, il semblerait, une certaine fascination mais est crainte dans ce pouvoir -là et encore aujourd’hui et peut être plus ou moins rejetée, en tous cas, cataloguée de manière simpliste.
S’ajoute à cela le pouvoir de la pensée, de la force, de la puissance de la pensée.
Le pouvoir n’est pas toujours celui que l’on croit.
Le pouvoir des mots, le pouvoir du silence. Du silence…
Aussi mystérieux que le pouvoir des femmes de pouvoir.
Les sorciers, les hommes sorciers, étaient au Moyen Age et plus tard, davantage respectés et sans commune mesure, on leur octroyait le don de guérir, de soigner. Les femmes, non. Elles, elles étaient brûlées, vives sur le bûcher. Comme une légère différence dans l’air…
Certaines peuvent avoir le désir de jouer plus que de raison de ce don, de ce pouvoir, et cela, bien évidemment, est très dangereux. Peut être dramatique de conséquences directes et indirectes. C’est d’ailleurs ce dont je parle, entre autres, dans mon livre paru en octobre 2019, toujours aux Éditions Ipanema, Une voyante passe aux aveux , un livre d’Entretiens avec Marie-Noëlle Dompé, ancienne avocate et magistrate, qui dans cet ouvrage me pose un certain nombre de questions sur le sujet.
La femme, qui a des dons de voyance, exerce, il semblerait, une certaine fascination mais est crainte dans ce pouvoir -là et encore aujourd’hui et peut être plus ou moins rejetée, en tous cas, cataloguée de manière simpliste.
S’ajoute à cela le pouvoir de la pensée, de la force, de la puissance de la pensée.
Le pouvoir n’est pas toujours celui que l’on croit.
Le pouvoir des mots, le pouvoir du silence. Du silence…
Aussi mystérieux que le pouvoir des femmes de pouvoir.
Les femmes et le pouvoir …
Il s’agit aussi d’un désir puissant et non dissimulé de vivre d’exister, avec passion avec fougue, d’êtres vivantes, debout, intègres et non soumises. De porter sur les êtres, sur les choses, les événements, des tentatives de réflexions personnelles, propres, un besoin, une quête, sa propre quête. Les femmes et le pouvoir c’est une certaine poésie, une rage poétique et sensible de vivre. C’est quelque chose qui pousse, qui nous oblige, nous pousse de l’intérieur à trouver le courage et à ne pas faiblir, à ne pas fléchir. Donc révélateur certainement d’un certain type de caractère, de tempérament. De foi .
Mais là encore, et pour conclure, insister encore, les femmes et le pouvoir, ce n’est pas toujours un désir, une obsession mais davantage une nécessité de survie.
On décide d’avoir du pouvoir, ou de prendre le pouvoir sans le savoir parfois et cela se construit par la suite au fil d’une vie toute entière. Je pense bien évidemment , entre autres, à Madame Simone Weil .
Les femmes et le pouvoir est un vaste sujet, qui comme bien d’autres sujets, a de l’intérêt aussi et peut-être surtout, dans les questions qu’il nous inspire et non obligatoirement dans les réponses qu’on croit donner ou que nous croyons pouvoir donner. La vérité, en pensée unique, n’existe pas, il me semble, car il y a toujours comme en tout d’ailleurs, plusieurs formes de vérité, plusieurs possibilités de vérités et d’interprétations. Plusieurs formes de pouvoirs autant qu’il y a des milliards de femmes sur Terre.
Et si les femmes et le pouvoir c’était tout simplement une certaine volonté, une détermination particulière, une énergie de vie ?…
Vive les Femmes ! Et vive les Hommes aussi qui portent un intérêt pour la place de la femme, des femmes dans nos sociétés et dans les différents pays et territoires du monde, de ce monde d’aujourd’hui.
Il s’agit aussi d’un désir puissant et non dissimulé de vivre d’exister, avec passion avec fougue, d’êtres vivantes, debout, intègres et non soumises. De porter sur les êtres, sur les choses, les événements, des tentatives de réflexions personnelles, propres, un besoin, une quête, sa propre quête. Les femmes et le pouvoir c’est une certaine poésie, une rage poétique et sensible de vivre. C’est quelque chose qui pousse, qui nous oblige, nous pousse de l’intérieur à trouver le courage et à ne pas faiblir, à ne pas fléchir. Donc révélateur certainement d’un certain type de caractère, de tempérament. De foi .
Mais là encore, et pour conclure, insister encore, les femmes et le pouvoir, ce n’est pas toujours un désir, une obsession mais davantage une nécessité de survie.
On décide d’avoir du pouvoir, ou de prendre le pouvoir sans le savoir parfois et cela se construit par la suite au fil d’une vie toute entière. Je pense bien évidemment , entre autres, à Madame Simone Weil .
Les femmes et le pouvoir est un vaste sujet, qui comme bien d’autres sujets, a de l’intérêt aussi et peut-être surtout, dans les questions qu’il nous inspire et non obligatoirement dans les réponses qu’on croit donner ou que nous croyons pouvoir donner. La vérité, en pensée unique, n’existe pas, il me semble, car il y a toujours comme en tout d’ailleurs, plusieurs formes de vérité, plusieurs possibilités de vérités et d’interprétations. Plusieurs formes de pouvoirs autant qu’il y a des milliards de femmes sur Terre.
Et si les femmes et le pouvoir c’était tout simplement une certaine volonté, une détermination particulière, une énergie de vie ?…
Vive les Femmes ! Et vive les Hommes aussi qui portent un intérêt pour la place de la femme, des femmes dans nos sociétés et dans les différents pays et territoires du monde, de ce monde d’aujourd’hui.
Pour terminer, voici quelques citations inspirantes.
Simone Weil
« Ma revendication en tant que femme c’est que ma différence soit prise en compte, que je ne sois pas contrainte de m’adapter au modèle masculin. »
Sacha Guitry
« Une femme, une vraie femme, c’est avant tout une femme qui n’est pas féministe. » ( dans Elles et Toi, 1958)
Dans Ruses et plaisirs de la séduction de Marie-Francine Mansour, publié chez Albin Michel,
« L’art de la séduction est un art de la guerre. »
« La femme corrompt l’homme, le met face à la tentation et fait naître son désir. Désarmé, il abdique sa raison, sacrifie son pouvoir. »
« Désormais, toutes les femmes seront les filles d’Eve. La fin de l’Ancien Testament fait écho à ses débuts : « C’est par la femme qu’a commencé le péché. C’est à cause d’elle que nous mourrons fous. », déclare l’Ecclésiaste.( XXV, 24).
Vive les Femmes et leur dignité , notre dignité , notre respect les unes envers les autres en premier lieu, notre force notre entraide. Humaine et généreuse.
Simone Weil
« Ma revendication en tant que femme c’est que ma différence soit prise en compte, que je ne sois pas contrainte de m’adapter au modèle masculin. »
Sacha Guitry
« Une femme, une vraie femme, c’est avant tout une femme qui n’est pas féministe. » ( dans Elles et Toi, 1958)
Dans Ruses et plaisirs de la séduction de Marie-Francine Mansour, publié chez Albin Michel,
« L’art de la séduction est un art de la guerre. »
« La femme corrompt l’homme, le met face à la tentation et fait naître son désir. Désarmé, il abdique sa raison, sacrifie son pouvoir. »
« Désormais, toutes les femmes seront les filles d’Eve. La fin de l’Ancien Testament fait écho à ses débuts : « C’est par la femme qu’a commencé le péché. C’est à cause d’elle que nous mourrons fous. », déclare l’Ecclésiaste.( XXV, 24).
Vive les Femmes et leur dignité , notre dignité , notre respect les unes envers les autres en premier lieu, notre force notre entraide. Humaine et généreuse.
(Sur la photo, 4 femmes solidaires, Marjorie Poeydomenge, Manuele Peras, Swan Feitelson, Valérie Fauchet, le 8 mars 2023)
Solidaires entre nous nous devons vraiment l’être profondément indéfectiblement.
Le pouvoir des femmes ne doit jamais exister contre qui ce soit, cela serait trop simpliste, et pas vraiment constructif. Ne jamais diviser pour régner.
Valérie Fauchet "
Solidaires entre nous nous devons vraiment l’être profondément indéfectiblement.
Le pouvoir des femmes ne doit jamais exister contre qui ce soit, cela serait trop simpliste, et pas vraiment constructif. Ne jamais diviser pour régner.
Valérie Fauchet "
PHIL-ANALYSE
Dimanche 2 Octobre 2022
Les artistes seraient-ils tous des médiums ? Encore faudrait-il définir ce qu’est la médiumnité… L’inspiration des artistes a toujours été un mystère par son côté imprévisible et presque magique. Même André Breton s’était intéressé au phénomène des peintres spirites comme Fleury Joseph Crépin. Et a entretenu un rapport énigmatique avec le surnaturel dans certains passages de son Second manifeste.
Dans le cadre de notre livre La revanche du Cerveau droit (Ferial Furon et Marjorie Poeydomenge), nous avons eu l’opportunité d’animer une conférence sur l’art et la médiumnité à l’Agora (https://www.agora.paris). Vous trouverez dans cet article quelques réflexions que nous avons pu développer sur ce sujet prolixe.
Autant il est facile de mesurer l’intelligence logicomathématique et langagière par des tests dont le plus connu est le QI, autant l’intelligence créative et artistique reste indomptable. On n’arrive pas à la maîtriser avec notre « cerveau gauche ». Nous évoquons dans La revanche du cerveau droit notamment Victor Hugo et son côté mystique. Le XIXème siècle était très ouvert à ces phénomènes paranormaux. Sur le plan philosophique, c’est l’époque de Schopenhauer, de Nietzsche, de l’irrationnel… De la reconnaissance d’une certaine volonté de puissance inconsciente.
Dans l’Antiquité, l’inspiration artistique était attribuée aux Muses, qui donnaient aux humains les dons du chant, de la comédie, de la danse… Progressivement, les Muses sont devenues humaines… et servent plutôt de modèles pour les peintres. Pour les Grecs, l’art inspiré par « l’invisible » allait de soi… Goethe a raconté que seul Faust a été rédigé par ses soins, le reste aurait été dicté par des forces spirituelles…
Dans l’Antiquité, l’inspiration artistique était attribuée aux Muses, qui donnaient aux humains les dons du chant, de la comédie, de la danse… Progressivement, les Muses sont devenues humaines… et servent plutôt de modèles pour les peintres. Pour les Grecs, l’art inspiré par « l’invisible » allait de soi… Goethe a raconté que seul Faust a été rédigé par ses soins, le reste aurait été dicté par des forces spirituelles…
Rachilde, surnommée Mademoiselle Baudelaire, une histoire de littérature médiumnique
De nombreux artistes ont témoigné sur le côté parfois paranormal de leur création. Mais que signifie exactement médiumnité ?
Les phénomènes paranormaux sont appréhendés par les scientifiques selon deux types de croyance : les uns les attribuent aux phénomènes PSI (voyance, télépathie, prémonition, psychokinèse,…) liés aux capacités extrasensorielles, les autres à une expérience consciente qui survit après la mort (âme, esprit). La médiumnité suppose qu’une entité invisible et consciente communique avec le médium qui est un canal, un intermédiaire entre le monde des vivants et le monde des morts.
La médiumnité renvoie aussi à la notion d’inconscient que nous avons abordé dans La revanche du cerveau droit sous l’angle jungien. Jung qui a longtemps travaillé avec le physicien quantique Wolfgang Pauli, défendait le concept d’inconscient collectif qui fait référence à l’abysse infini de notre inconscient en lien avec la mémoire universelle de l’humanité tout entière. Jung nous dit qu’il recèle la totalité des archétypes qui se sont forgés dans la mémoire universelle tout au long de l’histoire de l’humanité et dont chaque individu a accès dans la strate la plus profonde de son inconscient.
L’inspiration, un état modifié de conscience ?
Certains états permettent de dépasser la réalité ordinaire, méditation, états mystiques, intuition, transe, hypnose état érotique, rêves…. D’après le témoignage d’un de ses modèles, Van Gogh peignait en transe devant son chevalet. On compare ces états de transe au somnambulisme. D’ailleurs, il peut y avoir un lien avec le cerveau droit. Dans notre livre, on explique que la transe chamanique, la méditation active le cerveau droit. Et même la poésie ! Les poètes sont justement des artistes très mystérieux, leur lyrisme frôle parfois la transe. Point étonnant que Victor Hugo était attiré par le spiritisme et le dessin médiumnique.
Victor Hugo a souvent participé à des séances de spiritisme (tables tournantes) avec sa famille notamment lorsqu’ils vivaient en exil sur l’Ile de Jersey. Il cherchait notamment à communiquer avec sa fille décédée Léopoldine. Par ailleurs, il se serait entretenu avec de grandes personnalité de la philosophie, de la littérature et du théâtre. Les procès-verbaux de des séances ont été publiés 40 ans après sa mort.
D’ailleurs coïncidence incroyable, quand nous avons décidé de préparer cette conférence, Marjorie a reçu en service presse un livre sur un auteur incroyable du 19ème siècle : Rachilde (Roman de Cécile Chabaud). Une écrivaine qui a décidé de prendre le nom d’un comte suédois lors d’une séance de spiritisme et qui écrivait parfois en mode automatique, dont le style parfois semblait être inspiré par le marquis de Sade…. C’est toujours dangereux de convoquer les morts quel que soit le siècle. Et pourtant le spiritisme était à la mode au XIXème siècle. Était-ce lié à l’influence du spirite Allan Kardec ? Comme le pratiquait Victor Hugo dans l’espoir de retrouver sa fille Léopoldine, les grands-parents de Marguerite, Rachilde, avaient l’espoir d’entrer en communication avec leur fils défunt. Le spiritisme était une façon de prolonger la vie et l’espoir des retrouvailles. Un soir, lors d’une séance de spiritisme où le ciel était insondable et voilé, Marguerite entendit un fantôme lui parler… C’était un certain « Rachilde », comte Suédois né en 1523 à Göteborg. C’est ainsi que Marguerite adopta son nom de lettres, par une séance de médiumnité.
