Revue de la presse quotidienne internationale maghrébine du 31/08/2021

Mardi 31 Août 2021

​Tunis - Les derniers développements politiques en Tunisie, la polémique en Algérie autour de l'enseignement de la langue amazighe et la situation sécuritaire au Sahel sont les principaux sujets abordés mardi par la presse maghrébine.


Dans son éditorial intitulé "Les cadavres toujours dans les placards !", "Le Temps" écrit que depuis près d'un mois et demi, le métabolisme du pays est suspendu aux mouvements des lèvres du Président Kaïs Saïed, à ses décisions souveraines parce que sanctifiées par la Constitution, à ses visites inopinées et au pari qu'il s'est assigné de purifier le pays.

Selon l’éditorialiste, le chef de l’Etat tunisien avait bien averti ses détracteurs qu'un jour il lancerait "ses missiles". Il rappelle qu’ils ne l'ont pas pris au sérieux, mais voilà qu'il largue ses bombes sur leurs têtes.

"Véritable cataclysme politique, le 25 juillet prend aussi une autre tournure", note-t-il, expliquant que c'est que cette situation d'exception génère une lourde expectative et tend même à paralyser les institutions de l'Etat, cet Etat au nom duquel Kaïs Saïed a osé renverser l'establishment pourri.

"S'il est vrai qu'il ne sera jamais question de retour en arrière, mais il est tout aussi vrai que le temps nous est compté", commente-t-il, faisant remarquer que partout, on commence en effet à s'impatienter.

Il soutient que des hommes d'affaires (propres) qui scrutent l'avenir, ne sachant trop comment se comporter dans cette situation singulière de ni guerre, ni paix, ajoutant qu’"ainsi de nos partenaires traditionnels qui veulent voir plus clair. Ainsi encore de nos Organisations nationales, désormais plongées dans une léthargie forcée, alors qu'elles incarnent toute la dynamique socioéconomique".

"Nous ne pensons pas qu'un homme imbu de valeurs patriotiques tel Kaïs Saïed, prenne goût à se mettre en scène. Il n'est cependant pas sans connaître les humeurs changeantes d'un peuple, un peuple autant capable de glorification que de déni pur et simple", poursuit le journal.

"Sans doute, le Président est-il dans sa logique. Dans son sacerdoce. Il ira jusqu'au bout, le temps que cela prendra, mais quelque part, on attend de lui davantage de transparence dans ce qu'il projette pour rétablir les réquisits de l'Etat", insiste-t-il.

Pour sa part, "Le Quotidien" relève que l'arrestation de l’ancien candidat à la présidentielle Nabil Karoui et de son frère Ghazi en Algérie, cachés dans un appartement à Tébessa, fait encore une fois parler des décisions d'interdiction de voyage décidées par le ministère de l'Intérieur.

Alors que des voix s'élèvent pour condamner cette décision qui demeure, pour eux, superflue et floue et sans réel fondement juridique, la fuite des frères Karoui à travers les frontières tuniso-algériennes intervient pour relancer le débat sur l'implication d'un grand nombre de politiciens et d'hommes d'affaires dans des faits en relation avec la corruption, les malversations et d'autres nombreux dérapages, signale-t-il.

On a souvent entendu Nabil Karoui, président du parti "Qalb Tounès" nier toute implication dans ces affaires de corruption économique et politique et clamer son innocence pour aller directement accuser ses adversaires de lui vouloir du mal, rappelle-t-il, se demandant : Comment interpréter, dès lors, l'information de sa fuite illégale en Algérie, où il a déjà des comptes à régler avec la justice de ce pays en compagnie de son frère et de quelques membres de sa famille ? Comment va-t-on parler de présomption d'innocence pour de tels hommes politiques devenus des spécialistes en mensonge, en fourberie et en affabulation à l'image d'un Nabil Karoui qui se présente toujours dans l'habit d'une victime constamment visée par le pouvoir en place.

Il fait savoir qu’il y a seulement quelques jours, Oussama Khelifi, le numéro deux de "Qalb Tounès", actuellement en France depuis le 15 juillet pour préparer la rentrée scolaire de ses enfants, prétendait être en contact direct et quotidien avec le leader du parti Nabil Karoui alors que ce dernier se cachait après avoir franchi illégalement les frontières.

Selon l'éditorialiste, ce sont ces gens-là qui continuent à condamner le recours de Kaïs Saïed à l'interdiction de voyage ou à la résidence surveillée alors qu'il est de plus en plus évident que ceux qui se sentent coupables et ceux qui ont peur de voir la justice se saisir de leurs dossiers essaient par tous les moyens de dénoncer ces procédures décidées dans un contexte exceptionnel, de prétendre être "propres" tout en cherchant à quitter le pays par tous les moyens.

