II faut choisir : ça dure ou ça brûle ; le drame, c'est que ça ne puisse pas à la fois durer et brûler. Albert Camus

PHIL-ANALYSE

Lundi 26 Février 2007

(1ère partie de l'essai "le paradoxe d'être une femme", primé en 2000 et publié par le journal "le vilain petit canard")

"Pourquoi les hommes boivent-ils du vin et les femmes de l’eau" s’interrogeait Virginia Woolf.


Le paradoxe d'être une femme (1ère partie)
Cette question en elle même n’a rien de pertinent, mais imprégnons nous surtout du ton de cette phrase: ton sans rancune, sans révolte, juste une tentative de comprendre certains clichés, ces petits vestiges de l’Histoire.

Quand on voit l’automne engourdir la nature, les feuilles tomber des arbres, elles sont si frêles, si légères, si ovales, qu’on a l’impression qu’elles tombent avec l’allure d’une femme. Allure d’une femme… J’ai une appréhension qui s’agrippe à ma main: Pourquoi toutes les femmes auraient-elles la même allure? Je me rappelle du sentiment amer que m’avait provoqué cette petite phrase de Kierkegaard "La femme ressemble a une fleur, comme les poètes aiment à le dire et même la spiritualité a en elle un caractère de végétatif."

Même si l’art a loué la candeur féminine, immortalisé leur peau de pêche par des peintures à huile, sculpté leurs seins dans la froideur d’une pierre et fait cracher des fontaines par des lèvres pulpeuses de sirènes… On ne peut pas réduire la femme à un instrument poétique.

"Femmes végétatives", "Animal domestique", " par nature destinée a obéir", toutes ces expressions qui animalisent la femme sont comme des coups de hache.

Comment rester imperturbable, continuer a boire mon café sur une terrasse ombragée, et du bout de mes doigts faire des anglaises avec mes cheveux.

A la question "existe-t-il une nature féminine?", par ressentiment, j’ai envie de répondre NON.

Mais je repense à Virginia, ce n’est pas pour rien que je l’ai citée en premier: NE PAS écrire, NE JAMAIS écrire sous l’impulsion de la Vengeance.

Non je ne veux pas faire comme Schopenhauer, parler d’un millions de femmes à partir d’une mauvaise mère.

Il est clair que les hommes sont loin d’avoir écrit sous la conduite de la méthode cartésienne "ne recevoir jamais aucune chose pour vraie que je ne la connusse évidemment pour telle"... Ils ont taché beaucoup de livres par leurs instincts, leurs émotions, et leurs ressentiments. Donc la tache qui incombe à cet essai n’est pas de discourir sur la supériorité de l’homme ou de la femme, puisque de toute façons toutes ces conclusions passées dérivent de l’ignorance. N’épuisons plus notre pensée à savoir : si l’homme ou la femme est supérieure, laissons plutôt ces enfantillages aux gens frustrés.

Ce faisant, le passé me met en garde, employer le terme de nature est dangereux. Dans le terme nature, il se cache un caractère immuable, qui ne peut pas être transformé par les Hommes. La nature a une connotation de prison, de loi absolue qui enchaîne. Certaines femmes ont la nausée de cette expression "nature féminine" car elles ont l’impression de se piquer à du fil barbelé, peur de tomber sur un anthropologue qui énoncera "rien dans la nature n’est sans signification", ou encore peur de se faire poursuivre par des religieux fanatiques qui emploieront le terme "la femme moderne est contre nature". Autant dire que la nature féminine est un piège. Pourtant je pense qu’on peut affirmer un dualisme sans tomber pour autant dans le leurre de la subordination. De toute façon "chassez les seins, et ils reviennent au galop…"

Plutôt que de lire ce qu’ont écrit les hommes, je préfère marcher dans la rue, et contempler ces jupes qui flirtent avec le vent et ces pantalons qui n’ont plus l’exclusivité masculine. Mon regard tombe sur une poussette d’enfants puis se cogne à une pervenche. Puis je m’arrête devant une cathédrale. Elle sent le moyen age et a un air très hautain. Je me sens écrasée. Cet écrasement me rappelle quelque chose…. Comme une phrase de Stendhal "toutes nos idées sur les femmes nous viennent en France du catéchisme de 3 sous…"

Près de cet endroit, je pressens une déchirure… Oui je repense vaguement aux philosophes de la métaphysique, à Kant, Saint Augustin, à la religion en général et j'ai comme l'impression qu'ils ont estropié la nature féminine. Ils l’ont cassée en deux: d’un côté la femme mère qui enfante et d’un autre côté la femme sensuelle, être de désir qui dévoie l’homme. Oui les hommes ont scindé la femme en deux. Diviser pour mieux régner, dit-on… Seul le rôle de mère a été sacralisé et le reste diabolisé. Alors s’est proliféré le paradoxe féminin. La femme oscille entre son côté maternel et son envie d’être reconnue en tant que "femme en soi".

