"Officiellement" Tamazight est nationale et officielle au Maroc ( PH/Amazighworld)
Ayour doit bien illuminer les nuits obscures de certains agents de l’état civil. «Mon prénom amazigh est bien Ayour, et je suis prêt à résister dix autres années pour vous convaincre que je porte un prénom marocain». C’est, semble-t-il, le message essentiel d’Ayour et de sa famille au ministre de l’Intérieur.
Ils ont un très fort tempérament puisqu’ils refusent de choisir la voie de la facilité.
Recourir à la justice pour recouvrer leurs droits ne leur a jamais effleuré l’esprit même si le temps imparti à l’enregistrement de leur enfant sur les registres de l’état civil est légalement fini. A l’illégalité de la décision prise par les préposés à l’état civil, ils opposent une fin de non-recevoir. Le déni de justice commis à leur encontre vaut bien un arrangement de l’Intérieur avec la loi. Le cas d’Ayour à Outat El Haj doit servir d’exemple.
«Ayour», tout le monde l’appelle ainsi chez lui, dans son quartier comme à l’école. Né en 2004, cet enfant poursuit ses études comme tous ses camarades. Mais, à 10 ans, il fait toujours exception. Il est l’un des rares Marocains à ne pas avoir de prénom sur ses documents administratifs. Un acte de naissance, tout comme un certificat scolaire délivré des services de la délégation de Boulemane, obtenus juste à la mi-janvier 2015, ne contiennent que le nom de famille de l’élève «Ayour» qui veut dire en amazigh «Lune».
Alors que le ministre de l’Intérieur déclare, à tout moment, que le problème des prénoms amazighs est révolu et appartient par conséquent au passé, l’on relève de temps à autre des agissements de certains agents de l’état civil qui sortent de la sphère des déclarations ambiantes du ministre. La société civile s’est vite saisie de l’affaire. La Fédération nationale des associations amazighes n’entend pas lâcher prise. Dans un communiqué rendu public à l’occasion, cette structure, forte d’une cinquantaine d’associations actives dans toutes les régions du pays, veut taper fort.
La FNAA a ainsi adressé une plainte respectivement au comité de lutte contre toutes les discriminations raciales à Genève, au chef du gouvernement et aux ministres de l’Intérieur et de la Justice et des Libertés publiques.
Le gouvernement devrait honorer ses engagements stipulés dans la déclaration gouvernementale de 2012, et à travers lesquels il entend garantir les libertés et droits, et la mise en œuvre de la circulaire du ministre de l’Intérieur publiée sous numéro 3220 le 9 avril 2010.
« Il n’est plus admissible qu’un enfant vive dans son pays et de celui de ses ancêtres sans statut juridique clair, privé de son prénom et de son identité », indique sur un ton de colère Ahmed Arehmouch, président de la FNAA.
La Haute commission de l’état civil, présidée par Abdelhak Lamrini, avait reconnu l’année dernière «la liberté du citoyen de choisir le prénom de son enfant, à condition qu'il n'attente pas à la morale ni à l'ordre public, sans distinction aucune entre les prénoms arabe, amazigh, hassani et hébraïque, et ce conformément aux dispositions de la loi relative à l'état civil ».
Au Maroc même, plusieurs enfants s’appellent Ayour, Numidia, Titrit, Illi, Anarouz, Itri, Tifyour, Annir … ce qui force les autorités compétentes à trancher sur ce sujet de manière définitive, afin de garantir le statut juridique de tous les citoyens et de renforcer la symbiose d’un Maroc que tout le monde dit pluriel.
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