Le psychologue Frédéric WH Myers, figure légendaire de la parapsychologie, a établi des rapports entre l’état artistique, le génie créatif et les états de transe et les facultés psi en prenant des exemples chez Georges Sand, Mozart, Dickens… On peut parler aussi « d’états psychospirituels ».
A titre anecdotique, les artistes ont plus de propension à croire à la réincarnation que les personnes non artistes. Certains attribuent leurs dons à des vies antérieures… Ce que l’on appelait à l’époque de Victor Hugo la « métempsychose ». Certains expliquent leur précocité par ce prisme. Tina Turner pense d’ailleurs qu’elle a été pharaonne…
Les phénomènes paranormaux sont appréhendés par les scientifiques selon deux types de croyance : les uns les attribuent aux phénomènes PSI (voyance, télépathie, prémonition, psychokinèse,…) liés aux capacités extrasensorielles, les autres à une expérience consciente qui survit après la mort (âme, esprit). La médiumnité suppose qu’une entité invisible et consciente communique avec le médium qui est un canal, un intermédiaire entre le monde des vivants et le monde des morts.
La médiumnité renvoie aussi à la notion d’inconscient que nous avons abordé dans La revanche du cerveau droit sous l’angle jungien. Jung qui a longtemps travaillé avec le physicien quantique Wolfgang Pauli, défendait le concept d’inconscient collectif qui fait référence à l’abysse infini de notre inconscient en lien avec la mémoire universelle de l’humanité tout entière. Jung nous dit qu’il recèle la totalité des archétypes qui se sont forgés dans la mémoire universelle tout au long de l’histoire de l’humanité et dont chaque individu a accès dans la strate la plus profonde de son inconscient.
L’inspiration, un état modifié de conscience ?
Certains états permettent de dépasser la réalité ordinaire, méditation, états mystiques, intuition, transe, hypnose état érotique, rêves…. D’après le témoignage d’un de ses modèles, Van Gogh peignait en transe devant son chevalet. On compare ces états de transe au somnambulisme. D’ailleurs, il peut y avoir un lien avec le cerveau droit. Dans notre livre, on explique que la transe chamanique, la méditation active le cerveau droit. Et même la poésie ! Les poètes sont justement des artistes très mystérieux, leur lyrisme frôle parfois la transe. Point étonnant que Victor Hugo était attiré par le spiritisme et le dessin médiumnique.
Victor Hugo a souvent participé à des séances de spiritisme (tables tournantes) avec sa famille notamment lorsqu’ils vivaient en exil sur l’Ile de Jersey. Il cherchait notamment à communiquer avec sa fille décédée Léopoldine. Par ailleurs, il se serait entretenu avec de grandes personnalité de la philosophie, de la littérature et du théâtre. Les procès-verbaux de des séances ont été publiés 40 ans après sa mort.
D’ailleurs coïncidence incroyable, quand nous avons décidé de préparer cette conférence, Marjorie a reçu en service presse un livre sur un auteur incroyable du 19ème siècle : Rachilde (Roman de Cécile Chabaud). Une écrivaine qui a décidé de prendre le nom d’un comte suédois lors d’une séance de spiritisme et qui écrivait parfois en mode automatique, dont le style parfois semblait être inspiré par le marquis de Sade…. C’est toujours dangereux de convoquer les morts quel que soit le siècle. Et pourtant le spiritisme était à la mode au XIXème siècle. Était-ce lié à l’influence du spirite Allan Kardec ? Comme le pratiquait Victor Hugo dans l’espoir de retrouver sa fille Léopoldine, les grands-parents de Marguerite, Rachilde, avaient l’espoir d’entrer en communication avec leur fils défunt. Le spiritisme était une façon de prolonger la vie et l’espoir des retrouvailles. Un soir, lors d’une séance de spiritisme où le ciel était insondable et voilé, Marguerite entendit un fantôme lui parler… C’était un certain « Rachilde », comte Suédois né en 1523 à Göteborg. C’est ainsi que Marguerite adopta son nom de lettres, par une séance de médiumnité.
Le psychologue Frédéric WH Myers, figure légendaire de la parapsychologie, a établi des rapports entre l’état artistique, le génie créatif et les états de transe et les facultés psi en prenant des exemples chez Georges Sand, Mozart, Dickens… On peut parler aussi « d’états psychospirituels ».
A titre anecdotique, les artistes ont plus de propension à croire à la réincarnation que les personnes non artistes. Certains attribuent leurs dons à des vies antérieures… Ce que l’on appelait à l’époque de Victor Hugo la « métempsychose ». Certains expliquent leur précocité par ce prisme. Tina Turner pense d’ailleurs qu’elle a été pharaonne…
La médiumnité artistique, une forme d’hypersensibilité ?
Certains experts voient dans l’art médiumnique un phénomène de synesthésie, une correspondance entre les sens, comme le pratiquait Rimbaud dans Voyelles. Nous en parlons dans notre livre sur l’hypersensibilité. Certains voient des sons, d’autres traduisent des mouvements en couleurs… Cela rappelle l’image de l’artiste de Nietzsche : une physiologie supérieure (source : Livre du philosophe). Cela ressemble à un état de fusion.
Vous avez probablement entendu parler des peintres spirites comme Augustin Lesage, mais le plus troublant reste les phénomènes Psi dans la musique.
Dans son livre Psi, Erik Pigani explique que les psychologues ont fait différentes études pour mesurer les capacités intuitives des artistes. Citons notamment les travaux de Thelma Moss, une étude expérimentale qui a été menée sur 146 personnes, un groupe d’artistes professionnels, et l’autre, des non artistes. Le meilleur résultat en termes de compétences intuitives a été obtenu par les artistes : ils ont fait mieux que l’aléatoire. Il existe donc des corrélations avec le PSI et la créativité. Les musiciens ont d’ailleurs obtenu de meilleures performances en ESP (Extra Sensori Powers) que les autres artistes. Le Psi et la créativité semblent répondre à la même dynamique psychique.
La musique semble favoriser des états modifiés de conscience. Chopin écrivait à une amie qu’il avait vu des personnages monstrueux sortir du coffre de son piano pendant qu’il jouait sa célèbre Marche Funèbre. Rosemary Brown, cette pianiste amatrice, a été en contact avec les esprits des plus grands musiciens. Surpris de la qualité de ses compositions, les musicologues sont venus l’expertiser, et pour eux, il était impossible que cela soit truqué. Elle reçoit également les plus grands musiciens de son temps pour les conseiller. Et ses conseils sont d’une précision incroyable. Elle a même sermonné Liszt qui allait trop vite pour lui dicter les notes !
Il est possible aussi que Wagner, le célèbre compositeur allemand, ait été un peu médium… La musique de Wagner est très particulière, sa puissance émotionnelle peut induire des états modifiés de conscience. Citons à ce propos une histoire relatée par Erik Pigani dans Psi à propos d’une cantatrice, Germaine Lubin, pour montrer la puissance des opéras de Wagner. En 1930, Germaine Lubin interprète Isolde à l’Opéra de Paris. A la fin du dernier acte, Isolde meurt, Germaine incarne tellement Isolde qu’elle se sent mourir aussi. Elle voit son corps flotter au-dessus de la scène, ainsi qu’une belle lumière et des personnes aux regards extraordinaires comme des anges. Ce fut une de ses plus belles expériences. Lorsque cette cantatrice décéda, Erik entendit à la radio La mort d’Isolde, enregistrée précisément en 1930 ! Mais ce n’est pas tout : un professeur biochimiste (Michel Bouniac) qui a étudié Wagner sous toutes les coutures constate que dans la mort d’Isolde, Wagner décrit parfaitement l’expérience NDE en 5 phases en 1859. Ce qui est très troublant…
Quand Kandinsky a écouté le Lohengrin en 1911, il a vu jaillir des lignes et des couleurs. Chose peu connue, Wagner s’est inspiré de Schopenhauer, l’Essai sur les apparitions et opuscules divers, où le philosophe allemand évoque le « somnambulisme magnétique ». Pour Wagner, Shakespeare et Beethoven sont des somnambules clairvoyants. Beethoven était un voyant des sons, ce qui explique que même malentendant, il a pu continuer à composer et jouer.
Quelle frontière entre expérience médiumnique ou mystique ?
Au-delà de la médiumnité, on a parfois l’impression que les artistes ont des expériences mystiques, comme s’ils conversaient avec des anges ou Dieu… Citons l’histoire d’Aretha Franklin, qui a connu le succès grâce à son meilleur album inspiré par sa foi avec 2 millions d’exemplaire vendus.
Le chanteur Santana était aussi assez mystique, il croyait à l’existence des anges. Un jour, il refuse d’enregistrer une chanson avec Julio Iglesias, estimant leurs styles respectifs trop éloignés. Mais pendant une partie de tennis, un ange lui demande de le faire et de reverser les gains pour une bonne cause. Ce type d’expérience contraint à une certaine humilité. Reconnaître que dans la créativité, on ne maîtrise pas tout…
Certains experts voient dans l’art médiumnique un phénomène de synesthésie, une correspondance entre les sens, comme le pratiquait Rimbaud dans Voyelles. Nous en parlons dans notre livre sur l’hypersensibilité. Certains voient des sons, d’autres traduisent des mouvements en couleurs… Cela rappelle l’image de l’artiste de Nietzsche : une physiologie supérieure (source : Livre du philosophe). Cela ressemble à un état de fusion.
Vous avez probablement entendu parler des peintres spirites comme Augustin Lesage, mais le plus troublant reste les phénomènes Psi dans la musique.
Dans son livre Psi, Erik Pigani explique que les psychologues ont fait différentes études pour mesurer les capacités intuitives des artistes. Citons notamment les travaux de Thelma Moss, une étude expérimentale qui a été menée sur 146 personnes, un groupe d’artistes professionnels, et l’autre, des non artistes. Le meilleur résultat en termes de compétences intuitives a été obtenu par les artistes : ils ont fait mieux que l’aléatoire. Il existe donc des corrélations avec le PSI et la créativité. Les musiciens ont d’ailleurs obtenu de meilleures performances en ESP (Extra Sensori Powers) que les autres artistes. Le Psi et la créativité semblent répondre à la même dynamique psychique.
La musique semble favoriser des états modifiés de conscience. Chopin écrivait à une amie qu’il avait vu des personnages monstrueux sortir du coffre de son piano pendant qu’il jouait sa célèbre Marche Funèbre. Rosemary Brown, cette pianiste amatrice, a été en contact avec les esprits des plus grands musiciens. Surpris de la qualité de ses compositions, les musicologues sont venus l’expertiser, et pour eux, il était impossible que cela soit truqué. Elle reçoit également les plus grands musiciens de son temps pour les conseiller. Et ses conseils sont d’une précision incroyable. Elle a même sermonné Liszt qui allait trop vite pour lui dicter les notes !
Il est possible aussi que Wagner, le célèbre compositeur allemand, ait été un peu médium… La musique de Wagner est très particulière, sa puissance émotionnelle peut induire des états modifiés de conscience. Citons à ce propos une histoire relatée par Erik Pigani dans Psi à propos d’une cantatrice, Germaine Lubin, pour montrer la puissance des opéras de Wagner. En 1930, Germaine Lubin interprète Isolde à l’Opéra de Paris. A la fin du dernier acte, Isolde meurt, Germaine incarne tellement Isolde qu’elle se sent mourir aussi. Elle voit son corps flotter au-dessus de la scène, ainsi qu’une belle lumière et des personnes aux regards extraordinaires comme des anges. Ce fut une de ses plus belles expériences. Lorsque cette cantatrice décéda, Erik entendit à la radio La mort d’Isolde, enregistrée précisément en 1930 ! Mais ce n’est pas tout : un professeur biochimiste (Michel Bouniac) qui a étudié Wagner sous toutes les coutures constate que dans la mort d’Isolde, Wagner décrit parfaitement l’expérience NDE en 5 phases en 1859. Ce qui est très troublant…
Quand Kandinsky a écouté le Lohengrin en 1911, il a vu jaillir des lignes et des couleurs. Chose peu connue, Wagner s’est inspiré de Schopenhauer, l’Essai sur les apparitions et opuscules divers, où le philosophe allemand évoque le « somnambulisme magnétique ». Pour Wagner, Shakespeare et Beethoven sont des somnambules clairvoyants. Beethoven était un voyant des sons, ce qui explique que même malentendant, il a pu continuer à composer et jouer.
Quelle frontière entre expérience médiumnique ou mystique ?
Au-delà de la médiumnité, on a parfois l’impression que les artistes ont des expériences mystiques, comme s’ils conversaient avec des anges ou Dieu… Citons l’histoire d’Aretha Franklin, qui a connu le succès grâce à son meilleur album inspiré par sa foi avec 2 millions d’exemplaire vendus.
Le chanteur Santana était aussi assez mystique, il croyait à l’existence des anges. Un jour, il refuse d’enregistrer une chanson avec Julio Iglesias, estimant leurs styles respectifs trop éloignés. Mais pendant une partie de tennis, un ange lui demande de le faire et de reverser les gains pour une bonne cause. Ce type d’expérience contraint à une certaine humilité. Reconnaître que dans la créativité, on ne maîtrise pas tout…
Pourquoi la musique aurait--elle un pouvoir intuitif plus puissant que les autres arts ?
