« Un policier était sur le point de tirer sur nous », témoignage des militants arrêtés à Laṛevɛa n At Iraten

16/06/2016 15:37

LAREVⵉA N AT IRATEN (SIWEL) — Ils étaient 6 militants du MAK à avoir été arrêtés le soir du 14 Juin, alors qu’ils s’apprêtaient à tenir un meeting pour célébrer la Journée de la Nation Kabyle. Les 6 militants ont passé une heure entre les mains de la police coloniale algérienne. La violence des coups et des insultes leur a fait craindre le pire, particulièrement lorsqu’un policier, hors de lui, a pointé son arme sur eux. Siwel a pris contact avec deux d’entre eux pour recueillir leur témoignage :


Dans le cadre de la célébration de la journée de la Nation Kabyle, un meeting de la confédération du MAK At Yiraten devait avoir lieu le 14 juin au niveau de « la place des martyrs du printemps noir » de Laṛevɛa N At Iraten suivi du lever du Drapeau National Kabyle.

La police a provoqué les militants du MAK malgré l’annulation du meeting :

La direction de la culture de Tizi Wezzu et l’APC de Laṛevɛa n At Iraten ont " programmé" un gala le même soir et au même endroit que celui prévu pour le meeting du MAK. Sachant que la ville a été encerclée par la police coloniale algérienne, la confédération du MAK d’At Yiraten a décidé de reporter le meeting pour le lendemain pour éviter toute provocation de la part de la police algérienne.

Après annulation du meeting, les militants ont appris que quatre citoyens d’At Ghuvri, munis de drapeaux nationaux kabyles et se dirigeaient vers l’endroit où devait avoir lieu le rassemblement, ont été arrêtés par la police coloniale algérienne.

Ceci a suscité la mobilisation des militants et des citoyens présents en ville. Les quatre militants arrêtés ont été relâchés et au même moment des militants de Michelet sont arrivés sur les lieux. Le président de la Confédération du MAK At Yiraten a alors pris la parole pour expliquer ce qu’est le 14 Juin pour la Kabylie. A la fin de son discours, ils ont décidé d'effectuer le lever du drapeau kabyle et de maintenir l’action. Et c’est là que plusieurs dizaines de policiers algériens, en tenue et en civil, sont intervenus et les ont attaqués « comme des chiens enragés » d’après l’un des détenus.

6 militants arrêtés par une police pire que « des chiens enragés »

« A ce moment, devant la déferlante policière, tout le monde a pris la fuite et moi je suis allé récupérer l’enceinte sonore rapidement et c’est là qu’ils m’ont arrêté. J’ai quand-même eu le temps de passer l’enceinte à un autre militant qui a réussi à s’enfuir », rapporte un des détenus.

Il continue : « Quatre policiers m’ont mis par terre et m’ont immobilisé. J’ai essayé de me débattre mais d’autres policiers sont arrivés en renfort. J’ai reçu une nuée de coups de matraque et plusieurs décharges électriques. Ils m’ont ensuite conduit à un coin noir devant l’entrée du local de police qui se trouve juste à côté de la Stèle des martyrs du printemps noir. C’est là qu’ils ont rassemblé les 6 militants arrêtés ». C’est ainsi que Yuva D., Mouloud S., Akli D., Mohand S., Khellaf A.-C. et Hocine O. se sont retrouvés entre les mains de la police.

Coups de pieds, matraques, décharges électriques, insultes et crachats

« Ils nous ont isolés dans un coin noir devant l’entrée du local de la police et nous ont fait allonger sur le ventre, les mains derrière la tête, et ils nous frappaient de partout et sans pitié », témoigne un autre détenu. Il continue : « ensuite ils nous ont fait entrer dans leur local et nous ont mis au fond d’un couloir, où on était serrés. Ils ont continué à nous frapper, à nous insulter et à nous cracher dessus ». Les insultes en arabe étaient entre autres « Wlad qḥab » et « Nik yemmakum ». « Les menottes ont failli me couper les mains, je ne pouvais même pas me couvrir face aux coups de la police ».

Mobilisation à l’extérieur pour exiger la libération des 6 militants arrêtés :

Pendant ce moment interminable face à la violence de la police coloniale, des dizaines de militants et de citoyens inquiets du sort de leurs concitoyens ne se sont pas laissé faire devant une police qui cherchait à arrêter encore d’autres personnes : « Pendant toute notre arrestation, nous avons entendus les émeutes et les citoyens qui exigeaient notre sortie » témoigne un détenu.

Face à la mobilisation grandissante, la police a arrêté de frapper les détenus et a décidé de les relâcher. « Le commissaire a hurlé sur les agents à un moment : Vite sinon les manifestants vont casser nos voitures » témoigne un détenu.

Un policier kabyle a empêché son collègue, en colère, de tirer sur les militants arrêtés :

Mais c’est là que le pire allait se produire, si ce n’était l’intervention d’un policier kabyle pour empêcher son collègue de tirer sur les militants :
« Après avoir donné nos coordonnées, on attendait nos téléphones pour enfin sortir. Un policier est arrivé à ce moment-là. Il avait du sang sur ses vêtements. Il s’est mis à 2 mètres derrière nous pour recevoir des soins. Et c’est là qu’il nous a vus et a tout de suite sorti son pistolet. Il l’a pointé sur nous et a manœuvré en même temps. Tout le monde a paniqué. C’est un policier kabyle qui se trouvait derrière lui qui l'a maitrisé et lui a enlevé son arme. Le policier en colère a, à ce moment-là, sauté sur Mouloud et l’a agressé sauvagement »

Témoignage sur Radio Canut

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SIWEL 161557 JUN 16



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