La religion ne lui a accordé qu’un seul rôle, celui d’une mère, et le modernisme lui a accorde le second, celle de la femme émancipée. Mais la fêlure reste.

Je dis bien fêlure et non pas aliénation. Il ne s’agit pas de l’intrusion d’un élément étranger dans la femme, mais plutôt d’une sorte de dédoublement. L’homme lui, ne connaît pas ce paradoxe. Il ne connaît pas ce contraste de femme d’intérieur et de femme active, cette lutte entre l’envie de rejeter l’ascétisme tout en conservant le sentiment maternel… Je pense que la femme vit mal cette fêlure, et qu’elle aimerait réconcilier ses deux natures pour se retrouver entière.

Donc je ne m’en prendrai pas à la politique (surtout pas après la loi sur la parité…), ni à la disparité des salaires, ni encore a notre langage qui a eu du mal a accepter la féminisation du terme écrivain (on ne va tout de même pas se battre sur des e ou des a, et le fait que le masculin l’emporte sur le féminin en grammaire…).

Mais je pense que ce n’est pas un hasard si en Europe la pratique de la religion a subi un déclin lors de l’émancipation des femmes.

Pourquoi la métaphysique a-t-elle dénaturé la femme?

Pour cela je vous invite à vous replonger dans le passé, non dans un passé exhaustif, mais pour survoler quelques petits vestiges de la métaphysique qui a transformé la nature en un univers abstrait où la femme a été déchue. La philosophie comme l’astrophysique actuelle manque "de seins", si je puis me permettre.

Apres avoir effleuré ce monde abstrait en papier, moniste et monotone, nous nous arrêterons au XX siècle, ce siècle ayant sacralisé trois marqueurs importants pour l’histoire de la femme: Freud, Marx, Nietzsche ( même si celui-ci ne l’a pas fait exprès…). Ces trois philosophes ont remis en cause la vision moniste de l’homme. En effet à travers ces trois philosophes "du soupçon", se révèleront la fêlure de la nature féminine ainsi que le détrônement de la toute puissance masculine.

Mais la femme n’attend qu’une chose: maintenant qu’elle a toutes les pièces du puzzle, il faut qu’elle se reconstruise une identité, non pour s’enraciner mais juste pour exister…
















I. Un monde abstrait sans la rotondité terrestre…





L’origine du monde.

Rappelez vous de ce tableau "l’origine du monde" de Gustave Courbet, où une femme écarte les cuisses et où l’on voit une drôle de foret noire… Oui c’est vrai que l’on pourrait fermer les yeux car avouons le : c’est obscène. Pourtant c’est de là que nous sommes sortis. Oui vous tous, nous tous, ne sommes malheureusement pas sortis de la cuisse de Jupiter mais d’une femme. Oui c’est toujours le même scénario: un bébé joliment fripé sort de la sueur d’une femme et puis on coupe le cordon ombilical. Oui je répète: on coupe le cordon ombilical, non pour me prêter des accents freudiens mais pour faire retentir cette déchirure qui ne me parait pas anodine. Alors, apparaît en grandissant le sentiment d’absurdité, cette souffrance de la séparation. Cette absurdité qui est l’une des causes de la quête métaphysique.

L’homme n’est pas satisfait d’une origine charnelle, cela n’est pas assez abstrait et surtout le conduirait a une dépendance vis a vis de la femme, que lui "maître et possesseur de la nature" ne puit tolérer. Alors pourquoi ne pas masculiniser l’origine du monde en la noyant dans l’abstraction?

La négation de l’origine du monde.

" Au commencement Dieu créa le ciel et la terre…"

Arrêtons nous la. Le dualisme ne fait que commencer. La terre, imprégnée d’un fort côté maternel, et le ciel symbolisant la place masculine, on peut déjà remarquer la place subordonnée de la terre…

Et cette conception n’est pas qu’occidentale. Pour Confucius, la terre est un "réceptif" et le ciel "un créateur". Autrement dit remplacez terre par mère, et ciel par père, et voila qu’en ressort une nature féminine passive, non plus origine du monde mais porteuse du monde.

