Syrie: la région d'Idleb, ultime grand bastion jihadiste et rebelle

Mercredi 29 Janvier 2020

Beyrouth - La région d'Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, théâtre de bombardements des forces de Bachar al-Assad et de son allié russe, est dominée par les jihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-branche syrienne d'Al-Qaïda).

Composée d'une grande partie de la province éponyme et de segments des provinces voisines d'Alep et de Lattaquié, elle abrite aussi d'autres groupuscules jihadistes et rebelles.

Quelque trois millions de personnes, dont la moitié déplacées d'autres régions reconquises par Damas, vivent dans cette région.

La province d'Idleb a une importance stratégique, étant proche de la frontière avec la Turquie, qui soutient certains groupes rebelles, mais aussi de la province côtière de Lattaquié, fief du clan du président Assad.

Avant la guerre déclenchée en 2011, la majorité de ses habitants travaillaient dans l'agriculture (coton et céréales), ou à Alep, à une soixantaine de kilomètres.

En mars 2015, l'Armée de la Conquête, coalition de groupes rebelles islamistes et jihadistes comme le Front al-Nosra (ex-branche syrienne d'Al-Qaïda, rebaptisé Fateh al-Cham), s'empare de la ville d'Idleb.

La province va être la cible répétée de raids meurtriers de l'aviation syrienne et celle de son allié russe, engagé dans le conflit depuis septembre 2015.

En janvier 2018, des affrontements opposent les jihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTS), dominés par Fateh al-Cham, aux combattants du Front national de libération (FNL), coalition rebelle regroupant des factions soutenues par Ankara.

HTS enchaîne les gains territoriaux, à coups d'offensives meurtrières et d'accords négociés, laissant en déroute le FNL. Il met en place une administration locale, baptisée "Gouvernement du salut".

En janvier 2019, HTS renforce son emprise sur Idleb, en imposant son contrôle administratif sur toute la province, ainsi que sur des territoires adjacents dans les provinces d'Alep, de Hama et de Lattaquié.

La province d'Idleb est l'une des quatre zones de "désescalade" établies en 2017 pour faire baisser les violences, après des accords entre Moscou, Téhéran, alliés du régime, et Ankara.

Mais fin 2017, les prorégime, appuyés par l'aviation russe, lancent une opération à la périphérie de la province. Plusieurs semaines de combats meurtriers permettent au régime de prendre quelque 400 localités, ainsi que l'aéroport militaire d'Abou Douhour.

En juillet 2018, Bachar al-Assad déclare: "Idleb est désormais notre but". La province est bombardée pendant deux mois par les forces syriennes et russes.

Le 29 janvier 2020, les forces du régime annoncent la reconquête de la ville stratégique de Maaret al-Noomane qui se trouve sur l'autoroute M5 reliant Alep, grande métropole du nord, à la capitale Damas.

En septembre 2018, Ankara et Moscou se mettent d'accord pour créer une "zone démilitarisée" à Idleb, qui doit servir de tampon entre territoires insurgés et ceux tenus par le régime tout autour.

Mais l'accord n'est que partiellement respecté, les jihadistes refusant de se retirer.

Entre fin avril et fin août 2019, l'armée syrienne, soutenue par l'aviation russe, mène une offensive d'envergure dans la région, tuant un millier de civils selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et déplaçant 400.000 personnes d'après l'ONU.

Et en dépit d'un cessez-le-feu annoncé fin août, les bombardements et combats au sol se poursuivent depuis la mi-décembre.

Damas a été accusé maintes fois de recourir à des armes chimiques dans la province.

En 2016, une commission de l'ONU et de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) conclut que des hélicoptères militaires syriens ont répandu du chlore sur deux localités, à Talmenes (2014) et Sarmine (2015). Elle accuse le régime d'une attaque à l'arme chimique, sans doute du chlore, à Qmenas, en 2015.

Le 4 avril 2017, une attaque au gaz sarin à Khan Cheikhoun fait plus de 80 morts dont plus de 30 enfants selon l'OSDH. Les experts de l'OIAC et de l'ONU ont confirmé que du gaz sarin avait été utilisé et que le régime, qui a démenti, est responsable.

AFP