Dans notre livre La revanche du cerveau droit, nous rappelons que la musique est le parfait équilibre entre nos deux hémisphères cérébraux : cerveau droit pour la mélodie et cerveau gauche pour les notes et le rythme. Ainsi, cela rejoint la thèse de notre livre qui prône une alternance harmonieuse entre un mode de pensée cerveau droit (arborescente et analogique encline à la créativité) et un mode de pensée cerveau gauche (rigueur analytique) pour que l’humanité enclenche le bon virage vers un avenir humainement durable. L’intelligence humaine est plus puissante que la machine car elle sait mobiliser des capacités extraordinaires et elle est capable de transcendance.
Pour aller plus loin :
Psi : enquête sur les phénomènes paranormaux, d’Erik Pigani, J’ai lu 2001 (ou version d’origine, Editions du Chatelet, 1999)
Rachilde, homme de lettres, de Cécile Chabaud, Editions Ecriture, 2022.
La revanche du cerveau droit, une ouverture pour demain, Ferial Furon et Marjorie Poeydomenge, Editions du Dauphin, 2022
Marjorie Poeydomenge et Ferial Furon
Dans notre livre La revanche du cerveau droit, nous rappelons que la musique est le parfait équilibre entre nos deux hémisphères cérébraux : cerveau droit pour la mélodie et cerveau gauche pour les notes et le rythme. Ainsi, cela rejoint la thèse de notre livre qui prône une alternance harmonieuse entre un mode de pensée cerveau droit (arborescente et analogique encline à la créativité) et un mode de pensée cerveau gauche (rigueur analytique) pour que l’humanité enclenche le bon virage vers un avenir humainement durable. L’intelligence humaine est plus puissante que la machine car elle sait mobiliser des capacités extraordinaires et elle est capable de transcendance.
Pour aller plus loin :
Psi : enquête sur les phénomènes paranormaux, d’Erik Pigani, J’ai lu 2001 (ou version d’origine, Editions du Chatelet, 1999)
Rachilde, homme de lettres, de Cécile Chabaud, Editions Ecriture, 2022.
La revanche du cerveau droit, une ouverture pour demain, Ferial Furon et Marjorie Poeydomenge, Editions du Dauphin, 2022
Marjorie Poeydomenge et Ferial Furon
PHIL-ANALYSE
Jeudi 31 Octobre 2019
Notre monde hypermoderne tend à manquer d'ironie... d'où les symptômes envahissants de soi-disant "pervers narcissiques", "zèbres surdoués" ou "bipolaires"... Nous ne supportons plus la nuance. C'est pour cette raison qu'il est grand temps de se replonger dans les pensées de notre cher Vladimir Jankélévitch. La philosophie a toujours été la plus grande défenderesse de l'ironie, car elle est le préalable à toute démarche authentiquement philosophique.
En 2010, j'ai utilisé cette ironie pour "oser" décrire les philosophes par leur signe astrologique. L'ironie c'est aussi savoir s'aventurer dans des voies sinueuses hors des sentiers battus (et rabattus), pour chercher son fil d'Ariane.
Je vous propose donc dans cet article de découvrir le chapitre sur Vladimir Jankélévitch et son art de manier la contradiction.
Vladimir Jankélévitch, la contradiction en musique
(Vierge ascendant Sagittaire, né le 31 août 1903 à Bourges. Philosophe et musicologue Français)
La Vierge, par sa pudeur légendaire et son sens de la réserve, est souvent à tort considérée comme le signe le moins attractif du Zodiaque. Son regard figé dans les détails peut certes la condamner dans l'inertie, mais lui confère des théories philosophiques intéressantes. Je vous le confirme : la Vierge est étonnante, surtout lorsqu'elle philosophe ! Pourquoi ? Parce que le Virginien sait jouer avec les contrastes. Jankélévitch en est un parfait représentant par la musicalité de son ironie.
L'écart minimal entre les durées du jour et de la nuit pousse les natifs de la Vierge à sentir les incompatibilités comme les complémentarités. Ainsi, l'originalité de leur philosophie réside notamment dans l'expression de la contradiction.
Le Virginien a conscience que rien n'est acquis. Tout est fragile. Pour cela, il ne cesse d'anticiper. Jankélévitch aime permuter les sens ambivalents de l'existence et se méfie des vérités passionnées. "Comprendre, c'est déjouer ; la connaissance dépassionne les sentiments" . Il faut dégriser sa conscience. Il éprouve une grande méfiance envers les dogmatistes qui se prennent trop au sérieux et qui ne veulent pas descendre du singe ! D'ailleurs, n'est-ce pas tout le débat actuel entre la biologiste Lucy Vincent et les pourfendeurs de l'amour romantique : l'Homme n'est-il qu'un simple animal soumis au pouvoir des phéromones, ou, au contraire, a-t-il une conscience supérieure qui lui permet d'accéder à la beauté suprasensible du monde platonicien ? Comme tout cela est invisible, difficile de trancher, l'amour est invisible. C'est pour cette raison qu'il est difficile de le définir. Jankélévitch redoute les définitions trop hâtives et étroites. En amour, il est essentiel de rester humble et de ne pas s'emporter dans des sentiments exacerbés. Ce qui n'est pourtant pas évident pour un signe de la Vierge (ascendant Sagittaire de surcroît !), "Hélas ! Pourquoi ne peut-on pas à la fois être raisonnable et ardent ?" .
Il faut avoir conscience que parfois les attirances ne sont que des "malentendus" du corps. "Nous croyons aimer et nous récitons !" . Les sentiments ne sont peut-être que des pastiches, nos personnalités que des plagiats. Peut-être ne faisons-nous qu'imiter les contes de fées, les romans passionnés avec lesquels nos proches nous ont bercés, parce que la passion est "chic".
Comment alors reconnaître si nous aimons authentiquement ? Pas facile. C'est cela l'ironie ! Juste en avoir conscience, pour se préparer aux mouvements fougueux de l'amour. La linéarité n'est pas adaptée à l'amour. Comme le temps et la musique, l'amour reste insaisissable. "La musique est à la fois expressive et inexpressive, sérieuse et frivole, profonde et superficielle; elle a un sens et n'a pas de sens." Comme les sentiments. Le tout est de remettre le désir à sa place. La volonté est plus intelligente que ce dernier. Le désir veut la fin, mais pas les moyens ! La volonté accepte la dialectique, les hauts et les bas, alors que le désir refuse les fluctuations, c'est un ogre ; son appétit rapidement frustré tourne en rond. Il ne sait même pas pourquoi il désire. Pour mieux dompter ses désirs, il suffit alors d'écouter ce que nous raconte la musique.
Comme Hegel, Jankélévitch a aussi sa vision de l'histoire. Les Virginiens ont besoin de délimiter leur territoire, de dénicher des cycles dans l'histoire. "L'histoire est menaçante tant que certains recommencements ne nous laissent pas deviner un cycle, une aventure esthétique, une période bien recourbée" . Afin de rassurer les européens sur leur pouvoir d'achat, les économistes n'invoquent-ils pas à chaque fois des "cycles économiques" ? L'éternel retour semble être le lot de l'histoire, tout comme la mode : "La mode, c'est l'alternance d'une contagion et d'un reflux, l'imitation pourchassant la nouveauté" . "Depuis que le monde est monde, la plèbe a passé son temps à traquer les mille secrets des snobs et les snobs à déjouer la curiosité de la plèbe". En témoigne le succès grandissant des magazines people et de la mode hype ! Mais à quoi bon tomber dans la contagion de l'imitation ? L'ironie est bien plus reposante.
(Vierge ascendant Sagittaire, né le 31 août 1903 à Bourges. Philosophe et musicologue Français)
La Vierge, par sa pudeur légendaire et son sens de la réserve, est souvent à tort considérée comme le signe le moins attractif du Zodiaque. Son regard figé dans les détails peut certes la condamner dans l'inertie, mais lui confère des théories philosophiques intéressantes. Je vous le confirme : la Vierge est étonnante, surtout lorsqu'elle philosophe ! Pourquoi ? Parce que le Virginien sait jouer avec les contrastes. Jankélévitch en est un parfait représentant par la musicalité de son ironie.
L'écart minimal entre les durées du jour et de la nuit pousse les natifs de la Vierge à sentir les incompatibilités comme les complémentarités. Ainsi, l'originalité de leur philosophie réside notamment dans l'expression de la contradiction.
Le Virginien a conscience que rien n'est acquis. Tout est fragile. Pour cela, il ne cesse d'anticiper. Jankélévitch aime permuter les sens ambivalents de l'existence et se méfie des vérités passionnées. "Comprendre, c'est déjouer ; la connaissance dépassionne les sentiments" . Il faut dégriser sa conscience. Il éprouve une grande méfiance envers les dogmatistes qui se prennent trop au sérieux et qui ne veulent pas descendre du singe ! D'ailleurs, n'est-ce pas tout le débat actuel entre la biologiste Lucy Vincent et les pourfendeurs de l'amour romantique : l'Homme n'est-il qu'un simple animal soumis au pouvoir des phéromones, ou, au contraire, a-t-il une conscience supérieure qui lui permet d'accéder à la beauté suprasensible du monde platonicien ? Comme tout cela est invisible, difficile de trancher, l'amour est invisible. C'est pour cette raison qu'il est difficile de le définir. Jankélévitch redoute les définitions trop hâtives et étroites. En amour, il est essentiel de rester humble et de ne pas s'emporter dans des sentiments exacerbés. Ce qui n'est pourtant pas évident pour un signe de la Vierge (ascendant Sagittaire de surcroît !), "Hélas ! Pourquoi ne peut-on pas à la fois être raisonnable et ardent ?" .
Il faut avoir conscience que parfois les attirances ne sont que des "malentendus" du corps. "Nous croyons aimer et nous récitons !" . Les sentiments ne sont peut-être que des pastiches, nos personnalités que des plagiats. Peut-être ne faisons-nous qu'imiter les contes de fées, les romans passionnés avec lesquels nos proches nous ont bercés, parce que la passion est "chic".
Comment alors reconnaître si nous aimons authentiquement ? Pas facile. C'est cela l'ironie ! Juste en avoir conscience, pour se préparer aux mouvements fougueux de l'amour. La linéarité n'est pas adaptée à l'amour. Comme le temps et la musique, l'amour reste insaisissable. "La musique est à la fois expressive et inexpressive, sérieuse et frivole, profonde et superficielle; elle a un sens et n'a pas de sens." Comme les sentiments. Le tout est de remettre le désir à sa place. La volonté est plus intelligente que ce dernier. Le désir veut la fin, mais pas les moyens ! La volonté accepte la dialectique, les hauts et les bas, alors que le désir refuse les fluctuations, c'est un ogre ; son appétit rapidement frustré tourne en rond. Il ne sait même pas pourquoi il désire. Pour mieux dompter ses désirs, il suffit alors d'écouter ce que nous raconte la musique.
Comme Hegel, Jankélévitch a aussi sa vision de l'histoire. Les Virginiens ont besoin de délimiter leur territoire, de dénicher des cycles dans l'histoire. "L'histoire est menaçante tant que certains recommencements ne nous laissent pas deviner un cycle, une aventure esthétique, une période bien recourbée" . Afin de rassurer les européens sur leur pouvoir d'achat, les économistes n'invoquent-ils pas à chaque fois des "cycles économiques" ? L'éternel retour semble être le lot de l'histoire, tout comme la mode : "La mode, c'est l'alternance d'une contagion et d'un reflux, l'imitation pourchassant la nouveauté" . "Depuis que le monde est monde, la plèbe a passé son temps à traquer les mille secrets des snobs et les snobs à déjouer la curiosité de la plèbe". En témoigne le succès grandissant des magazines people et de la mode hype ! Mais à quoi bon tomber dans la contagion de l'imitation ? L'ironie est bien plus reposante.
Comment devenir ironique en 9 leçons
- utiliser les litotes et les chiasmes, en termes de style, c'est le must de l'ironie.
- atténuer son ego, croyez-moi il prend toujours trop de place.
- épouser la musique, en comprenant le rapport de la mélodie et du rythme.
- ne jamais suivre la mode, faire le contraire des magazines. La meilleure façon d'avoir un train d'avance.
- jouer des contrastes.
- accepter de descendre du singe.
- en amour, aimer les moyens plutôt que le résultat.
- identifier la morale futile : rejeter l'hypocrisie et la fausse générosité.
- Bref, avoir conscience que toute vérité est fragile et que l'apparence est d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours !
L'homme ironique est donc une sorte de surhomme ! Ne s'asseoir sur aucune vérité serait le meilleur moyen d'atteindre la sagesse : une horreur pour Descartes, mais une philosophie fougueuse pour le lecteur avide de rythme et de retournements.
Comme le fait remarquer fort justement notre ami Jankélévitch : "On peut vivre sans philosophie, sans musique, sans joie et sans amour. Mais pas si bien" !
(Chapitre extrait du Livre Descartes n'était pas Vierge, Marjorie Poeydomenge)
- utiliser les litotes et les chiasmes, en termes de style, c'est le must de l'ironie.
- atténuer son ego, croyez-moi il prend toujours trop de place.
- épouser la musique, en comprenant le rapport de la mélodie et du rythme.
- ne jamais suivre la mode, faire le contraire des magazines. La meilleure façon d'avoir un train d'avance.
- jouer des contrastes.
- accepter de descendre du singe.
- en amour, aimer les moyens plutôt que le résultat.
- identifier la morale futile : rejeter l'hypocrisie et la fausse générosité.
- Bref, avoir conscience que toute vérité est fragile et que l'apparence est d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours !
L'homme ironique est donc une sorte de surhomme ! Ne s'asseoir sur aucune vérité serait le meilleur moyen d'atteindre la sagesse : une horreur pour Descartes, mais une philosophie fougueuse pour le lecteur avide de rythme et de retournements.
Comme le fait remarquer fort justement notre ami Jankélévitch : "On peut vivre sans philosophie, sans musique, sans joie et sans amour. Mais pas si bien" !
(Chapitre extrait du Livre Descartes n'était pas Vierge, Marjorie Poeydomenge)
PHIL-ANALYSE
Mercredi 5 Septembre 2018
Ces derniers temps, l'engouement pour Spinoza peut surprendre : sa philosophie, pourtant loin d'être accessible, suscite un enthousiasme digne d'une rock star.
Autant on peut comprendre que les aphorismes de Nietzsche puissent séduire n'importe quel âme romantique, que le Banquet de Platon se lise aisément après 3 verres de vin ou que le pessimisme tranchant d'un Schopenhauer abreuve des adolescents en pleine révolte... Mais comment L'éthique de Spinoza, écrit au XVIIème siècle sous forme d'axiomes, peut aujourd'hui séduire nos cerveaux perpétuellement connectés aux réseaux sociaux et à l'adrénaline des "likes" ?
C'est ce qu'a tenté d'expliquer mon amie Férial Furon dans son article "Pourquoi Spinoza suscite tant de "passions" ? présenté ci-dessous. Je la remercie d'ailleurs d'avoir cité mon livre "Descartes n'était pas Vierge", où je décris Spinoza par son signe astrologique Sagittaire... Ce qui est tout à fait philosophiquement incorrect, mais peut-être les prémices d'un acte spinoziste ? A vous d'en juger...
« Spinoza est en train de devenir un « héros » people. Du coup il fait l’objet d’images réductrices et se voit mis en vedette dans des revues littéraires voire philosophiques. « Pourquoi on se l’arrache aujourd’hui. Comment il bouleversa le XVIIe siècle », sous-titre le Spécial Spinoza du Magazine Littéraire de novembre 2017. Qui se l’arrache et pourquoi faire ? Pour le replanter où ? Comment aurait-il pu « bouleverser le XVIIe siècle » étant donné qu’il n’y était connu que de quelques dizaines d’amis et d’ennemis ? Spinoza est devenu une sorte de hochet (ou de pense-bête) qu’on brandit en toute occasion, pour avoir l’air cultivé ou même « pénétré » par cette grande pensée. Est-ce un bien ou un mal ? Les deux ! Ni l’un ni l’autre, dirait-il, car la vaine gloire (et son double, l’opprobre méchante) ne l’intéressait en rien. »
Cette introduction n’est pas de moi mais de Michel Juffé, philosophe et spécialiste de Spinoza. C’est par ce ton un tantinet dédaigneux que ce « grand connaisseur » du génie d’Amsterdam, déplore l’engouement populaire que suscite Spinoza aujourd’hui. Dans sa contribution parue sur le site i-philo, il distribue des bons points et des mauvais points sur les auteurs qui comme lui ont fait l’effort de transmettre la pensée révolutionnaire de Spinoza en les classant en « vrais amis », « vrai, faux ami » et « faux amis ».
Ma question est donc la suivante : pourquoi la vulgarisation de l’Ethique suscite tant de « passions » chez les connaisseurs comme si elle devait être protégée par une chasse gardée et réservée qu’à une élite intellectuelle ?
Une partie de la réponse pourrait se situer dans ce que dit Bruno Giuliani en avant-propos de son livre le « Bonheur avec Spinoza – l’Ethique reformulée pour notre temps » que j’ai lu d’une traite avec délectation : « combien au final, ont réellement saisi son intuition majeure, l’immanence de Dieu ? Même ceux qui se disent « spinozistes » adoptent généralement des positions incompatibles avec sa philosophie, appelant par exemple à l’indignation ou au matérialisme alors que tout l’Ethique invite à se libérer de telles illusions ».
En toute humilité, je fais partie de cette vague d’enthousiasme populaire, composée de néophytes donc, à propos d’un philosophe qui est sans doute le plus difficile à lire et à comprendre.
Car lire Spinoza « pour lire Spinoza » est quasi-impossible.
J’ai fait l’effort d’acheter l’une des plus belles traductions de l’Ethique, celle de Robert Misrahi (1). J’ai avancé, non sans mal, dans les méandres de son introduction générale et lorsque je suis arrivée enfin à la première page de Spinoza « De Dieu » qui démarre par des définitions, des explications, des axiomes, des propositions, des démonstrations, des scolies…Là j’avoue qu’il m’a été difficile d’aller plus loin.
Car la forme « mathématique », plus précisément « géométrique » de l’Ethique est dure, très dure à s’approprier.
Les tournures de phrases aussi sont difficilement accessibles en raison d’un vocabulaire abscons : substance infinie, attributs, modes, cause de soi….
Heureusement et je dis merci à tous les pédagogues d’avoir persévéré pendant des années dans sa lecture pour nous permettre d’accéder plus facilement à ce que Spinoza a bien voulu nous transmettre.
Alors j’écris ces lignes, non pas « pour avoir l’air cultivé ou même « pénétrée » par cette grande pensée » mais en raison de la joie « active » que me procure cet exercice et aussi pour l’envie de partager avec d’autres néophytes ce que j’ai compris de Spinoza.
Pourquoi ce philosophe me touche tant ?
Avant de répondre à cette question, je vais plutôt commencer par celle-là : quelle fut donc ma première rencontre avec Spinoza ?
C’était il y a quelques années. Une amie avait écrit un livre sur l’approche des philosophes à travers leur signe astrologique (« Descartes n’était pas vierge »(2) de Marjorie Poeydomenge). Très intriguée par cette approche originale de la philosophie, je me suis vite demandée quel penseur pouvait bien être sagittaire comme moi (le plus beau signe du zodiac bien sûr et le plus joyeux !)…Et ce fut Spinoza !
Il est né un 24 novembre…et moi un 23 novembre…C’est sans doute d’une futilité confondante pour certains…Pour d’autres peut-être pas. En tout cas pour Marjorie Poeydomenge, certainement pas.
Que dit-elle sur la rationalité de sa démarche ? Je la cite : « j’ai été très étonnée de l’influence de la philosophie grecque sur l’astrologie que nous utilisons aujourd’hui. Ainsi concernant l’opposition entre rationnel et irrationnel, si l’on respecte vraiment l’histoire des idées philosophiques, on devrait connaître (et admettre) le rôle de la philosophie grecque dans la rationalisation de l’astrologie et sa propagation. La philosophie grecque et l’astrologie n’étaient pas à l’époque en opposition. C’est la philosophie grecque qui a contribué à l’idée que l’astrologie pouvait être une « science ». Même les maîtres des mathématiques et de la géométrie comme Pythagore lui ont accordé du crédit et ont favorisé son essor. C’est également Empédocle avec sa théorie des 4 éléments (eau, terre, feu et air) qui a influencé les 4 éléments utilisés en astrologie, et notamment ceux utilisés dans la médecine d’Hippocrate. Mieux encore, c’est Philippe d’Oponte, un disciple de Platon, qui a associé les planètes avec les noms des dieux de la mythologie. Enfin, autre point que j’ai découvert et qui m’a surprise : c’est sous l’influence des stoïciens que les planètes sont devenues des divinités, car l’astrologie allait dans le sens de leur conception de la rigidité du destin. Comment alors prétendre que l’astrologie est à l’origine irrationnelle ? Elle n’est peut-être pas scientifique, mais elle peut être tout à fait rationnelle. »
Une première rencontre bien affective et pas complètement « irrationnelle » donc …
Mais mon « illumination » se produira un peu plus tard…Cela se fit en octobre 2017, il y a un an précisément, il y a un siècle, il y a une éternité…C’est à ce moment-là que j’ai vraiment découvert Spinoza et ce à travers des exégètes ou plutôt des « vulgarisateurs ». Je veux parler de Balthazar Thomass (Etre heureux avec Spinoza (3), de Frederic Lenoir (Le Miracle Spinoza (4) et de Bruno Giuliani (Le bonheur avec Spinoza – l’Ethique reformulée pour notre temps (5).
J’avoue que c’est la version de Giuliani qui m’a le plus touchée. C’est sa sensibilité et compréhension du grand maître qui résonnent le plus en moi.
Avant d’être « envahie » par la pensée de Spinoza, j’ai éprouvé d’abord de l’empathie pour l’homme en raison des épreuves qu’il a traversées. D’ailleurs tous les connaisseurs disent « l’aimer » et parle de lui en des termes affectueux.
Car Spinoza m’émeut oui, vraiment.
Pourquoi ? Parce que je pense que c’est lui qui a touché au plus près « la Vérité » ! La vérité sur quoi ? Et bien, sur l’origine du monde, d’où nous venons, où nous allons…Et surtout comment se sentir bien dans son corps et dans son esprit, simultanément bien sûr, pour ne pas « trahir » Spinoza.
Depuis que je suis toute petite une question m’assomme : après la Terre, les étoiles, les planètes, la galaxie, l’univers, les multivers, il y a quoi ? En effet la représentation de l’infini me donne le vertige ou alors m’étouffe.
Ma compréhension de Spinoza est très intuitive. D’ailleurs, c’est ce qu’il se préconise lui-même lorsqu’il entre dans l’entreprise de l’œuvre de sa vie qui durera 15 ans.
C’est ce qu’il appelle « la connaissance intuitive ». C’est ce qu’il nomme le troisième genre de connaissance. Ce sont les pensées qui viennent de l’intuition.
Selon Spinoza, « c’est la connaissance directe de l’essence d’une chose par l’usage de la seule intelligence, comme on le voit dans les mathématiques. Par exemple, une idée évidente comme la nature du cercle. La connaissance intuitive n’est composée que d’idées vraies. »
Et que dit-il lorsqu’il se lance dans l’écriture de l’Ethique ? Je le cite : « j’ai donc trouvé la bonne méthode pour progresser vers la vérité et la sagesse : je dois abandonner toutes mes anciennes croyances fondées sur la perception vague du monde et reconstruire toutes mes pensées en ne raisonnant qu’à partir de mes intuitions ».
Les épreuves qu’a traversées Baruck Spinoza (1632-1677), dit aussi Benedictus d'Espinosa ont été effroyablement rudes.
Enfant surdoué, il est issu de parents d’origine espagnole marrane. Ses grands-parents ont fui le Portugal lors de l’inquisition et se sont exilés à Amsterdam pour se protéger de l’antisémitisme.
Il s’intéresse très tôt à la religion dont il est issu, le judaïsme. Il entreprend même des études de rabbinisme. Il dévore tous les textes sacrés. Il les décortique. Il se révolte par leurs incohérences. Il ne comprend plus rien. Il se torture l’esprit. Il veut comprendre. Il recherche « la Vérité ». A 23 ans, il est excommunié. Il subit le « Herem ». C’est l’opprobre suprême dans la communauté juive. Il est coupé de tous ses liens affectifs. Il perd sa mère, un frère et une sœur. Ils meurent tous de la tuberculose. Un mal qui finira par le ronger lui-même. Son père fait faillite. Spinoza perd tout. Il se retrouve dans un « péril extrême » comme il le dit lui-même.
Mais au fond de lui, une force intérieure, le pousse à rentrer en résilience. Et que se dit-il lorsqu’il est au fond du gouffre ? Je le cite : « N’existe-t-il pas une autre vie possible ? N’est-il pas possible de faire sans peine et sans délai ce qui peut nous donner le plus grand bonheur ? N’existe-t-il pas un bien véritablement supérieur, dont la possession et la transmission pourraient faire de chacun de nous des personnes totalement heureuses ? Si un tel bien existe, il est de la plus extrême importance de le trouver et d’en faire profiter l’humanité, et c’est pourquoi rien ne me semble plus nécessaire, utile et urgent que de m’y consacrer à présent avec toute la force de mon esprit. Je sens naître en moi un grand enthousiasme pour me lancer dans la recherche des biens véritables. »
Tout au long de son entreprise, il sera « habité » par la recherche d’un bien impérissable, d’une joie permanente que rien ne pourra lui enlever.
Pour rentrer dans « le système Spinoza », il y a plusieurs voies d’accès : on peut être attiré par sa quête du bonheur et de la liberté ou alors par sa compréhension des affects qui asservissent l’Homme mais aussi par sa métaphysique.
C’est son ontologie qui me fascine le plus. Et c’est d’ailleurs ce choix qu’a fait Spinoza pour dérouler son fil d’Ariane et proposer un raisonnement ascensionnel qui le mènera vers les cimes de la compréhension du monde et de la nature humaine.
Pour comprendre et donc ressentir l’immanence de la philosophie de Spinoza (la divinité est en nous) ou plus précisément le monisme (le corps et l’esprit ne font qu’un, Dieu est Nature, Dieu est la Vie, tout est Dieu) qui s’oppose radicalement au dualisme de Descartes (la transcendance, Dieu a créé le monde, l’âme et le corps sont bien distincts, l’esprit commande le corps), il me semble qu’il faut y être préparé par un vécu personnel.
Ce vécu personnel, je le nomme « Eveil », éveil de conscience ou éveil spirituel. Il s’agit à mon sens d’une spiritualité laïque, universelle, au-dessus de toutes les religions monothéistes.
C’est le constat que je fais à l’instant t.
C’est le moment de ma vie dans lequel je me situe.
C’est la raison pour laquelle cette « vraie » rencontre avec Spinoza est si bouleversante.
Cet homme, ce génie, a vécu au XVIIème siècle ce que je ressens maintenant ici au XXIème siècle.
