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PHOTOS 2006/2007
RENE
16/03/2006
Mots à insérer :
VISITE : valise valeur irrésistible illico souci sommeil imagination insoumis tambour tisser érotisme électrique
JOKERS : jour terre jaune.
René (1961)
Souvenirs d’incorporation
Classe 61 1-A
Je pousse le bouton. La lumière électrique cède place à l’obscurité. C’est la dernière nuit de sommeil à la maison. Demain, c’est le lundi 2 janvier 1961. Le train est à huit heures trente. Nous devons nous lever avant le jour. Cette petite gare d’Orthez, au bout de son allée de platanes, dressée au bord du gave et un peu vieillotte, je ne la porte pas trop dans mon cœur, trop associée qu’elle est à la séparation avec ma terre natale et ma famille, passage quasiment obligé vers l’inconnu et l’avenir. Dire que mon père à du passer par là en 1917.
L’ordre d’incorporation attendu est arrivé depuis trois semaines pour le C.I. (centre d’instruction) du 24eme R.I.Ma. à Carcassonne. L’infanterie de marine, je saurai ainsi ce que c’est. L’Infanterie, je vois, mon père nous a un peu raconté : le fantassin en première ligne, avec son fusil, la baïonnette, la chair à canon. Mais pour la Marine, moi qui sais mal nager, c’est moins clair. En fait, je sais, c’est la valeureuse Colo, la Coloniale qui a accompli ses exploits irrésistibles en Afrique et en Indo et qui est aussi très réputée pour sa consommation de bibine.
Mais, pourquoi ce régiment ? Mon frère, lui, était dans l’artillerie. Avec mes binocles ce ne pouvait être les paras. Pendant les «trois jours » à Auch, l’on nous a soumis à toute une panoplie de test pour déterminer nos aptitudes… Pas évident de trouver illico la logique de séries de nombres, de dessins, de traits tissés, … On nous a même honorés d’équations de la forme : (a+b)2 = ? restées sans réponse. Et aux test des transmissions : trait-point-trait-point-point- …. catastrophe, pas bon pour être planqué dans les transmissions. Quant à l’aviation, les places sont chères. Je me souviens encore, lors de la visite du Conseil de révision -on ne peut rien y cacher- le major m’a trouvé un cœur de sportif… En conclusion : Bon pour le service armé.
Un à quelques mois de Classes en métropole, c’est ça de pris avant d’aller « pacifier » en A.F.N. jusqu’à la fin des vingt-sept mois. Pourtant cela sera pour rien : le Général a annoncé l’autodétermination, l’indépendance de l’Algérie est inéluctable. Les infos à la radio parlent régulièrement d’embuscades, d’opérations, de morts, de blessés. J’ai parlé à des anciens d’A.F.N. La bonne étoile a ses limites, cela serait bien plus sûr pour sa peau de ne pas y aller. Mais, comment passer à côté ? Le sursis pour achever les études, le piston, ce n’est pas pour moi. La désertion, pour aller où sans argent et sans relations, ou se cacher au fond des bois comme en quarante, pour à la fin revenir entre deux gendarmes. L’insoumission : j’imagine la prison, les bataillons disciplinaires, BRRR !
Et la valise ? C’est bon, elle est prête, ce n’est pas un souci, l’on sera logé nourri. Certes, elle n’est pas toute fraîche avec son intérieur jauni Qu’importe. J’ai prévu un peu d’argent, le bloc et les enveloppes pour écrire à la maison -en fait correspondre avec Maman-.
La première permission ne sera pas avant un mois. Loin. Le dernier film à Salies, le bal de samedi, il n’y a pas de quoi nourrir des souvenirs érotiques transcendants. Et, qu’en sera-t-il des nouveaux camarades, de la découverte de la ville… ?
Nota : Demander la suite à Morphée qui a débarqué sans tambour ni trompette.
René pour le 13 février 2006.
Classe 61 1-A
Je pousse le bouton. La lumière électrique cède place à l’obscurité. C’est la dernière nuit de sommeil à la maison. Demain, c’est le lundi 2 janvier 1961. Le train est à huit heures trente. Nous devons nous lever avant le jour. Cette petite gare d’Orthez, au bout de son allée de platanes, dressée au bord du gave et un peu vieillotte, je ne la porte pas trop dans mon cœur, trop associée qu’elle est à la séparation avec ma terre natale et ma famille, passage quasiment obligé vers l’inconnu et l’avenir. Dire que mon père à du passer par là en 1917.
L’ordre d’incorporation attendu est arrivé depuis trois semaines pour le C.I. (centre d’instruction) du 24eme R.I.Ma. à Carcassonne. L’infanterie de marine, je saurai ainsi ce que c’est. L’Infanterie, je vois, mon père nous a un peu raconté : le fantassin en première ligne, avec son fusil, la baïonnette, la chair à canon. Mais pour la Marine, moi qui sais mal nager, c’est moins clair. En fait, je sais, c’est la valeureuse Colo, la Coloniale qui a accompli ses exploits irrésistibles en Afrique et en Indo et qui est aussi très réputée pour sa consommation de bibine.
Mais, pourquoi ce régiment ? Mon frère, lui, était dans l’artillerie. Avec mes binocles ce ne pouvait être les paras. Pendant les «trois jours » à Auch, l’on nous a soumis à toute une panoplie de test pour déterminer nos aptitudes… Pas évident de trouver illico la logique de séries de nombres, de dessins, de traits tissés, … On nous a même honorés d’équations de la forme : (a+b)2 = ? restées sans réponse. Et aux test des transmissions : trait-point-trait-point-point- …. catastrophe, pas bon pour être planqué dans les transmissions. Quant à l’aviation, les places sont chères. Je me souviens encore, lors de la visite du Conseil de révision -on ne peut rien y cacher- le major m’a trouvé un cœur de sportif… En conclusion : Bon pour le service armé.
Un à quelques mois de Classes en métropole, c’est ça de pris avant d’aller « pacifier » en A.F.N. jusqu’à la fin des vingt-sept mois. Pourtant cela sera pour rien : le Général a annoncé l’autodétermination, l’indépendance de l’Algérie est inéluctable. Les infos à la radio parlent régulièrement d’embuscades, d’opérations, de morts, de blessés. J’ai parlé à des anciens d’A.F.N. La bonne étoile a ses limites, cela serait bien plus sûr pour sa peau de ne pas y aller. Mais, comment passer à côté ? Le sursis pour achever les études, le piston, ce n’est pas pour moi. La désertion, pour aller où sans argent et sans relations, ou se cacher au fond des bois comme en quarante, pour à la fin revenir entre deux gendarmes. L’insoumission : j’imagine la prison, les bataillons disciplinaires, BRRR !
Et la valise ? C’est bon, elle est prête, ce n’est pas un souci, l’on sera logé nourri. Certes, elle n’est pas toute fraîche avec son intérieur jauni Qu’importe. J’ai prévu un peu d’argent, le bloc et les enveloppes pour écrire à la maison -en fait correspondre avec Maman-.
La première permission ne sera pas avant un mois. Loin. Le dernier film à Salies, le bal de samedi, il n’y a pas de quoi nourrir des souvenirs érotiques transcendants. Et, qu’en sera-t-il des nouveaux camarades, de la découverte de la ville… ?
Nota : Demander la suite à Morphée qui a débarqué sans tambour ni trompette.
René pour le 13 février 2006.
Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 16/03/2006 à 00:24