FRANCOISE C.*

04/02/2008


Mots à insérer

CAPRICE: cabochon, comment; artiste, arpège; punaise, positif; rire, rare; imprudent, improviser; cabine, caricature; espoir, élément
JOKERS: tout, pour, do(s)





Anorexie

Oh, imprudente qui laisse ton rire ricocher, véritable arpège cascadant vers un tel aigu qu'il ferait voler en éclat un cabochon de cristal si un tel élément existait encore dans le bric à brac qu'est devenu ton antre. Quel espoir ou quel désespoir te pousse à improviser un simulacre de joie de vivre, que dis-je simulacre, une caricature; te crois tu jouant de la harpe, artiste improvisant quelque mélodie en do pour séduire tout un public hypothétique fasciné par la punaise de bénitier que chacun aspergerait bien comme un diable fuyant à cheval sur sa fourche pour échapper à la moindre goutte d'eau bénite que le dissoudrait dans un nuage malodorant. Comment penses-tu échapper au dispositif qui se met en place? Tous ces gens qui te cernent ont pour mission de te forcer à avaler le contenu de ton assiette, Entre ceux qui croient encore à un caprice de ta part et ceux que ton anorexie incite à appliquer un dispositif contraignant pour te forcer à mettre en bouche le gratin onctueux préparé à ton intention, à le laisser fondre entre langue et palais pour que chaque épice et chaque aromate forcent tes papilles à s'ouvrir, que ta glotte ne bloque plus cette première bouchée mais l'accepte comme une promesse de vraie satiété, ne te débats plus, accepte de penser que la vie mérite de se croquer à belles dents, que tu peux baisser la garde. Ton entourage est prêt à débattre avec toi, à accepter tes arguments, à entendre tes raisons pour peu que tu t'ouvres à ton tour à leurs propositions et à leurs souhaits. Aucune cabine, aucun caisson sensoriel n'est assez étanche pour que tu t'y enfermes, que tes seules perceptions enflent si fort que n'entendant que toi, certes, tu risques d'y laisser la peau.
Sais-tu que le rire peut être léger, authentique, communicatif, que les mots peuvent se répondre, se propager en écho, s'affronter en diversité de sens sans que l'univers s'écroule pour autant mais au contraire s'éclaire d'une promesse d'aube nouvelle et de richesse partageable.
Ouvre ta fenêtre et ton antre deviendra accueil, ôte ton gant pour partager l'eau bénite, aucun doigt n'est sale même sous la crasse apparente, partage notre repas et laisse toi gagner par notre appétit, aucun regard glacial ne t'obligera plus à pousser la salade sur le pourtour de l'assiette pour faire semblant d'avoir dévorer tout le centre, détends ton dos, laisse s'ouvrir tes côtes pour un rire de connivence partagée, bientôt elles seront moins saillantes, tu auras moins l'air d'un porte manteau à pattes et nous pourrons te proposer sans arrière pensée une promenade au bord de la rivière et une collation à la guinguette du port.
Françoise, Capbreton, janvier 2008

Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 04/02/2008 à 23:58