Et cet homme a réussi à conceptualiser tout ce que je ressens au plus profond de mon être pour pouvoir vivre heureuse et atteindre la sagesse dans un monde devenu fou. Un monde devenu égotique et matérialiste. Un monde qui chemine vers l’avènement de l’intelligence artificielle. Un monde dont l’humanité est menacée. Un monde enchainé par ses passions mauvaises qui le rongent de l’intérieur.
Comme beaucoup, je suis révoltée par l’obscurantisme qui sévit sur la surface du globe.
J’ai moi-même vécu une épreuve pour avoir voulu dire la vérité à des hommes et des femmes englués dans leurs croyances et certitudes. Et j’en ai subi « l’opprobre méchante ». La philosophie de Spinoza m’a aidée à ce moment-là. Elle m’a même fait un bien fou. Elle m’a aidée à maitriser mes passions. Ils n’ont pas eu ma haine. La philosophie pratique de Spinoza est unique. Elle est grandiose. Elle doit être pratiquée par tous. C’est pourquoi je plaide pour une vulgarisation large de sa pensée.
Ne croyant absolument pas au libre arbitre, Spinoza nous donne cependant les clés pour nous libérer de notre servitude aux passions ou « affects » en faisant appel à la raison ou « esprit ». Par affect, il entend émotion et sentiment (j’y reviendrai plus précisément dans un autre article consacré aux neurosciences et à la biologie).
Il balaie le concept de la morale au sens religieux, le bien et le mal, pour le remplacer par celui du bon et du mauvais pour soi.
Il affirme que « le désir est l’essence de l’homme ». L’homme est par nature une puissance d’exister. Le spinozisme est un mouvement pour persévérer dans l’être, c’est-à-dire pour exister encore et encore plus. Cet effort, il le nomme le conatus. Et cette force provient d’un seul affect, la joie. Mais une joie active et non passive, c’est-à-dire dont la cause provient de l’intérieur de l’être et non de l’extérieur.
Il dit que « les affections du corps qui augmentent ou diminuent, aident ou contrarient la puissance d’agir du corps et en même temps les idées de ces affections ». Il s’agit bien là d’une réalité psycho-physique puisqu’on a une modification corporelle qui est jointe à une idée de cette modification.
L’affect implique toujours une corrélation entre ce qu’il se passe dans l’esprit et dans le corps et donc penser les affects, c’est penser l’homme dans son unité (6).
Selon Spinoza, tout le problème vient de la part plus ou moins active que nous prenons à nos affects.
Selon que nous sommes causes totales ou partielles de nos émotions, selon qu’elles reflètent l’impact des causes extérieures qui nous modifient.
Le problème pour Spinoza est l’affect triste (la vengeance, la haine, la jalousie, la détestation de soi…). Par cet affect, il entend l’ensemble des affects qui nous font passer d’une grande à une moins grande perfection ou à une moindre réalité c’est-à-dire des affects qui réduisent notre capacité d’agir.
Ce sont ces affects-là qui sont centraux dans la thérapeutique de Spinoza puisque ceux-ci nous empêchent de développer « le conatus », c’est-à-dire notre effort pour persévérer dans notre être. Ils freinent notre effort, ils nous réduisent de telle sorte que notre pouvoir d’agir se réduise comme une peau de chagrin.
Dans la cinquième partie de l’Ethique, il va mettre en place une suite de remèdes aux affects, cinq exactement(6) :
Connaitre la cause véritable de ses affects
Opérer une séparation par rapport à la cause extérieure qui nous affecte
Prendre en considération le temps et la temporalité
Diversifier notre vie affective pour contrebalancer l’affect triste
Modifier l’ordre d’enchainement de nos affects
Il nous dit que « nous sommes esclaves de nos images mentales – la connaissance du premier genre – et de faits nous restons dominés par « nos passions illusoires » (affects passifs) et tout particulièrement la peur qui nous maintient dans la servitude et la soumission sur le plan politique autant que spirituel. »
Selon Conraad Van Beuningen, les derniers mots de Spinoza auraient été : « J’ai servi Dieu selon les lumières qu’il m’a données. Je l’aurais servi autrement s’il m’en avait donné d’autres ».
Spinoza est donc d’une actualité brûlante et s’il suscite de l’engouement aujourd’hui, si nous désirons qu’il nous éclaire encore de ses lumières, ce n’est sûrement pas anodin ni un hasard dont il ne croyait pas du tout l’existence !
Ferial Furon
Bibliographie :
« L’Ethique » - Spinoza – Traduction et édition de Robert Misrahi – juillet 2017
« Descartes n’était pas vierge » - Marjorie Poeydomenge – juin 2011
« Être heureux avec Spinoza » - Balthasar Thomass – Editions Eyrolles – juillet 2016
« Le miracle Spinoza » - Frédéric Lenoir – Editions Fayard – novembre 2017
« Le Bonheur avec Spinoza – L’Ethique reformulée pour notre temps » - Bruno Guiliani - Editions Almora – septembre 2017
Conférence de Chantal Jacquet lors du 7ème Congrès Européen de l’AEPEA co-organisé avec la Ligue Bruxelloise Francophone pour la Santé Mentale à Bruxelles les 8 - 9 & 10 mai 2014
Cette introduction n’est pas de moi mais de Michel Juffé, philosophe et spécialiste de Spinoza. C’est par ce ton un tantinet dédaigneux que ce « grand connaisseur » du génie d’Amsterdam, déplore l’engouement populaire que suscite Spinoza aujourd’hui. Dans sa contribution parue sur le site i-philo, il distribue des bons points et des mauvais points sur les auteurs qui comme lui ont fait l’effort de transmettre la pensée révolutionnaire de Spinoza en les classant en « vrais amis », « vrai, faux ami » et « faux amis ».
Ma question est donc la suivante : pourquoi la vulgarisation de l’Ethique suscite tant de « passions » chez les connaisseurs comme si elle devait être protégée par une chasse gardée et réservée qu’à une élite intellectuelle ?
Une partie de la réponse pourrait se situer dans ce que dit Bruno Giuliani en avant-propos de son livre le « Bonheur avec Spinoza – l’Ethique reformulée pour notre temps » que j’ai lu d’une traite avec délectation : « combien au final, ont réellement saisi son intuition majeure, l’immanence de Dieu ? Même ceux qui se disent « spinozistes » adoptent généralement des positions incompatibles avec sa philosophie, appelant par exemple à l’indignation ou au matérialisme alors que tout l’Ethique invite à se libérer de telles illusions ».
En toute humilité, je fais partie de cette vague d’enthousiasme populaire, composée de néophytes donc, à propos d’un philosophe qui est sans doute le plus difficile à lire et à comprendre.
Car lire Spinoza « pour lire Spinoza » est quasi-impossible.
J’ai fait l’effort d’acheter l’une des plus belles traductions de l’Ethique, celle de Robert Misrahi (1). J’ai avancé, non sans mal, dans les méandres de son introduction générale et lorsque je suis arrivée enfin à la première page de Spinoza « De Dieu » qui démarre par des définitions, des explications, des axiomes, des propositions, des démonstrations, des scolies…Là j’avoue qu’il m’a été difficile d’aller plus loin.
Car la forme « mathématique », plus précisément « géométrique » de l’Ethique est dure, très dure à s’approprier.
Les tournures de phrases aussi sont difficilement accessibles en raison d’un vocabulaire abscons : substance infinie, attributs, modes, cause de soi….
Heureusement et je dis merci à tous les pédagogues d’avoir persévéré pendant des années dans sa lecture pour nous permettre d’accéder plus facilement à ce que Spinoza a bien voulu nous transmettre.
Alors j’écris ces lignes, non pas « pour avoir l’air cultivé ou même « pénétrée » par cette grande pensée » mais en raison de la joie « active » que me procure cet exercice et aussi pour l’envie de partager avec d’autres néophytes ce que j’ai compris de Spinoza.
Pourquoi ce philosophe me touche tant ?
Avant de répondre à cette question, je vais plutôt commencer par celle-là : quelle fut donc ma première rencontre avec Spinoza ?
C’était il y a quelques années. Une amie avait écrit un livre sur l’approche des philosophes à travers leur signe astrologique (« Descartes n’était pas vierge »(2) de Marjorie Poeydomenge). Très intriguée par cette approche originale de la philosophie, je me suis vite demandée quel penseur pouvait bien être sagittaire comme moi (le plus beau signe du zodiac bien sûr et le plus joyeux !)…Et ce fut Spinoza !
Il est né un 24 novembre…et moi un 23 novembre…C’est sans doute d’une futilité confondante pour certains…Pour d’autres peut-être pas. En tout cas pour Marjorie Poeydomenge, certainement pas.
Que dit-elle sur la rationalité de sa démarche ? Je la cite : « j’ai été très étonnée de l’influence de la philosophie grecque sur l’astrologie que nous utilisons aujourd’hui. Ainsi concernant l’opposition entre rationnel et irrationnel, si l’on respecte vraiment l’histoire des idées philosophiques, on devrait connaître (et admettre) le rôle de la philosophie grecque dans la rationalisation de l’astrologie et sa propagation. La philosophie grecque et l’astrologie n’étaient pas à l’époque en opposition. C’est la philosophie grecque qui a contribué à l’idée que l’astrologie pouvait être une « science ». Même les maîtres des mathématiques et de la géométrie comme Pythagore lui ont accordé du crédit et ont favorisé son essor. C’est également Empédocle avec sa théorie des 4 éléments (eau, terre, feu et air) qui a influencé les 4 éléments utilisés en astrologie, et notamment ceux utilisés dans la médecine d’Hippocrate. Mieux encore, c’est Philippe d’Oponte, un disciple de Platon, qui a associé les planètes avec les noms des dieux de la mythologie. Enfin, autre point que j’ai découvert et qui m’a surprise : c’est sous l’influence des stoïciens que les planètes sont devenues des divinités, car l’astrologie allait dans le sens de leur conception de la rigidité du destin. Comment alors prétendre que l’astrologie est à l’origine irrationnelle ? Elle n’est peut-être pas scientifique, mais elle peut être tout à fait rationnelle. »
Une première rencontre bien affective et pas complètement « irrationnelle » donc …
Mais mon « illumination » se produira un peu plus tard…Cela se fit en octobre 2017, il y a un an précisément, il y a un siècle, il y a une éternité…C’est à ce moment-là que j’ai vraiment découvert Spinoza et ce à travers des exégètes ou plutôt des « vulgarisateurs ». Je veux parler de Balthazar Thomass (Etre heureux avec Spinoza (3), de Frederic Lenoir (Le Miracle Spinoza (4) et de Bruno Giuliani (Le bonheur avec Spinoza – l’Ethique reformulée pour notre temps (5).
J’avoue que c’est la version de Giuliani qui m’a le plus touchée. C’est sa sensibilité et compréhension du grand maître qui résonnent le plus en moi.
Avant d’être « envahie » par la pensée de Spinoza, j’ai éprouvé d’abord de l’empathie pour l’homme en raison des épreuves qu’il a traversées. D’ailleurs tous les connaisseurs disent « l’aimer » et parle de lui en des termes affectueux.
Car Spinoza m’émeut oui, vraiment.
Pourquoi ? Parce que je pense que c’est lui qui a touché au plus près « la Vérité » ! La vérité sur quoi ? Et bien, sur l’origine du monde, d’où nous venons, où nous allons…Et surtout comment se sentir bien dans son corps et dans son esprit, simultanément bien sûr, pour ne pas « trahir » Spinoza.
Depuis que je suis toute petite une question m’assomme : après la Terre, les étoiles, les planètes, la galaxie, l’univers, les multivers, il y a quoi ? En effet la représentation de l’infini me donne le vertige ou alors m’étouffe.
Ma compréhension de Spinoza est très intuitive. D’ailleurs, c’est ce qu’il se préconise lui-même lorsqu’il entre dans l’entreprise de l’œuvre de sa vie qui durera 15 ans.
C’est ce qu’il appelle « la connaissance intuitive ». C’est ce qu’il nomme le troisième genre de connaissance. Ce sont les pensées qui viennent de l’intuition.
Selon Spinoza, « c’est la connaissance directe de l’essence d’une chose par l’usage de la seule intelligence, comme on le voit dans les mathématiques. Par exemple, une idée évidente comme la nature du cercle. La connaissance intuitive n’est composée que d’idées vraies. »
Et que dit-il lorsqu’il se lance dans l’écriture de l’Ethique ? Je le cite : « j’ai donc trouvé la bonne méthode pour progresser vers la vérité et la sagesse : je dois abandonner toutes mes anciennes croyances fondées sur la perception vague du monde et reconstruire toutes mes pensées en ne raisonnant qu’à partir de mes intuitions ».
Les épreuves qu’a traversées Baruck Spinoza (1632-1677), dit aussi Benedictus d'Espinosa ont été effroyablement rudes.
Enfant surdoué, il est issu de parents d’origine espagnole marrane. Ses grands-parents ont fui le Portugal lors de l’inquisition et se sont exilés à Amsterdam pour se protéger de l’antisémitisme.
Il s’intéresse très tôt à la religion dont il est issu, le judaïsme. Il entreprend même des études de rabbinisme. Il dévore tous les textes sacrés. Il les décortique. Il se révolte par leurs incohérences. Il ne comprend plus rien. Il se torture l’esprit. Il veut comprendre. Il recherche « la Vérité ». A 23 ans, il est excommunié. Il subit le « Herem ». C’est l’opprobre suprême dans la communauté juive. Il est coupé de tous ses liens affectifs. Il perd sa mère, un frère et une sœur. Ils meurent tous de la tuberculose. Un mal qui finira par le ronger lui-même. Son père fait faillite. Spinoza perd tout. Il se retrouve dans un « péril extrême » comme il le dit lui-même.