Sous l’Antiquité…

Bien que le polythéisme était beaucoup plus favorable a un symbolisme diversifié de la femme, il n’en reste pas moins que les mythes n’ont pas toujours révélé la femme comme le foyer de la vie… Considérons le mythe de Prométhée et de Pandore. Prométhée a sauve les hommes en leur redonnant le feu volé a Zeus. Zeus dans sa fureur a puni les hommes en leur envoyant Pandore ce "beau mal" qui n’était pas un male mais une femme. Pandore était porteuse de toutes les maladies, fatigue, désespoir, elle leur a apporte la mort. Voyez comment la femme fait un bond d‘Eros a Thanatos…

Dans l’univers de notre Platon géomètre…


Platon était peut-être plus sensible aux angles droits qu’aux rondeurs… Sur terre, la vérité n’est pas visible, le monde sensible est un trompe l’œil. Des lors Il nous incite a sortir de la caverne ( la caverne serait-elle d’ailleurs le symbole du ventre de la femme?), pour aller rejoindre la vraie lumière, celle du monde intelligible. Nos sens nous trompent, Platon méprise l’apparence en ce qu’elle est fallacieuse. Conséquence: la beauté naturelle de la femme en prend un coup, elle aussi, elle est fausse.

C’est vrai que c’est Diotime, une femme qui a délivré l’art de l’amour spirituel a Socrate. Je ne cherche pas a dénigrer la sagesse socratique, mais simplement a mettre en relief le fait qu’en créant un monde abstrait, le corps pourtant source de vie s’est transformé en une prison. Et Dionysos, dieu de l’ivresse et des forces productrices, est mort. Et la femme active avec… D’ailleurs dans la mythologie la divinité de Dionysos était mise en doute, comme celle de la femme, sorte de déesse boiteuse. Pourtant Socrate utilisait bizarrement la méthode de l’accouchement pour assagir les hommes…

Quand Eve croqua la pomme…

Naquit le concept de la mort. Dieu, furieux, a puni l’humanité en la chassant du paradis d’Eden. "Tu enfanteras dans la douleur" dit-il a la femme. Et tout cela pour une pomme, une fausse rondeur de sein… La femme devient alors a son tour le fruit défendu. Le concept de la femme devient alors un clonage de femme-mère.

Ou intervient alors la scission?


La femme n’est plus qu’un "réceptacle", elle est coincée dans un schéma de subordination. Elle reçoit simplement la semence de l’homme "créateur" mais n’engendre pas véritablement, elle ne fait que couver. Ce n’est pas elle qui possède l’"idée", car seule l’intelligence de l’homme modèle le monde. Des lors la femme est un être statique, elle étouffe dans le cliché de la pureté, et se congèle dans l’innocence. Il ne faut surtout pas qu’elle se fasse remarquer, la pudeur est son destin. Elle doit cacher son côté fallacieux. Puisque que son destin est d’être mère et d’enfanter dans la douleur, elle se cogne a la finitude. Pour elle, le temps n’existe pas. La femme devient alors insipide, et ce qui fait encore plus bondir c’est d’entendre l’écho de Don juans se plaindre "ah, l’amour d’une femme n’est qu’habitude et faiblesse"… L’homme lui, préfère la puissance et l’infini. Cet infini qui me permet de faire la transition avec le côté métaphysique de la science pure.

<b>L’astrophysique : construction de l’univers, fantasme d’auto-enfantement de l’homme? </b>

Ne trouvez-vous pas que la phrase "oui mais cela a été prouvé scientifiquement…" est comme une parole sacrée, une certitude, une formule polie qui vous invite gentiment a "vous écraser". Apres le dieu historique, le dieu prouvé mathématique…

"une brève histoire du temps" de Stephen Hawking, ce livre manque de sexe, comme le souligne christian Magnan. C’est vrai que finalement vouloir enfermer la nature dans des lois, est un discours typiquement masculin. Car tout expliquer permet de dominer... Bien que j'aime la saveur optimiste de "maître et possesseur de la nature" de notre cher Descartes, l’on peut néanmoins reconnaître que cette phrase est imbibée d’instincts masculins, de cet esprit de conquête donjuanesque, comme un Napoléon en manque d’espace. L’homme a toujours vu grand, voire trop grand. Il oublie que la nature n’est pas qu’un objet a soumettre mais aussi un don. Par ailleurs vouloir réduire les lois de l’univers a une seule équation est de la prétention masculine. Cette seule équation qui permettrait alors de se projeter dans une vérité universelle… Oui l’homme a la tendance du machinisme. Il veut toujours tout systématiser, que rien ne lui échappe. C’est la raison pour laquelle par exemple le concept de l’âme, concept non traduisible en logique est souvent juge absurde.

