FRANCOISE C.*

16/12/2007
Bonne arrivée

Grave, ému, il attend l'arrivée de l'avion. Pas de tapis rouge, ces ignorants ne savent pas que ses petits enfants arrivent en France pour la première fois. Il affiche un flegme souverain, va lentement jusqu'aux larges baies de la piste, s'assoit sur un siège une minute à peine, se relève comme si le rouge écarlate du coussin brûlait, se plante devant le tableau des arrivées. Il fixe le moniteur dont les chiffres restent trop immobiles puis défilent à toute allure comme si l'écran trop sensible s'affolait ou si les chiffres tourbillonnaient plein d'une ivresse plus mécanique que vineuse avant de bloquer dans un hoquet puis de disparaître dans un nuage de poudre blanche scintillante annulant toute information.
Du calme....L'hôtesse annonce que l'avion se pose. Il se précipite pour se munir de deux caddies porte bagages et se pince le pouce avec une violence qui lui coupe le souffle. Les premiers voyageurs arrivent, déboussolés par l'heure tardive.
Bientôt la silhouette de sa fille se découpe dans l'embrasure de la première porte, trop loin encore puis plus proche jusqu'à ce que leurs regards puisent se saisir, s'accrocher, ne plus se quitter. L'un par l'autre, tout autre présence annulée. La voilà qui déjà décroche son regard pour envelopper ses petits et les amener jusqu'à lui, pour lui. Les vêtements différents ne l'aident pas à reconnaître Cyril de Gyl. Est-ce un piège? chacun arbore un petit drapeau à feuille d'érable de même couleur qu'il enfilera dans une boutonnière de la veste de papy. Ils sont dans ses bras; quatre serrés si fort qu'aucun ne voit les larmes étoiler les yeux des autres. Ils s'écartent enfin avec un rire heureux.
Il est temps de s'approcher du tapis roulant pour l'enlèvement des valises. Cyril raconte par le menu le voyage, le panorama au travers du hublot, Gyl est tout près de l'escarmouche avec un jeune garçon de son âge qui a un bagage semblable au sien. Mais la bonne humeur l'emporte et la joie de la rencontre.
Ils repartiront! Cette idée le traverse soudain comme une douleur fulgurante. Il sera temps après l'été de caresser pensivement la cicatrice du pinçon, les petits l'encombrent de leurs bagages et avec une belle énergie il les entraîne vers la sortie et leur foyer de l'été.
Françoise, Capbreton novembre 2007





Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 16/12/2007 à 21:56