Revue de presse quotidienne internationale européenne du 02/06/2018

Samedi 2 Juin 2018

Bruxelles - Les journaux européens ont consacré samedi de larges commentaires et analyses au succès de la motion de censure contre le gouvernement de Mariano Rajoy, ayant pour conséquence l’accès du secrétaire général du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), Pedro Sanchez, à la présidence de l’exécutif espagnol, à l'arrivée des populistes au pouvoir en Italie et à la guerre commerciale entre l'UE et les Etats-Unis après la décision américaine d'imposer des taxes sur les importations d'acier et d'aluminium en provenance du bloc communautaire.

«Sanchez, président», titre «El Pais», indiquant que le leader socialiste prêtera serment ce samedi en tant que nouveau président du gouvernement devant le roi Felipe VI d’Espagne, et disposera de seulement quelques jours pour former son exécutif.

De leur côté, les dirigeants du Parti Populaire (PP) de Mariano Rajoy demandent l’organisation d’un congrès extraordinaire pour analyser la situation et introduire les changements nécessaires pour affronter cette nouvelle étape, rapporte le journal.

«El Mundo» affirme, pour sa part, que Sanchez a l’intention d’ignorer la main tendue du parti de gauche radicale Podemos, qui a voté en faveur de la motion de censure déposée par les socialistes, et envisage de former un gouvernement constitué exclusivement de figures du PSOE.

Devant cette perspective, Podemos a averti qu’il se placera du côté de l’opposition, à moins que Sanchez l’invite à participer au gouvernement, note le quotidien.

«La Razon» écrit, quant à lui, qu’avant de former son gouvernement, Sanchez se voit confronté aux premières difficultés, puisque plusieurs partis parmi les formations ayant soutenu la motion de censure ont affirmé vouloir amender le projet de budget 2018, alors que le PSOE avait promis au Parti national basque (PNV), attaché à ce projet de budget, de ne pas toucher à ce texte pour s’assurer le soutien du PNV à la motion de censure.

"Définitivement validée vendredi en fin de matinée par le vote de la motion de censure présentée par les socialistes – 180 voix pour, 169 contre, une abstention –, la chute du conservateur Mariano Rajoy après sept ans au poste de Premier ministre ouvre une nouvelle étape politique. Celle-ci s'annonce d’ores et déjà complexe" écrit, pour sa part, le journal belge Le Soir. 

Le quotidien passe en revue les défis auxquels doit faire le secrétaire général du parti socialiste (PSOE) Pedro Sanchez, qui sera investi chef du gouvernement à la mi-journée par le Roi Felipe, notant qu'"au Congrès des Députés de Madrid, les socialistes n'ont que 84 députés. Loin, très loin de la majorité absolue établie à 176 des 350 parlementaires". 

"S’ils sont parvenus à obtenir un large soutien à leur motion de censure, celui-ci doit plus au rejet suscité par Mariano Rajoy et les scandales de corruption de son Parti populaire (PP) qu’à un soutien convaincu à Pedro Sanchez", relève la publication.

Autre défi pour Sanchez, la gestion de la crise catalane, ajoute Le Soir pour lequel le nouveau chef de gouvernement espagnol sera "attendu au tournant par conservateurs et centristes", qui ne manqueront pas "d'interpréter toute concession sur le sujet comme un signe de faiblesse".

Sur le même sujet, L’Écho estime qu'"il est très difficile de savoir si Sanchez pourra tenir bon, ses alliés pouvant lui retirer leur soutien à n'importe quel moment".

Sanchez devra également faire face aux centristes de Ciudadanos, furieux de s'être fait voler la vedette alors que les sondages leur donnaient d'excellents résultats, et bien sûr l'opposition extrêmement dure du Parti Populaire, ajoute le journal.

La question catalane sera l'un des premiers sujets que devra aborder le nouveau Premier ministre, poursuit la publication, notant que Sanchez, qui a soutenu la mise sous tutelle de la région, a déclaré être "ouvert au dialogue" avec les nationalistes qui ont voté pour lui, ceux qui se disent toujours prêts à former une république indépendante. 

La Libre Belgique dresse, pour sa part, le portrait de Pedro Sanchez, "battu lors des deux dernières élections puis évincé de son parti avant d'en reprendre les commandes et de réussir vendredi son dernier coup de poker pour se hisser au pouvoir en Espagne".

S'étant rapproché du Premier ministre Rajoy ces derniers mois sur la question de l’indépendance de la Catalogne, Pedro Sanchez "restera désormais pour le PP comme le tombeur d’un chef du gouvernement qui avait survécu à de nombreuses crises", relève le journal.

Et d'ajouter que "Sanchez arrive à la tête d’un gouvernement difficilement contrôlable, il le sait et il espère faire passer rapidement des mesures sociales qui lui permettront de se positionner dans la perspective des prochaines législatives qui pourraient arriver plus rapidement que prévu".

Au Portugal, Diario de Noticias écrit que le plus facile pour Pedro Sánchez a peut-être même été d’arriver au pouvoir, mais gouverner quand on a à peine 84 sur 350 députés cela s’avère plus difficile. 

Le soutien à la motion de censure contre Mariano Rajoy ne s’est pas traduit automatiquement par un soutien au Congrès, fait observer le quotidien, ajoutant que le nouveau Premier ministre espagnol, qui va prêter serment samedi devra s’attendre à des défis qui viendront non seulement de la droite mais aussi de la gauche.

Contrairement au cas du Portugal, où un accord gouvernemental garantit un soutien parlementaire au Parti socialiste, en Espagne, les voix d’Unidos Podemos, des indépendantistes catalans ou des nationalistes basques visaient juste à évincer Rajoy, a noté la publication.