Mais au fond de lui, une force intérieure, le pousse à rentrer en résilience. Et que se dit-il lorsqu’il est au fond du gouffre ? Je le cite : « N’existe-t-il pas une autre vie possible ? N’est-il pas possible de faire sans peine et sans délai ce qui peut nous donner le plus grand bonheur ? N’existe-t-il pas un bien véritablement supérieur, dont la possession et la transmission pourraient faire de chacun de nous des personnes totalement heureuses ? Si un tel bien existe, il est de la plus extrême importance de le trouver et d’en faire profiter l’humanité, et c’est pourquoi rien ne me semble plus nécessaire, utile et urgent que de m’y consacrer à présent avec toute la force de mon esprit. Je sens naître en moi un grand enthousiasme pour me lancer dans la recherche des biens véritables. »
Tout au long de son entreprise, il sera « habité » par la recherche d’un bien impérissable, d’une joie permanente que rien ne pourra lui enlever.
Pour rentrer dans « le système Spinoza », il y a plusieurs voies d’accès : on peut être attiré par sa quête du bonheur et de la liberté ou alors par sa compréhension des affects qui asservissent l’Homme mais aussi par sa métaphysique.
C’est son ontologie qui me fascine le plus. Et c’est d’ailleurs ce choix qu’a fait Spinoza pour dérouler son fil d’Ariane et proposer un raisonnement ascensionnel qui le mènera vers les cimes de la compréhension du monde et de la nature humaine.
Pour comprendre et donc ressentir l’immanence de la philosophie de Spinoza (la divinité est en nous) ou plus précisément le monisme (le corps et l’esprit ne font qu’un, Dieu est Nature, Dieu est la Vie, tout est Dieu) qui s’oppose radicalement au dualisme de Descartes (la transcendance, Dieu a créé le monde, l’âme et le corps sont bien distincts, l’esprit commande le corps), il me semble qu’il faut y être préparé par un vécu personnel.
Ce vécu personnel, je le nomme « Eveil », éveil de conscience ou éveil spirituel. Il s’agit à mon sens d’une spiritualité laïque, universelle, au-dessus de toutes les religions monothéistes.
C’est le constat que je fais à l’instant t.
C’est le moment de ma vie dans lequel je me situe.
C’est la raison pour laquelle cette « vraie » rencontre avec Spinoza est si bouleversante.
Cet homme, ce génie, a vécu au XVIIème siècle ce que je ressens maintenant ici au XXIème siècle.
Et cet homme a réussi à conceptualiser tout ce que je ressens au plus profond de mon être pour pouvoir vivre heureuse et atteindre la sagesse dans un monde devenu fou. Un monde devenu égotique et matérialiste. Un monde qui chemine vers l’avènement de l’intelligence artificielle. Un monde dont l’humanité est menacée. Un monde enchainé par ses passions mauvaises qui le rongent de l’intérieur.
Comme beaucoup, je suis révoltée par l’obscurantisme qui sévit sur la surface du globe.
J’ai moi-même vécu une épreuve pour avoir voulu dire la vérité à des hommes et des femmes englués dans leurs croyances et certitudes. Et j’en ai subi « l’opprobre méchante ». La philosophie de Spinoza m’a aidée à ce moment-là. Elle m’a même fait un bien fou. Elle m’a aidée à maitriser mes passions. Ils n’ont pas eu ma haine. La philosophie pratique de Spinoza est unique. Elle est grandiose. Elle doit être pratiquée par tous. C’est pourquoi je plaide pour une vulgarisation large de sa pensée.
Ne croyant absolument pas au libre arbitre, Spinoza nous donne cependant les clés pour nous libérer de notre servitude aux passions ou « affects » en faisant appel à la raison ou « esprit ». Par affect, il entend émotion et sentiment (j’y reviendrai plus précisément dans un autre article consacré aux neurosciences et à la biologie).
Il balaie le concept de la morale au sens religieux, le bien et le mal, pour le remplacer par celui du bon et du mauvais pour soi.
Il affirme que « le désir est l’essence de l’homme ». L’homme est par nature une puissance d’exister. Le spinozisme est un mouvement pour persévérer dans l’être, c’est-à-dire pour exister encore et encore plus. Cet effort, il le nomme le conatus. Et cette force provient d’un seul affect, la joie. Mais une joie active et non passive, c’est-à-dire dont la cause provient de l’intérieur de l’être et non de l’extérieur.
Il dit que « les affections du corps qui augmentent ou diminuent, aident ou contrarient la puissance d’agir du corps et en même temps les idées de ces affections ». Il s’agit bien là d’une réalité psycho-physique puisqu’on a une modification corporelle qui est jointe à une idée de cette modification.
L’affect implique toujours une corrélation entre ce qu’il se passe dans l’esprit et dans le corps et donc penser les affects, c’est penser l’homme dans son unité (6).
Selon Spinoza, tout le problème vient de la part plus ou moins active que nous prenons à nos affects.
Selon que nous sommes causes totales ou partielles de nos émotions, selon qu’elles reflètent l’impact des causes extérieures qui nous modifient.
Le problème pour Spinoza est l’affect triste (la vengeance, la haine, la jalousie, la détestation de soi…). Par cet affect, il entend l’ensemble des affects qui nous font passer d’une grande à une moins grande perfection ou à une moindre réalité c’est-à-dire des affects qui réduisent notre capacité d’agir.
Ce sont ces affects-là qui sont centraux dans la thérapeutique de Spinoza puisque ceux-ci nous empêchent de développer « le conatus », c’est-à-dire notre effort pour persévérer dans notre être. Ils freinent notre effort, ils nous réduisent de telle sorte que notre pouvoir d’agir se réduise comme une peau de chagrin.
Dans la cinquième partie de l’Ethique, il va mettre en place une suite de remèdes aux affects, cinq exactement(6) :
Connaitre la cause véritable de ses affects
Opérer une séparation par rapport à la cause extérieure qui nous affecte
Prendre en considération le temps et la temporalité
Diversifier notre vie affective pour contrebalancer l’affect triste
Modifier l’ordre d’enchainement de nos affects
Il nous dit que « nous sommes esclaves de nos images mentales – la connaissance du premier genre – et de faits nous restons dominés par « nos passions illusoires » (affects passifs) et tout particulièrement la peur qui nous maintient dans la servitude et la soumission sur le plan politique autant que spirituel. »
Selon Conraad Van Beuningen, les derniers mots de Spinoza auraient été : « J’ai servi Dieu selon les lumières qu’il m’a données. Je l’aurais servi autrement s’il m’en avait donné d’autres ».
Spinoza est donc d’une actualité brûlante et s’il suscite de l’engouement aujourd’hui, si nous désirons qu’il nous éclaire encore de ses lumières, ce n’est sûrement pas anodin ni un hasard dont il ne croyait pas du tout l’existence !
Ferial Furon
Bibliographie :
« L’Ethique » - Spinoza – Traduction et édition de Robert Misrahi – juillet 2017
« Descartes n’était pas vierge » - Marjorie Poeydomenge – juin 2011
« Être heureux avec Spinoza » - Balthasar Thomass – Editions Eyrolles – juillet 2016
« Le miracle Spinoza » - Frédéric Lenoir – Editions Fayard – novembre 2017
« Le Bonheur avec Spinoza – L’Ethique reformulée pour notre temps » - Bruno Guiliani - Editions Almora – septembre 2017
Conférence de Chantal Jacquet lors du 7ème Congrès Européen de l’AEPEA co-organisé avec la Ligue Bruxelloise Francophone pour la Santé Mentale à Bruxelles les 8 - 9 & 10 mai 2014
PHIL-ANALYSE
Mardi 16 Janvier 2018
Lorsque Twitter s’est mis en guerre contre les abus sexuels avec le Hashtag BalanceTonPorc et metoo, j’ai observé ce phénomène d’un œil interrogateur et méfiant. Car l’impulsivité des réseaux sociaux m’effraie. Les informations non vérifiées par des experts sont un fléau inquiétant. Et surtout, j’attache une importance fondamentale au respect de la présomption d’innocence. Une vie peut être certes détruite par une agression sexuelle, mais aussi pas une affreuse calomnie. Par ailleurs, quelle est la définition d’un porc ? D’après le Larousse, il s’agit au sens familier d’un homme glouton, sale et grossier… Une définition bien large et subjective pour des faits graves et sérieux que sont le viol et le harcèlement sexuel. Quant au mammifère qu’est le porc, ce pauvre animal n’a rien demandé lui…
Alors, que faut-il penser de ce phénomène ? Renforce-t-il la confiance des femmes pour libérer la parole ? Tout en aggravant les relations hommes/femmes, avec une image fort dégradante de la gente masculine ? Faut-il y voir un nouveau féminisme importé des Etats-Unis ou le symptôme plus grave d’une dégradation des relations hommes/femmes ?
Bien avant le Hashtag « Balance ton porc », Nafissatou Diallo en avait déjà balancé un : DSK en 2011. Ce phénomène politico-porcin que Marcela Iacub a d’ailleurs très bien décrit dans son livre Belle et bête. La dénonciation de ce type de comportement déviant, qui consiste à abuser de son pouvoir pour des faveurs sexuelles, n’est vraiment pas une nouveauté. Ce qui est nouveau est la banalisation de cette dénonciation sur la place publique sans aucun filtre. Twitter ne peut pas être le tribunal des agressions sexuelles. Et méfions-nous des élans insufflés par le ressentiment. Car le terme porc ne peut favoriser que des affects haineux.
Reconnaissons néanmoins que sur des sujets tabous comme le viol, les victimes se sentent rarement à l’aise pour se confier et déposer une plainte. La vertu de cette hargne de Balance ton porc est au moins de casser ce tabou. Un dépôt de plainte n’est pas facile à vivre, surtout s’il s’agit de dénoncer un proche. Peut-être faudrait-il inventer des nouvelles procédures judiciaires pour libérer la parole et faire en sorte que les victimes ne se sentent pas encore victimes une deuxième fois, d’être jugée par un policier ou d’avoir été prise de haut par la Justice. D’ailleurs, les femmes ne sont pas les seules concernées par les violences sexuelles, les hommes peuvent en être victimes et surtout les enfants. D’ailleurs, comment réagiraient les femmes si les hommes créent le hashtag « balancetaporcine » …
Si le viol et les agressions physiques sont inéluctablement des actes punissables par la loi, que penser alors du harcèlement de rue ? Personnellement, même s’il ne faut pas mépriser le pouvoir des mots, une parole ne porte pas atteinte à l’intégrité du corps. Le risque de vouloir sanctionner tout comportement grossier dans la rue est de codifier à l’extrême les comportements des hommes et des femmes, et de sombrer dans une rigidité des comportements. Par ailleurs, ce qui a été reproché au phénomène Metoo est de trop victimiser les femmes. Et surtout de réduire la femme à un seul type de femme. Non, toutes les femmes ne se sentent pas fragiles face à quelques paroles grossières, elles savent même y répondre avec pertinence et élégance. La liberté consiste à choisir sa féminité, comme les hommes ne sont pas obligés d’être tous des porcs. Les caricatures nous empêchent de réfléchir et de prendre du recul.
Dans la tribune qui a pris le contrepied du bouclier anti-porc, tribune au demeurant contestable sur de nombreux points, il faut y voir une réaction à cet excès de codification des comportements. A qui revient-il de qualifier qu’un comportement est acceptable, pas acceptable ? Qui en fixe les limites ? Nous avons déjà le droit. Est-il bien fait ? On peut certes l’améliorer… Dans tous les cas, il est établi dans une société démocratique (ce qui est déjà une bonne chose et malheureusement de nombreuses femmes n’ont pas encore cette chance). Entre un homme qui dit élégamment « vous êtes une jolie femme » et celui qui siffle et vocifère dans la rue « quel joli cul », on se doute que le premier a plus de chances de déclencher un dialogue que le deuxième. Mais faut-il pour autant attacher de l’importance au langage grossier du deuxième ? C’est un pauvre type, certes. Cependant, il y a de nombreuses situations de la vie quotidienne où l’on se dit dans sa tête mais quel pauvre type ou aussi quelle « pouf » pour les femmes… Les hommes intelligents ont compris depuis longtemps que les femmes étaient plus sensibles aux jolis mots. Ils ont d’ailleurs inventé des siècles auparavant l’amour courtois. Cette ritualisation du jeu amoureux inspiré de l’esprit chevaleresque, séduire une femme sans l’offenser… Peut-être que cette dénonciation du langage grossier cache encore le désir inconscient des femmes d’être traité comme des princesses.
D’ailleurs, même la tribune sur le droit d’être importuner n’enfermerait-elle pas la femme dans une attitude passive ? Attendre que l’on vienne la chercher ? Pourquoi ne pourrait-elle pas elle-même importuner ? Dans le Deuxième sexe, Simone de Beauvoir dénonce cette passivité féminine : « Les refrains populaires lui insufflent des rêves de patience et d’espoir » ». Il faut alors interroger l’inconscient collectif des femmes. Est-ce que nous sommes toujours des petites filles qui attendons le prince charmant ou en 2018, notre nature nous pousserait-elle enfin à avoir une âme plus belliqueuse et aller chasser l’homme qu’il nous faut ?
Quand on lit les commentaires sur le harcèlement de rue, nous ne sentons finalement pas si éloignés de ce que décrivait déjà à l’époque Simone de Beauvoir : "Sans doute aujourd'hui, la jeune fille sort seule et peut flâner aux Tuileries; mais j'ai déjà dit combien la rue lui est hostile: partout des yeux, des mains qui guettent; qu'elle vagabonde à l'étourdie, les pensées au vent, qu'elle allume une cigarette à la terrasse d'un café, qu'elle aille seule au cinéma, un incident désagréable a vite fait de se produire ».