Il souligne que certes, le droit de voyage est incontestable, mais dans une situation exceptionnelle comme celle de la Tunisie, d'autres priorités sécuritaires et judiciaires doivent primer pour le bien du pays et pour empêcher ceux qui ont commis des délits de déguerpir et de disparaître de la circulation.

Il estime qu’il ne s'agit pas uniquement des frères Karoui car les "prétendants" au voyage pour fuir la justice sont beaucoup plus nombreux et l'autorité en place ne doit pas lésiner sur les moyens pour empêcher ces fuyards en sursis d'aller au bout de leurs intentions.

L'heure des comptes a sonné et il faut laisser la justice jouer son rôle convenablement pour pouvoir passer, le plus tôt possible, aux étapes suivantes, qui nécessiteront beaucoup de travail dans un contexte plus avantageux afin de pouvoir relever les prochains défis, ajoute-t-il.

En Algérie, "Liberté" souligne qu’en décidant de confiner l’enseignement de la langue amazighe dans l’angle mort du facultatif sous le fallacieux prétexte de la crise sanitaire, les responsables du ministère algérien de l’Education nationale commettent une double faute politique et pédagogique.

Il estime que l’exclusion de l’enseignement de la langue amazighe du calendrier officiel traduit le peu d’intérêt accordé à cet élément constitutif de l’école algérienne, ajoutant que c’est loin d’être une maladresse, la décision révèle l’insupportable mépris à l’égard de cette langue pourtant gravée dans le marbre de la Constitution au terme d’un long combat mené par plusieurs générations.

Outre son caractère arbitraire, cette mesure est prise dans un contexte politique inflammable qui peut bien alimenter la tension sociale, met-il en garde, notant que si elle arrange les adversaires historiques de la culture amazighe, la démarche du ministère de l’Education est perçue comme une provocation, une "provocation de trop".

"Elle est de nature à nourrir dangereusement une nouvelle et inutile polémique, alors que le pays peine à recoller ses morceaux. Elle peut facilement rallumer la guerre des langues", avertit l’auteur de l’article.

Il soutient que d’évidence, cette nouvelle agression anti-pédagogique et anticonstitutionnelle rappelle combien étaient légitimes les inquiétudes des millions d’Algériens quant à la sérieuse volonté de promouvoir cette langue-mère.

Malgré son introduction - à dose homéopathique et à marche forcée - dans la loi fondamentale, tamazight jouit toujours d’un statut mineur, regrette-t-il, précisant que tout est fait pour la maintenir dans une précarité académique.

Selon lui, l’interminable ajournement de l’installation de l’Académie algérienne de la langue amazighe, prévue par la Constitution, en est la preuve éclatante.

"Victime d’un apartheid linguistique depuis l’indépendance nationale, le fait amazigh a fini par triompher", fait-il observer, relevant qu’au prix d’immenses sacrifices, les Algériens dans leur majorité ont également fini par accepter cette réalité identitaire et l’assument sans aucun complexe.

Fief du conservatisme réactionnaire, l’Education nationale a depuis toujours été réfractaire à toute ouverture linguistique et plus généralement à l’ouverture sur l’universel, dénonce-t-il.

En Mauritanie, la presse locale revient sur les mises en garde des autorités françaises qui ont reclassé en zone rouge les zones frontalières du Mali dans lesquelles il est déconseillé aux Français de se rendre.

D’après les mêmes sources, le ministère français des Affaires étrangères a classé l'ensemble des wilayas du Hodh Charghi et du Guidimakha et une grande partie des celles du Hodh Gharbi, du Tagant, de l'Adrar et de Tiris Zemmour, en zones rouges en raison de l'activité croissante des groupes djihadistes, notamment Al-Qaida et l'Etat Islamique au Mali ainsi que des craintes que leurs éléments ne s'infiltrent dans le territoire mauritanien.

Ils relèvent que le ministère français des Affaires étrangères ne s'est pas seulement contenté de ces mises en garde, mais il a au contraire ajouté, une ceinture orange qui comprend des zones du Tagant et du Gorgol.

La note publiée sur le site du ministère français des Affaires étrangères a évoqué par ailleurs les risques non liés au "terrorisme" auxquels sont confrontés les Français, dont la sécurité routière, eu égard à l'état des routes et du comportement des conducteurs, ainsi que des déviations et des actes de délinquance, soulignant toutefois un niveau de criminalité à Nouakchott inférieur à ceux enregistré au niveau d'autres villes du monde, ajoutent les mêmes sources.

MAP