L’homme prête a l’univers les mêmes attributs qu’il utilise pour décrire son dieu : "Un et Unique, Indivisibilité, éternité, puissance, totalité, immanence, transcendance". Donc nous retrouvons ce concept de l’infini, qui pourtant n’est qu’un concept mathématique non éprouvable dans le monde empirique. D’ailleurs au passage, c’est par ce concept de l’infini que Descartes en déduit l’idée de dieu, comme c’est étrange…

L’homme se croit plus infini que la femme, qui elle, a été souvent réduite a un organe reproducteur.

Les hommes se sont construits un univers qui ne nous concerne pourtant pas directement, et oublient la vraie nature, celle dans laquelle ils respirent, cette terre dont ils abusent juste pour assouvir leur puissance.

Ils ont eu le même comportement envers la femme : la femme engendre des enfants pour qu’ils aillent servir une "Patrie" (une sorte de père), et gîser sur des champs de bataille. Tout cela pour dominer quoi? Avoir une puissance sur quoi? Tout cela fait partie d’un fantasme masculin que la nature féminine a du mal a pardonner.

Malgré ce vieux réflexe métaphysique repris par la science pure, notre XXeme siècle a été celui de l’époque du soupçon. Certes ce fut aussi un siècle gorgé de crimes et de terreur, mais n’est-ce pas le signe que l’homme voyant sa puissance mordue par de nouvelles théories a eu peur… Et il s’est finalement rendu en 1945 en accordant le droit de vote aux femmes. Freud, Marx, Nietzsche, ces philosophes qui sont encore a l’apogée de controverses interminables, ont été d’ailleurs récemment qualifiés par Jean Paul II lors de sa visite a Yad Vashem des trois philosophes de "la mort de dieu". Cette "mort de dieu"qui, a-t-il dit, a préparé la "mort de l’homme". Mais le problème est de savoir, homme avec un grand H ou petit h…


II. la mort de l’homme

(ou la redécouverte d’une autre nature féminine)

Les vents tournent à la fin du XIX aime siècle ( au tour de l’homme de se faire "casser"?…). Ce n’est pas de la vengeance, mais simplement le fait que les hommes inventent de nouvelles théories qui n’ont plus le reflet souhaité, ou alors est-ce Narcisse qui se noie dans sa propre image…

Le concept de l’homme n’a plus l’aspect d’une toute puissance, il chute: un peu comme la pomme de Newton, il faut qu’il reconnaisse que lui aussi est soumis au champ de pesanteur. C’est un peu comme la chute d’Icare, son père lui avait dit de ne voler ni trop haut ni trop bas et il a fini par perdre ses ailes. L’homme n’a jamais voulu reconnaître ses limites. Certes, Il a raison de vouloir repousser ses limites, mais il confond "repousser" et "anéantir"... A force de vouloir nier ses propres limites, il en ressort un côté fortement tinté de nihilisme. De toute façon je ne cherche pas a plaider pour la mesure, pour la sagesse socratique du "connais toi même". Mais cela dit l’homme a toujours cherché a enfermer la femme dans des définitions, sans jamais s’inclure. Mais avec Freud, l’homme prend conscience d’un sentiment d’altérité. Il reconnaît le petit bout de femme (sa mère) qui est en lui ou encore ce chromosome X qu’il partage avec Y. Et par Marx, il abandonne l’idée d’une femme "propriété privée". Et c’est a partir de cette révélation que la nature de la femme se re dévoile sans pour autant se recoller.