Ce qui est certain est que l’égalité économique et sociale entre les hommes et les femmes est loin d’être acquise, les femmes dirigeantes sont encore peu nombreuses. La sexualité est aussi un jeu de pouvoirs. Tant que la femme n’aura pas le même statut social que l’homme, la liberté sexuelle ne peut jouer de façon égalitaire entre les deux sexes.
Par conséquent, pour reprendre une expression d’Elisabeth Badinter, vouloir codifier à l’extrême les relations hommes et femmes est une « fausse route » du féminisme. Et non, les femmes ne sont pas une population fragile à protéger par des quotas (en témoigne encore la dernière loi islandaise d’imposer l’égalité des salaires entre hommes et femmes). Nous avons simplement besoin d’avoir les mêmes droits et de conquérir des nouveaux territoires pour avoir le même pouvoir que les hommes. Pour cela, il est aussi important de mettre en avant les femmes qui réussissent, de développer un esprit positif et de ne pas se contenter d’être dans une position victimaire.
Les problèmes de communication entre hommes et femmes persistent. Notons aussi que les applis de rencontres et les réseaux sociaux qui favorisent l’immédiateté ont tendance à chosifier les femmes, mais aussi les hommes. Ce qui dévalorise les rapports humains et les complexifie, en les rendant inauthentiques.
L’amour reste l’histoire de belles rencontres. Mais pour cela, il faut une dose de liberté, de naïveté, de poésie et de hasard. Laissons la grossièreté aux gens sans imagination et l’excès de codification des comportements aux perfectionnistes de la maîtrise.
Etre une femme, c’est aussi savoir lâcher prise.
Reconnaissons néanmoins que sur des sujets tabous comme le viol, les victimes se sentent rarement à l’aise pour se confier et déposer une plainte. La vertu de cette hargne de Balance ton porc est au moins de casser ce tabou. Un dépôt de plainte n’est pas facile à vivre, surtout s’il s’agit de dénoncer un proche. Peut-être faudrait-il inventer des nouvelles procédures judiciaires pour libérer la parole et faire en sorte que les victimes ne se sentent pas encore victimes une deuxième fois, d’être jugée par un policier ou d’avoir été prise de haut par la Justice. D’ailleurs, les femmes ne sont pas les seules concernées par les violences sexuelles, les hommes peuvent en être victimes et surtout les enfants. D’ailleurs, comment réagiraient les femmes si les hommes créent le hashtag « balancetaporcine » …
Si le viol et les agressions physiques sont inéluctablement des actes punissables par la loi, que penser alors du harcèlement de rue ? Personnellement, même s’il ne faut pas mépriser le pouvoir des mots, une parole ne porte pas atteinte à l’intégrité du corps. Le risque de vouloir sanctionner tout comportement grossier dans la rue est de codifier à l’extrême les comportements des hommes et des femmes, et de sombrer dans une rigidité des comportements. Par ailleurs, ce qui a été reproché au phénomène Metoo est de trop victimiser les femmes. Et surtout de réduire la femme à un seul type de femme. Non, toutes les femmes ne se sentent pas fragiles face à quelques paroles grossières, elles savent même y répondre avec pertinence et élégance. La liberté consiste à choisir sa féminité, comme les hommes ne sont pas obligés d’être tous des porcs. Les caricatures nous empêchent de réfléchir et de prendre du recul.
Dans la tribune qui a pris le contrepied du bouclier anti-porc, tribune au demeurant contestable sur de nombreux points, il faut y voir une réaction à cet excès de codification des comportements. A qui revient-il de qualifier qu’un comportement est acceptable, pas acceptable ? Qui en fixe les limites ? Nous avons déjà le droit. Est-il bien fait ? On peut certes l’améliorer… Dans tous les cas, il est établi dans une société démocratique (ce qui est déjà une bonne chose et malheureusement de nombreuses femmes n’ont pas encore cette chance). Entre un homme qui dit élégamment « vous êtes une jolie femme » et celui qui siffle et vocifère dans la rue « quel joli cul », on se doute que le premier a plus de chances de déclencher un dialogue que le deuxième. Mais faut-il pour autant attacher de l’importance au langage grossier du deuxième ? C’est un pauvre type, certes. Cependant, il y a de nombreuses situations de la vie quotidienne où l’on se dit dans sa tête mais quel pauvre type ou aussi quelle « pouf » pour les femmes… Les hommes intelligents ont compris depuis longtemps que les femmes étaient plus sensibles aux jolis mots. Ils ont d’ailleurs inventé des siècles auparavant l’amour courtois. Cette ritualisation du jeu amoureux inspiré de l’esprit chevaleresque, séduire une femme sans l’offenser… Peut-être que cette dénonciation du langage grossier cache encore le désir inconscient des femmes d’être traité comme des princesses.
D’ailleurs, même la tribune sur le droit d’être importuner n’enfermerait-elle pas la femme dans une attitude passive ? Attendre que l’on vienne la chercher ? Pourquoi ne pourrait-elle pas elle-même importuner ? Dans le Deuxième sexe, Simone de Beauvoir dénonce cette passivité féminine : « Les refrains populaires lui insufflent des rêves de patience et d’espoir » ». Il faut alors interroger l’inconscient collectif des femmes. Est-ce que nous sommes toujours des petites filles qui attendons le prince charmant ou en 2018, notre nature nous pousserait-elle enfin à avoir une âme plus belliqueuse et aller chasser l’homme qu’il nous faut ?
Quand on lit les commentaires sur le harcèlement de rue, nous ne sentons finalement pas si éloignés de ce que décrivait déjà à l’époque Simone de Beauvoir : "Sans doute aujourd'hui, la jeune fille sort seule et peut flâner aux Tuileries; mais j'ai déjà dit combien la rue lui est hostile: partout des yeux, des mains qui guettent; qu'elle vagabonde à l'étourdie, les pensées au vent, qu'elle allume une cigarette à la terrasse d'un café, qu'elle aille seule au cinéma, un incident désagréable a vite fait de se produire ».
Ce qui est certain est que l’égalité économique et sociale entre les hommes et les femmes est loin d’être acquise, les femmes dirigeantes sont encore peu nombreuses. La sexualité est aussi un jeu de pouvoirs. Tant que la femme n’aura pas le même statut social que l’homme, la liberté sexuelle ne peut jouer de façon égalitaire entre les deux sexes.
Par conséquent, pour reprendre une expression d’Elisabeth Badinter, vouloir codifier à l’extrême les relations hommes et femmes est une « fausse route » du féminisme. Et non, les femmes ne sont pas une population fragile à protéger par des quotas (en témoigne encore la dernière loi islandaise d’imposer l’égalité des salaires entre hommes et femmes). Nous avons simplement besoin d’avoir les mêmes droits et de conquérir des nouveaux territoires pour avoir le même pouvoir que les hommes. Pour cela, il est aussi important de mettre en avant les femmes qui réussissent, de développer un esprit positif et de ne pas se contenter d’être dans une position victimaire.
Les problèmes de communication entre hommes et femmes persistent. Notons aussi que les applis de rencontres et les réseaux sociaux qui favorisent l’immédiateté ont tendance à chosifier les femmes, mais aussi les hommes. Ce qui dévalorise les rapports humains et les complexifie, en les rendant inauthentiques.
L’amour reste l’histoire de belles rencontres. Mais pour cela, il faut une dose de liberté, de naïveté, de poésie et de hasard. Laissons la grossièreté aux gens sans imagination et l’excès de codification des comportements aux perfectionnistes de la maîtrise.
Etre une femme, c’est aussi savoir lâcher prise.
PHIL-ANALYSE
Dimanche 18 Juillet 2010
Le dossier « Qu’est-ce qu’être beau » de Philosophie Magazine ne pouvait passer inaperçu aux prémices de l’été. C’est une vraie question, tant nous sommes canardés d’injonctions de minceur, de jeunesse, de seins pulpeux… Nous nageons en plein conformisme esthétique, alors que notre société regorge d’individualisme, n’est-ce pas en définitive complètement paradoxal ?
Le débat entre Pascal Bruckner et Elsa Zylberstein tend vers le même constat : la beauté plastique n’est pas forcément synonyme de beauté, car la beauté ne se résume pas à l’harmonie, « laquelle risque de paraître fade ». Comme le fait remarquer également l’actrice, « la chirurgie esthétique produit une norme, des physique en série qu’on reconnaît tout de suite et qui finissent par paraître « monstrueux » ». Il ne faut pas non plus confondre le « sexy » avec la « beauté », qui est plus froide et moins accessible. Ainsi, n’en déplaise à Alexandre Lacroix qui explique dans son édito que la beauté pour lui, serait plutôt synonyme de perfection et d’absence totale de défauts (d’ailleurs, une conception un peu sage pour un ancien Nietzschéen…), mais les anomalies, les défauts peuvent être parfois des atouts pour révéler la beauté. Comme le souligne Pascal Bruckner « la ligne de partage entre le beau et le laid est devenue incroyablement incertaine, brouillée… Les cernes, la mauvaise mine, les rides, surtout pour les hommes, peuvent être des atouts (…). La beauté nous demande désormais d’être actifs ».
Autre question que soulève l’article de Gwenaëlle Aubry (p. 49 du même numéro), la laideur active peut être plus belle que la beauté figée… L’auteur donne l’exemple de Socrate et Gainsbourg, qui séduisent par leur vitalité et leur mouvement. Comme disait Plotin, « Un homme laid, s’il est vivant, sera toujours plus beau que la plus belle des statues ». Certes, la vie sera toujours plus belle que la mort… Car poussée à l’extrême, la beauté parfaite n’est ni plus ni moins que la négation de la vie. Refuser de vieillir, c’est tout simplement refuser le temps et ses effets. Or la vie sans le temps, est-ce toujours la vie ? Vouloir figer ses traits, n’est-ce pas une façon de nier une partie de soi ?
Bref, vous me direz que tout cela est bien beau comme discours, mais pas très pragmatique et surtout peu réaliste, car les « beaux » réussissent mieux que les « laids » dans la vie. Et qu’il faut être plus talentueux quand on est laid… Alors faut-il rejeter vraiment la beauté plastique ? Ainsi que la chirurgie esthétique pour corriger les inégalités naturelles ? Ok, ok… Mais les canons de beauté n’ont pas toujours été les mêmes selon les époques. Ainsi, il serait temps d’accepter une part de polythéisme dans nos critères esthétiques ! D’ailleurs même les magazines de mode font le même constat. Pardonnez-moi par exemple d’avoir lu Grazia :-) et d’avoir déniché un article intéressant sur la mode : « l’éthique au secours du chic » d’Adrienne Ribes-Tiphaine, qui s’indigne contre le porno chic et la mode facile « Overdose de seins dévoilés et de fesses affichées », « trop de platform shoes d’épaules agressives, de lolitas lascives ». « Tant de ressources, de résonances, d’idées cachées sous les poncifs imposés par le fric et le conformisme. Adieu les idéologues, voici le temps des archéologues du présent, connaisseurs du passé, passionnés d’avenir. Il y a de l’être au-delà du paraître, cela aurait pu faire un sujet au bac » ! Comme quoi, la mode et la philosophie peuvent parfois se rejoindre.
Retenons donc le message : Vivent les archéologues du passé et du futur ! Vivent le temps et le rythme !
Il y a donc de l’être au-delà du paraître, une phrase à méditer sur le sable chaud où s’étirent des corps dénudés désireux de rejoindre le conformisme du ton hâlé…
Pour en savoir plus :
- Philosophie Magazine n°40, juin 2010
- Grazia du 16-22 juillet 2010 (p. 62)
Autre question que soulève l’article de Gwenaëlle Aubry (p. 49 du même numéro), la laideur active peut être plus belle que la beauté figée… L’auteur donne l’exemple de Socrate et Gainsbourg, qui séduisent par leur vitalité et leur mouvement. Comme disait Plotin, « Un homme laid, s’il est vivant, sera toujours plus beau que la plus belle des statues ». Certes, la vie sera toujours plus belle que la mort… Car poussée à l’extrême, la beauté parfaite n’est ni plus ni moins que la négation de la vie. Refuser de vieillir, c’est tout simplement refuser le temps et ses effets. Or la vie sans le temps, est-ce toujours la vie ? Vouloir figer ses traits, n’est-ce pas une façon de nier une partie de soi ?
Bref, vous me direz que tout cela est bien beau comme discours, mais pas très pragmatique et surtout peu réaliste, car les « beaux » réussissent mieux que les « laids » dans la vie. Et qu’il faut être plus talentueux quand on est laid… Alors faut-il rejeter vraiment la beauté plastique ? Ainsi que la chirurgie esthétique pour corriger les inégalités naturelles ? Ok, ok… Mais les canons de beauté n’ont pas toujours été les mêmes selon les époques. Ainsi, il serait temps d’accepter une part de polythéisme dans nos critères esthétiques ! D’ailleurs même les magazines de mode font le même constat. Pardonnez-moi par exemple d’avoir lu Grazia :-) et d’avoir déniché un article intéressant sur la mode : « l’éthique au secours du chic » d’Adrienne Ribes-Tiphaine, qui s’indigne contre le porno chic et la mode facile « Overdose de seins dévoilés et de fesses affichées », « trop de platform shoes d’épaules agressives, de lolitas lascives ». « Tant de ressources, de résonances, d’idées cachées sous les poncifs imposés par le fric et le conformisme. Adieu les idéologues, voici le temps des archéologues du présent, connaisseurs du passé, passionnés d’avenir. Il y a de l’être au-delà du paraître, cela aurait pu faire un sujet au bac » ! Comme quoi, la mode et la philosophie peuvent parfois se rejoindre.
Retenons donc le message : Vivent les archéologues du passé et du futur ! Vivent le temps et le rythme !
