ARELACOR


Hermès… messager des dieux, gardien des routes
et des carrefours, dieu des voyageurs, du commerce…
et des voleurs !




On sait aussi que de la carapace d’une tortue il fabriqua la lyre,

lyre qu’il offrit à Apollon après lui avoir révélé où il avait caché

le troupeau qu’il lui avait volé. Il inventa aussi la syrinx.


Ses attributs : les sandales ailées, le caducée, don d’Apollon,

le pétase, chapeau rond. De son union avec Aphrodite naquit l’Hermaphrodite.


Voilà, rapidement résumées les connaissances essentielles du dieu.


Dans le Cratyle, (407e-408b) Socrate rapproche Hermès du sens

« interprète » (erméno, en grec). Mais on s’accorde plutôt sur l’étymologie

qui signifie : « celui du tas de pierre ». Ermaïon, en grec désigne

un cairn ou un amoncellement de pierres servant à jalonner le terrain.

Ce tas de pierre prit par la suite une forme anthropomorphique et doté

d’un phallos pour finalement se transformer en figure totalement humaine.




Ces « ermaïa » étaient disposés devant les maisons et au bord des chemins

où ils servaient de bornes.

Dieu protecteur des routes, la fonction d’Hermès était de guider les voyageurs,

de les aider : envoyé par Zeus, il accompagne le vieux Priam jusqu’à la tente d’Achille ;

il donne à Ulysse une plante magique qui l’immunise contre la magie de Circé…

Enfin, certains font d'Hermès le dieu des immigrants qui vinrent s’installer sur le sol de l’Hellade.


Ce dieu des gens simples fut l’objet d’un scandale qui secoua la Grèce

dans cette fin du Vème siècle.

Quand les Athéniens se réveillent en cette douce matinée du 11 du mois

de Thargélion (juin) 415 –précision de spécialistes- ils sont loin de se douter

du drame qui s’est déroulé dans la nuit.

C’est horrifiés qu’ils apprennent que toutes les statues d’Hermès ont été mutilées

« sur la face avant » comme le dit pudiquement Thucydide,

c’est-à-dire qu’on s’est attaqué aux phallus de ces grossières représentations.



Tous mutilés ! Et quand on sait qu’en cette fin de siècle encore on tenait

compte de tous les signes qui pouvaient marquer la volonté divine on comprend

que l’émotion fût aussi vive, que cette offense délibérée envers un dieu tutélaire

pût terrifier les gens.




Mais en plus, pourquoi ?

Que tous les Hermès aient été mutilés impliquait bien une intention

et l’on ne pouvait accuser de jeunes excités pris de boisson.

Il s’agissait donc bien d’un complot. Mais un complot, pourquoi ?

Et qui sont donc ces Hermocopides ?

Dans cette Athènes si hostile à la tyrannie, on crut la démocratie menacée,

d’autant qu’à cette époque Athènes allait se lancer dans cette formidable

expédition navale vers la Sicile expédition à la tête de laquelle se trouvait

le bel Alcibiade.




On fit alors appel à cette action en justice si redoutable « eisaggélie »

qui permettait à chaque citoyen de dénoncer un homme soupçonné

d’agir contre la démocratie pour instaurer une royauté ou une oligarchie.

Et tout cela tombe bien car justement un homme est associé à ce soupçon : Alcibiade.

Andocide écrit qu’il faut se méfier des citoyens qui s’élèvent trop haut,

car « ce sont ceux-là qui établissent les tyrannies ».




L’ « esisaggélie » demandait aussi de dénoncer tout autre sacrilège.

Et si Alcibiade ne fut en rien inquiété pour la mutilation des Hermès,

on l’accusa d’avoir participé à des cultes étrangers qui parodiaient

les mystères d’Eleusis.

Malgré son désir d’être jugé pour se voir lavé de telles accusations

avant de s’embarquer dans cette expédition navale,

Alcibiade n’obtint pas satisfaction et partit vers ce qui devait être

un des plus grands désastres militaires qu’Athènes ait jamais connu.



Sources : W. K. C. Guthrie Les Grecs et leurs dieux (Payot 1956)
Jacqueline de Romilly, Alcibiade (Texto, 1995)

Bernard Bouisset Samedi 7 Mai 2016