Quelques soubassements de la qualité des relations maroco-sénégalaises

Vendredi 15 Mars 2013

Le roi du Maroc est « Amir Al Mouminin », c’est à dire commandeur des croyants. Cette qualité, qui lui est expressément dévolue par le texte constitutionnel de 2011, est inhérente à l’inscription du corpus juridique marocain dans la tradition sunnite musulmane. Un tel concept est donc hérité du droit public musulman, et permet au roi d’exercer à titre personnel, et par lui-même, les prérogatives religieuses découlant de sa qualité de commandeur des croyants. 

De plus, le roi joue, toujours en conformité avec la Loi fondamentale marocaine de 2011, un rôle primordial dans la conduite de la politique étrangère marocaine. En effet, le roi préside notamment le Conseil des ministres, qui détermine les « (…) orientations stratégiques de la politique de l’Etat ». De même qu’il accrédite les ambassadeurs, signe et ratifie les traités internationaux. De cette manière, le roi, chef de l’Etat marocain, est le représentant suprême de l’Etat et l’institution principale à même de conduire les relations internationales du pays. Le rôle du roi, comme l’a affirmé le ministre délégué auprès du ministre des Affaires étrangères et de la coopération, Youssef Amrani, dans un entretien publié le 1er janvier 2013 dans un quotidien national, est donc de s’assurer que la politique étrangère du royaume soit « (…) assise sur un socle de constantes qui lui confère durabilité et stabilité ».

Ce n’est qu’à l’aune des éléments précités que l’on peut appréhender la visite royale officielle, qui se tiendra à partir du 15 mars 2013 dans trois Etats d’Afrique centrale et de l’Ouest, dont notamment le Sénégal. Cet Etat entretient avec le Maroc d’excellentes relations diplomatiques, puisqu’il soutient en l’occurrence l’intégrité territoriale du royaume ; et économiques, puisque le Maroc s’y est notamment révélé être un partenaire privilégié, en termes de soutien à l’investissement. Mais les relations bilatérales entre les deux Etats sont en phase de s’intensifier davantage, aussi bien du point de vue diplomatique qu’économique. Ainsi, à titre d’exemple, les deux Etats ont fixé une série d’objectifs clairement délimités, esquissant ainsi une stratégie de partenariat économique à moyen et à long terme, bénéfique pour les deux parties.

Mais même si les relations maroco-sénégalaises existantes, ainsi que celles en développement, sont essentiellement de nature économique et financière, leur qualité et leur intensité sont principalement sous-tendues par des considérations religieuses. En effet, c’est dans la ville de Fès, considérée comme la capitale spirituelle du royaume, que repose le Cheikh Ahmet Tidiane Cherif, fondateur de la confrérie Tijânyya, dont 55% des sénégalais sont adeptes. De plus, les liens spirituels unissant le Maroc au Sénégal ont été immortalisés avec la construction, par des marocains, de la Grande mosquée de Dakar, inaugurée en 1964 en présence du défunt roi Hassan II. Ici encore, la présence du chef de l’Etat marocain renseigne sur l’importance d’un tel événement pour les deux parties et sur la proximité du commandeur des croyants avec les dirigeants de la confrérie susmentionnée. De cette manière, au-delà de l’aspect uniquement institutionnel, il apparaît que l’excellence des relations maroco-sénégalaises se fonde aussi sur l’amitié personnelle et les liens spirituels qui lient les grandes figures religieuses des deux Etats.

Ainsi, les principaux acteurs politiques institutionnels, de même que les agents économiques publics comme privés, Marocains et Sénégalais, bénéficient des liens étroits qui unissent les deux pays. Ces liens trouvent leurs fondements dans le partage d’une certaine conception de la religion musulmane, moderne, ouverte et tournée vers l’avenir. Le champ spirituel participe donc à la promotion du partenariat multidimensionnel maroco-sénégalais, qualifié de part et d’autre d’exemplaire.

Sofia Marcil
Analyste au Centre d’Etudes Internationales


Sofia Marcil