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Qui est Larbi Yahioun, le militant du MAK arrêté 2 fois en une semaine?

17/12/2016 - 01:35

ENQUÊTE (SIWEL) — Larbi Yahioun a été arrêté à deux reprises par la police algérienne cette semaine. Le 10 décembre à Vgayet, lors de la Journée internationale des droits de l’homme, et ce vendredi 16 décembre à Tizi Wezzu, alors qu’il était en route vers Boghni, dans le cadre d’une réunion de cadres et militants du MAK. Nous nous sommes alors intéressés à Larbi Yahioun. Qui est-il ?


Larbi Yahioun est, pour commencer, un enseignant dans un collège (CEM) à Akbou, un enseignant de la langue kabyle depuis 5 ans. C’est son gagne-pain.

Larbi Yahioun est aussi un écrivain. Il a publié quatre livres en kabyle : un recueil de poésie, une pièce de théâtre, un guide scolaire et enfin un essai. Voici les titres dans l’ordre : Tayri n umedyaz (2014), Lewsaya n baba (2015), Abrid ar ukayad n Tmaziɣt (2015) et Taqbaylit, Iles d yidles (2016).

Nous nous sommes rendus sur son compte Facebook. Il a beaucoup de photos, à côté des enfants à l’école et au théâtre, entouré de livres dans le siège d’une association, en compagnie d’artistes, d’universitaires, de chercheurs, de femmes et d’hommes de lettres. En fait, Larbi Yahioun est aussi le Président de l’association Tigemmi. C’est l’association de son village, Tifrit, qui est aussi le village de feu Mohamed Haroun. Une association culturelle qui célèbre nos évènements, organise des conférences, mais qui est surtout connue pour sa troupe de théâtre.

Puis nous avons été interpellés par une photo de lui devant un cabinet de consultation psychologique. A-t-il des problèmes psychiques ? Non. En fait, Larbi Yahioun intervient également comme psychologue assistant en développement personnel dans une association humanitaire d’aide aux malades et aux nécessiteux. Une association attachée à l’hôpital d’Akbou.

Larbi Yahioun est donc enseignant de la langue kabyle, écrivain, président d’association et psychologue assistant au sein d’une association humanitaire. Rien qui justifie ses deux arrestations.

Le tort de notre intéressé est qu’il est aussi militant pour l’indépendance de la Kabylie. Et cela lui a valu d’être traité comme un criminel, aujourd’hui, dans le commissariat colonial de Boghni. La police scientifique, au sous-sol, l’a passé au peigne fin : prise des empreintes et des photos dans tous les sens, entre autres. Une procédure qui a pris près d’une heure et qui a fait dire à Larbi Yahioun que si cette police faisait la même procédure à tous les voyous et autres dealers, le banditisme n’en serait pas là où il est aujourd’hui.

Puis le chef de la police a remarqué un tatouage sur le bras de Larbi Yahioun. Un tatouage en Tifinagh. C’est le prénom d’une fille. Une petite folie d’adolescent à l’époque du lycée. Sauf que ce chef, arabe, ne le voyait pas de cet œil. Il était persuadé d’y voir trois points et que ces trois points sont un symbole pour dire « je suis un hors la loi » !

Larbi Yahioun, armé de son calme et de son sens de pédagogie, a essayé de discuter avec ce policier avant de comprendre que c’était peine perdue. Il a alors poussé un coup de gueule.

Plus tard, la police l’a convoqué à un interrogatoire. Il avait en face de lui deux policiers arabes et sur un bureau étaient posés, non pas des lingots d’or ni des sacs de drogue, mais 40 livres dont il est l’auteur (Taqbaylit, Iles d Yedles). Ils étaient à destination d’un libraire.

Ce livre a été le principal sujet de l’interrogatoire. Et pourtant, les policiers, arabophones, ne pouvaient pas comprendre ce qui y était écrit. Et même si c’était le cas, il s’agissait, de toute façon, d’une étude sur la langue, la littérature et l’histoire de la Kabylie. Rien de criminel.

Sauf que Larbi Yahioun a consacré une page au Président de l’Anavad, Ferhat Mehenni. Les policiers le savaient, car il y avait sa photo.
Le chef de la police a essayé de lui faire signer la confiscation de ses 40 exemplaires. Larbi yahioun a refusé et expliqué qu’il a eu l’autorisation de l’ONDA, qui lui a délivré une carte d’auteur, et que le livre a un numéro de dépôt légal.

Le chef de police insistait en disant que c’était « Normal » cette confiscation. Larbi Yahioun s’est mis en colère et a dit en substance : « vous arrêtez un enseignant, un écrivain et vous lui confisquez ses livres et vous dites que c’est normal. Vous méritez d’être jugés pour cela ! ».
Larbi Yahioun n’a pas signé le document, mais est reparti sans les 40 livres.

Mulud At Ɛazdin
SIWEL 170135 DEC 16



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