Jornal de Noticias rapporte que le président américain Donald Trump a annoncé vendredi que le sommet Etats-Unis-Corée du Nord, qui a été annulé la semaine dernière, aura lieu à l'heure et au lieu déjà prévus, le 12 juin à Singapour, notant que cette annonce fait suite à une rencontre entre Trump et le "numéro deux" de la Corée du Nord à la Maison Blanche.

En même temps, les deux Corées ont convenu de reprendre les pourparlers militaires à partir du 14 juin, le premier du genre depuis quatre ans, selon le ministère de l'Unification, poursuit le journal.

En Italie, les journaux commentent la première réunion vendredi du gouvernement formé par Giuseppe Conte.

Le Corriere Della Sera écrit que le nouveau chef du gouvernement a rencontré son prédécesseur Paolo Gentiloni qui lui a remis un dossier de 33 pages portant sur les dossiers en suspens et les réalisations de précédent exécutif. Parmi les dossiers d'urgence pour M. Conte, celle de la compagnie Alitalia qui a été placée en redressement judiciaire, relève le quotidien, ajoutant que le Premier ministre doit se pencher au plus vite sur cette question épineuse après le vote de confiance. La Stampa estime que le premier test pour Giuseppe Conte sera sa participation à la prochaine réunion au sommet du G7 prévu le 8 juin au Québec, puis à la réunion du Conseil européen. Il s'agit de deux évènements lors desquels le chef de l'exécutif italien va chercher à nouer des alliances en Europe, indique la publication.

Pour la República, le gouvernement du "changement" promet de défendre certains intérêts individuels et en même temps tourne le dos aux intérêts collectifs, d'autant plus qu'il a alimenté des attentes chez les chômeurs, les retraités et tous ceux qui s’attendent à une baisse des impôts.

Le journal critique certains ministres novices en politiques, estimant qu'"après la fin du mois de miel, ceux-ci devraient sans doute se heurter à une réalité amère faite d'improvisation et d'arrogance". 

«En Italie, les antisystème à l'épreuve du pouvoir», titre, pour sa part, le journal français Le Figaro qui indique que le juriste, Giuseppe Conte, a pris la tête du gouvernement associant le parti d'extrême droite la Ligue aux populistes du M5S.

Sixième président du Conseil de la République italienne qui ne soit pas parlementaire - ce qui a suscité la «perplexité» du chef de l'État -, Giuseppe Conte (54 ans), présenté par le M5S, sera un locataire du Palais Chigi (le Matignon italien) sous étroite surveillance, ajoute la publication, notant qu’il sera flanqué des deux leaders de la coalition avec rang de vice-présidents, Matteo Salvini (45 ans) à l'Intérieur, Luigi Di Maio (31 ans) au super-ministère du Développement économique, du Travail et des Politiques sociales.

Après plusieurs rebondissements, l'annonce de la naissance du gouvernement " gialloverde " (" jaune et vert ", les couleurs symboliques des Cinq étoiles et de la Ligue) sonnerait presque comme une nouvelle rassurante, alors que voilà quelques jours elle semblait de nature à semer l'effroi dans toute l'Europe et que le chef de la Ligue, Matteo Salvini, prend le ministère de l'intérieur pour mettre en place un programme très dur sur l'immigration, écrit Le Monde, ajoutant que les bases politiques de ce gouvernement, ainsi que le " contrat " censé servir de boussole de son action, restent les mêmes. 

En revanche, les réserves présidentielles ont été écoutées. Le très anti-allemand Paolo Savona, naguère pressenti pour le ministère de l'économie et des finances – ce qui avait fait capoter la première tentative de Giuseppe Conte –, figure bien dans l'équipe gouvernementale, mais à un autre poste, stratégique mais moins exposé : celui des affaires européennes, fait observer le quotidien.

Par ailleurs, Libération indique que xénophobe, antiavortement, anti-Europe, le nouveau ministre de l’Intérieur italien est un pur et dur de l’extrême droite.

Il est l’homme fort de ce gouvernement populiste formé avec le Mouvement Cinq Etoiles (M5S) de Luigi Di Maio et est porté par les derniers sondages qui donnent à la Ligue plus de 25 % des intentions de vote, poursuit le quotidien.

Les quotidiens suisses s'intéressent, quant à eux, à la guerre commerciale entre l'UE et les Etats-Unis après la décision américaine d'imposer des taxes sur les importations d'acier et d'aluminium en provenance du bloc communautaire.

Sous le titre "Bruxelles riposte mollement à Washington", Le Temps écrit que les Européens ont les moyens de riposter aux attaques commerciales américaines, mais des doutes subsistent sur leurs véritables intentions. "La bataille en effet est inégale, même si les négociations commerciales sont une compétence indiscutée de la Commission", relève le journal, notant qu'il y a toujours un risque de divergence entre Bruxelles et les 27 autres capitales en ces temps de fièvre souverainiste et d’europhobie croissante.

"Face aux USA, l'Europe et le Canada ripostent", titre la Tribune de Genève qui souligne que la première riposte des Européennes depuis le début du bras de fer avec Washington a été suivie par le Canada. "Le président Donald Trump aura crispé un peu plus ses partenaires commerciaux en suggérant des accords séparés avec Ottawa et Mexico pour remplacer le traité de libre-échange nord-américain (Aléna)", ajoute la publication.

Le 24Heures rapporte de son côté les propos sévères du Premier ministre canadien Justin Trudeau qui n'a pas l'intention de rester les bras croisés devant les démarches américaines qu'il considère comme "mauvaises pour l'économie mondiale". 

MAP