PASCALE *****

Faire part

« Pendant 9 mois, ma mère m'a aimée dans son ventre, mon père m'a aimé dans sa tête....Vous allez m'adorer... »




Ce fut d’abord une course effrénée à qui arriverait le premier. Et ce fut moi ! En pénétrant la membrane de l'ovule, renonçant à tout jamais à ma liberté, je savais déjà que mon propre père serait, quelque temps en tout cas, mis un peu à l’écart dans notre histoire à trois. Même si, de temps en temps, au début tout au moins, il nous rendrait encore visite… Mais je m’égare!

Une seule cellule, puis deux, puis quatre avant de ressembler à une petite crevette. Merci le miracle de la vie ! T’as vu ma trombine ! Jour après jour, semaine après semaine me nourrissant déjà de ma mère, qui elle se nourrissait de la tendresse et de l’attention de ceux pour qui elle comptait, je grandissais, je me formais, je fignolais ma venue au monde. J'aimais déjà les caresses que ma mère me prodiguait à travers son ventre et les frissons de son propre épiderme faisaient se dresser le duvet, qui bientôt, recouvrait le mien.
Je n’étais pas non plus insensible au son de sa voix. Elle me parvenait étouffée par le liquide qui remplissait mes oreilles. Mais je savais au ton qu’elle employait si elle s’adressait à moi ou pas. Elle adoptait toujours un ton chaleureux, doux comme une berceuse.

Je n'étais pas non plus insensible à celui de mon père. Très vite je sus qu’il y aurait dehors deux personnes qui compteraient beaucoup pour moi. Essentiellement même.

Parfois d'autres voix rejoignaient ces deux-là et je ne m’y retrouvais guère. Mais quel que soit le brouhaha, j'étais toujours entre deux eaux, nageant en plein bonheur.
Parfois une main plus rugueuse, plus hardie aussi, s’emparait de ma maman. C'était effrayant et doux à la fois. Puis remuée en tous sens, je me jurais de ne jamais m’obliger à rester dans un manège à grande vitesse. Enfin les vagues se calmaient et le silence revenait.
Papa, maman et moi dormions alors comme 3 bébés repus.

La notion du temps m’échappait un peu mais je savais qu'il me faudrait un jour sortir de ce cocon. Toutefois je n’avais pas peur. Pourquoi ne serait-ce pas aussi bien dehors que dedans ? Et cette grosse voix qui maladroitement elle aussi venait me bercer : je rêve de savoir à quoi ressemble son propriétaire !
Et les autres, tous les autres. Ceux qui s’extasient sur maman, ceux qui rêvent, m’apostrophent, se pâment, supputent…

A l’heure de la sortie je percerai pas mal de mystère. Mais j’ai une excellente mémoire auditive : ce n’est pas le tout de jaser en buvant de l’eau de rose. Maintenant il va falloir assumer !

-- Ouin. OUIN. OUIN ...

-- Heu, elle pleure souvent comme ça ?

-- Oh ben sais, c’est son heure... Je suis contente que tu la voies ainsi. Personne ne nous croit lorsqu’on le dit. Bon je vais la chercher...

Je me sens bêtement impuissante. La petite serre ses petits poings, secoue ses jambes, hurle à fendre l’âme ou … les murs des voisins.

Bébé elle, ouvre un oeil… Voit sa mère, pousse un dernier cri puis soupire sourire au coin des lèvres :

« Je l’ai eu. Je l’ai eu. Je l'aurai toujours ! »...

Pascale jeu du 1 décembre 2007.





Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 10/12/2007 à 21:00