Il y a donc de l’être au-delà du paraître, une phrase à méditer sur le sable chaud où s’étirent des corps dénudés désireux de rejoindre le conformisme du ton hâlé…
Pour en savoir plus :
- Philosophie Magazine n°40, juin 2010
- Grazia du 16-22 juillet 2010 (p. 62)
PHIL-ANALYSE
Dimanche 26 Avril 2009En mars dernier, Philosophie Magazine a consacré un dossier sur "Pourquoi fait-on des enfants ?". Question que l'on se pose rarement, tellement l'enfantement paraît naturel et un acte altruiste. Il est souvent la suite logique du couple, le résultat de pulsions chimiques, de l'amour ou du poids des traditions et de la société … Il peut même arriver par accident. Devoir ou plaisir, les individus s'interrogent donc rarement sur la cause de leur reproduction. Mais, les philosophes, pour ne pas faillir à leur fidèle réputation de "prise de tête", eux s'interrogent !
Le plus célèbre antinataliste reste le nihiliste Schopenhauer dont la citation, "L'ascète sauve de la vie des générations entières; les femmes ne l'ont pas voulu; c'est pourquoi je les hais" ne peut plus être ignorée. Enfanter reviendrait-il à reproduire le mal et la souffrance ? C'est ce que pensait Schopenhauer et continuent à fredonner certains de ces disciples comme Rolland Jaccard qui a sciemment renoncé à la paternité : "donner la vie m'est clairement apparu comme un acte mauvais, voire criminel".
Nancy Huston, une adepte de la maternité, estime que l'absence d'enfantement de la plupart des philosophes a eu "un effet dramatique sur la pensée occidentale". En effet, ne faut-il pas s'inquiéter que la plupart des philosophes occidentaux n'aient pas souhaité donner la vie ? Quelle conception avaient-ils réellement de l'existence ? Ressentaient-ils du dégoût ? Ou doit-on en déduire que trop philosopher éloigne de l'existence… Dans tous les cas, refuser d'enfanter témoigne davantage d'une vision pessimiste de l'existence que de grands élans optimistes. Mais le refus de se reproduire, c'est aussi accepter l'idée qu'il y ait une fin. Ce qui est rarement facile à admettre.
La plupart de ceux qui défendent le non enfantement le feraient pour des raisons éthiques : refuser de donner la naissance à un être qui ne connaîtrait que douleurs et misères ; autrement dit, pour éviter que le "mal" ne se reproduise. Selon eux, le monde est trop cruel, anti-écologique, égoïste, sans avenir. Mais, leur raisonnement est résolument fataliste. Le propre de l'homme n'est-il pas de créer et d'essayer de changer le cours de l'histoire ? C'est aussi oublier toutes les joies que procure la vie. N'est-ce pas au fond un acte égoïste, dans la mesure où c'est à chaque être de déterminer si la vie vaut la peine d'être vécue. Aurions-nous aimé que nos parents décident à notre place ?
A la rectitude fataliste des nihilistes, préférons le témoignage frais et spontané de Nancy Huston, qui écrivain avant d'être mère, craignait que le fait d'avoir des enfants gênerait son inspiration artistique. "Au fond, le roman est amoral, tandis que la vie de famille est morale – là est la contradiction". Mais, elle a dépassé largement cette contradiction. La maternité lui a au contraire apporté des nouvelles inspirations. Morale de l'histoire, il ne faut jamais avoir peur de ses contradictions, ce sont elles qui nous font avancer…
Samedi dernier, j'ai assisté à une conférence débat entre Luc Ferry et André Comte-Sponville, qui portait sur le thème de l'universalité. Deux interventions assurément de qualité, mais qui sont loin d'être rassurantes… Serions-nous en train de vivre dans une société décadente ? Je préfère ne pas le croire. D'autant plus qu'il paraît que l'optimisme permet de vivre plus longtemps ! Je préfère donc rester fidèle à la maxime d'Alain : l'optimisme est de volonté, le pessimisme est d'humeur. Même si, comme l'a fort justement dénoncé Luc Ferry, le pessimisme est vendeur, tous les médias en sont dépendants. Sauf que ce n'est certainement pas le pessimisme qui a créé le sens de l'universalité.
Pour en revenir au débat, il n'existe pas de valeur universelle selon André Comte-Sponville. Seule la vérité l'est. Les valeurs induisent un jugement de valeur et relèvent dès lors de la subjectivité. Le vrai se contente juste d'exister, le fait qu'il soit bon ou mauvais demeure un jugement. Pour donner un exemple, André Comte-Sponville utilise l'image de Monica Bellucci : les hommes sont-ils attirés par cette actrice parce qu'elle est belle ou la trouvent-ils belle parce que leur désir les incline vers elle ? Voilà un petit clin d'œil furtif à la théorie de Spinoza selon laquelle le désir crée la beauté. Les attributs que l'on donne aux objets ou êtres humains sont liés à notre désir. Ceci dit, n'en déplaise à Comte-Sponville, cela rappelle aussi la théorie de Nietzsche sur les notions de bien et de mal.
Pour Luc Ferry, certaines valeurs comme la justice et la liberté sont universelles. Sauf que ce ne sont pas les idées selon lui qui ont créé les droits de l'Homme, mais l'évolution de la vie privée. "Les droits de l’Homme ne sont pas passés par les idées mais par la vie quotidienne des européens, qui a été pour l’essentiel la vie des familles et, progressivement, la vie des familles fondées sur l’amour". Ainsi, l'évolution du mariage forcé vers le mariage d'amour aurait fait prendre conscience aux européens de la valeur de la liberté et de l'intimité. Tout comme la naissance du salariat : travailler pour gagner un salaire et s'émanciper.
Les valeurs ont donc besoin des hommes pour les faire vivre et donc, de sociétés énergiques. Attention à la fatigue, André Comte-Sponville nous met en garde.
Les valeurs ont donc besoin des hommes pour les faire vivre et donc, de sociétés énergiques. Attention à la fatigue, André Comte-Sponville nous met en garde.
Luc Ferry conclut que les cinquante premières années du XXème siècle ont été dominées par la philosophie de Marx, et que la deuxième moitié par celle de Nietzsche. Nietzsche a participé à la déconstruction de nos idoles, nos figures traditionnelles du sacré. Nietzsche dit dans Le crépuscule des idoles, qu’il faut casser avec son fameux marteau toutes les idoles. Il appelle idoles tous les idéaux quels qu’ils soient, les idéaux qui ont animé la morale, la métaphysique et la religion depuis Platon et la religion chrétienne. Nietzsche pense que nous avons inventé les idéaux, les idoles, pour nier la réalité. Nietzsche incite à se réconcilier avec le réel.
Nietzsche favoriserait par cette injonction à célébrer le réel, l'individualisme et le libéralisme. D'où l'ouvrage collectif dans lequel ont participé Luc Ferry et André Comte-Sponville "Pourquoi nous ne sommes pas Nietzschéens".
Peut-on considérer Nietzsche réellement comme un destructeur d'idoles ? Lui, qui finalement n'a eu de cesse d'en avoir, notamment dans le domaine musical. Il fallait juste qu'il écrase les idoles conformistes de son époque : Dieu, la science et le monde Platonicien.
Car, qui peut vraiment se passer d'idoles ? Là se devine les prémices d'un besoin universel. Aimer, Admirer. Nous en revenons finalement toujours aux mêmes désirs et aux mêmes valeurs.
Mais, comme il n'y a que dans l'adversité que l'on progresse, je vais m'empresser de lire "Pourquoi nous ne sommes pas Nietzschéens"…
b[Intervention de Luc Ferry et André Comte-Sponville à la Mutualité du 14 mars 2009 sur le thème de l'universalité. "Donner du sens à sa vie". ]b
Nietzsche favoriserait par cette injonction à célébrer le réel, l'individualisme et le libéralisme. D'où l'ouvrage collectif dans lequel ont participé Luc Ferry et André Comte-Sponville "Pourquoi nous ne sommes pas Nietzschéens".
Peut-on considérer Nietzsche réellement comme un destructeur d'idoles ? Lui, qui finalement n'a eu de cesse d'en avoir, notamment dans le domaine musical. Il fallait juste qu'il écrase les idoles conformistes de son époque : Dieu, la science et le monde Platonicien.
Car, qui peut vraiment se passer d'idoles ? Là se devine les prémices d'un besoin universel. Aimer, Admirer. Nous en revenons finalement toujours aux mêmes désirs et aux mêmes valeurs.
Mais, comme il n'y a que dans l'adversité que l'on progresse, je vais m'empresser de lire "Pourquoi nous ne sommes pas Nietzschéens"…
b[Intervention de Luc Ferry et André Comte-Sponville à la Mutualité du 14 mars 2009 sur le thème de l'universalité. "Donner du sens à sa vie". ]b
Cette année, la rentrée s'annonce quelque peu morose… Crise financière, climat grisaillant, pouvoir d'achat titubant, pas d'eldorado en perspective. Point étonnant alors que l'âge adulte ne fasse plus rêver. Grandir, oui, mais pourquoi ?
Les magazines surfent sur la vague de la crise de l'âge adulte, sur notamment la peur de vieillir. Dans un des derniers "Elle", un philosophe expliquait ce manque d'engouement pour l'âge adulte par le fait que notre société s'est urbanisée et a donc délaissé au passage le bon sens paysan, où vieillir et transmettre avaient un sens. L'esprit de performance n'aiderait pas non plus à accepter l'idée de vieillir. Bref, il existe sûrement de très bonnes raisons sociologiques de ne pas vouloir grandir !
Mais, le plus grave est que si l'on rejette l'âge adulte, c'est parce que nous considérons qu'aucun type de bonheur n'est associé à cet âge. Pourtant, les philosophes ne cessent de nous répéter que la sagesse permet d'être plus heureux. Question alors : l'âge adulte serait-il devenu un âge sans aucune sagesse ? Un âge encore plus idiot que l'adolescence ? Un âge caricaturé par "métro, boulot dodo", robotisé et sans âme.
La cause de la crise de l'âge adulte peut aussi s'expliquer par le fait que nos sociétés sont globalement pessimistes. L'immédiateté de notre existence n'est pas suffisante pour combler notre incessante interrogation de savoir où nous allons. Le livre de Corinne Maier "No kid" est révélateur de l'état d'esprit de notre société, on plonge carrément dans la philosophie de Schopenhauer…
En France, grandir signifie "se placer". Ce constat vient de la sociologue, Cécile Van de Velde, auteure de "Devenir adulte. Sociologie comparée de la jeunesse en Europe". En Angleterre, l'âge adulte consiste "à s'assumer", ce qui est déjà plus valorisant car c'est la voie de l'indépendance. Quant au Danemark, il s'agit de "se trouver", ce qui est bien plus palpitant !
L'âge adulte paraît plus solitaire que la jeunesse tribale. Cette coupure de lien reste peu attractive. Et plus on vieillit, plus on se rapproche de la mort, cette coupure de lien fatale… Bref, un panorama a priori très sinistre… Pourtant, vieillir c'est aussi gagner en sagesse, en sérénité, en accomplissement… Alors pourquoi refuser cette authenticité ? Sommes nous trop conditionnés par le jeunisme et l'esprit de compétition ?
Dans tous les cas, le succès de "La consolante" d'Anna Gavalda semble indiquer que nous sommes bel et bien entrés dans une période de repli. Vers les bonheurs simples. Le goût des gens simples… Peut-être arriverons-nous petit à petit à redorer l'âge adulte, en percevant d'autres types de bonheur...
Mais, le plus grave est que si l'on rejette l'âge adulte, c'est parce que nous considérons qu'aucun type de bonheur n'est associé à cet âge. Pourtant, les philosophes ne cessent de nous répéter que la sagesse permet d'être plus heureux. Question alors : l'âge adulte serait-il devenu un âge sans aucune sagesse ? Un âge encore plus idiot que l'adolescence ? Un âge caricaturé par "métro, boulot dodo", robotisé et sans âme.
La cause de la crise de l'âge adulte peut aussi s'expliquer par le fait que nos sociétés sont globalement pessimistes. L'immédiateté de notre existence n'est pas suffisante pour combler notre incessante interrogation de savoir où nous allons. Le livre de Corinne Maier "No kid" est révélateur de l'état d'esprit de notre société, on plonge carrément dans la philosophie de Schopenhauer…
En France, grandir signifie "se placer". Ce constat vient de la sociologue, Cécile Van de Velde, auteure de "Devenir adulte. Sociologie comparée de la jeunesse en Europe". En Angleterre, l'âge adulte consiste "à s'assumer", ce qui est déjà plus valorisant car c'est la voie de l'indépendance. Quant au Danemark, il s'agit de "se trouver", ce qui est bien plus palpitant !
L'âge adulte paraît plus solitaire que la jeunesse tribale. Cette coupure de lien reste peu attractive. Et plus on vieillit, plus on se rapproche de la mort, cette coupure de lien fatale… Bref, un panorama a priori très sinistre… Pourtant, vieillir c'est aussi gagner en sagesse, en sérénité, en accomplissement… Alors pourquoi refuser cette authenticité ? Sommes nous trop conditionnés par le jeunisme et l'esprit de compétition ?
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Marjorie Rafécas
Passionnée de philosophie et des sciences humaines, je publie régulièrement des articles sur mon blog Philing Good, l'anti-burnout des idées (http://www.wmaker.net/philobalade), ainsi que sur La Cause Littéraire (https://www.lacauselitteraire.fr). Je suis également l'auteur de La revanche du cerveau droit co-écrit avec Ferial Furon (Editions du Dauphin, 2022), ainsi que d'un ouvrage très décalé Descartes n'était pas Vierge (2011), qui décrit les philosophes par leur signe astrologique.
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