1. Conscience déchirée.

L’homme, de la même façon qu’il avait imaginé son dieu "Un et Unique", se croyait indivisible, au contraire de la femme qui elle, se démultiplie (métaphoriquement) pour donner naissance à un bébé. Freud a osé écorcher ce caractère indivisible en mettant fin à l’empire d’un MOI absolu. Oui, l’inconscient, cette sorte de petit diable, vient aliéner l’homme. Désormais l’homme n’est pas le seul maître en son royaume, mais doit coopérer avec une sorte de monstre à deux pattes (le ça et le surmoi). Finalement cette dualité le replonge dans la même dualité qu’il avait connu avec son homologue féminin. Cet inconscient est "bisexuel", c’est à dire qu’il est à la fois le monstre invisible du père et de la mère. L’homme apprend non seulement qu’il a un adversaire, mais aussi un complexe, ce fameux complexe d’Oedipe... Il a en lui non l’origine du monde dont il avait tant rêvé, mais celle un peu bâtarde, charnelle, cette peau, ce parfum de femme qui n’est autre que sa mère. Beaucoup d’écrivains n’ont pas renié cet attachement profond à leur mère, que ce soit Albert Cohen dans "le livre de ma mère", ou Gide qui à la mort de sa mère s’est écrié "désespéré mais libéré" il existe en littérature une nostalgie de la mère comme il existe une aspiration à la liberté à travers la mer.

Qu’importe que la psychanalyse soit une pseudo-science ou une fantaisie littéraire, ce qui nous intéresse est qu’elle ait réintroduit dans l’homme cette présence féminine pourtant si redoutée dans les caractères donjuanesques.

L’homme aussi a un intérieur qu’il ne peut pas fuir. Mais il doit aussi accepter l’idée qu’il ne peut posséder ses fantasmes...

2. Propriété déchirée

Marx et Engels avaient fait naître un courant féministe communiste, par l’idée que la société divisée en deux classes n’était que le prolongement de la scission familiale, entre la mère incapable de jouir d’une propriété et l’homme patriarche de la famille. La femme, en tant que "machine" ou "organe reproducteur", n’était que la propriété privée de l’homme, et cette dualité s’est profilée dans un schéma d’exploitation Patron/Ouvrier. Certains pensent que c’est la propriété qui a créé le concept de fidélité : l’homme transmettant son héritage à ses rejetons voulait s’assurer de sa paternité, à cette fin il exigeait de la femme une fidélité irréprochable (autant dire que le mythe de l’amour en prend un coup et rejette l’idée de fidélité comme preuve d’amour, ou encore la phrase bordée de romantisme "veux-tu m’appartenir?", se voit transmuter en un concept matérialiste.) Mais si l’on prend le point de vue de Schopenhauer, ce serait le femme qui a créé la fidélité pour emprisonner l’homme inconstant dans un foyer qu’il aurait quitté aussitôt la femme déplumée par la vieillesse... Comme si l’homme avait le droit de posséder la beauté...

C’est vrai qu’à travers la propriété, on retrouve le principe de la monogamie. Mais est-ce que la propriété en est la seule cause? Je soumets juste cette question pour se rendre compte du fait qu’en donnant à la femme le droit de posséder des biens on pouvait prévoir que cela allait quelque peu briser la solidité du mariage : la femme ne dépendant plus du pouvoir matériel de son mari. Il est vrai que pour que la monogamie subsiste (j’entends par la une monogamie absolue, c’est a dire l’union d’une femme et d’un homme durant tout une vie), l’amour devra être plus fort que le confort matériel. C’est vrai que maintenant le concept de l’amour doit s’extérioriser du concept de la possession, et je pense que c’est encore une transition difficile pour notre époque. Quel est le rapport de l’amour avec la femme? Et bien comme l’amour, la femme délivrée de son étiquette de propriété privée, doit retrouver une unité, une autonomie. Elle n’appartient désormais qu’à même, et c’est justement là où son paradoxe apparaît.



Rédigé par Marjorie Rafécas le Lundi 26 Février 2007 à 19:57 | Commentaires (1)

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Marjorie Rafécas
Marjorie Rafécas
Passionnée de philosophie et des sciences humaines, je publie régulièrement des articles sur mon blog Philing Good, l'anti-burnout des idées (http://www.wmaker.net/philobalade), ainsi que sur La Cause Littéraire (https://www.lacauselitteraire.fr). Je suis également l'auteur de La revanche du cerveau droit co-écrit avec Ferial Furon (Editions du Dauphin, 2022), ainsi que d'un ouvrage très décalé Descartes n'était pas Vierge (2011), qui décrit les philosophes par leur signe astrologique.




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