Les émotions au travail : ‘‘parlons en sans tabou pour en venir à bout’’

Dimanche 25 Février 2018

Joie, tristesse, peur, colère, étonnement, fierté, etc. les émotions font partie intégrante de la vie professionnelle quelque soit le contexte socio-économique et culturel. Elles s’émergent en dehors de notre contrôle et reflètent le degré de névrotisme qui anime les échanges interpersonnels et hiérarchiques qu’entretiennent les dirigeants avec leurs subalternes et collaborateurs.

Les compétences émotionnelles : un objet vif d’acquisition
En psychologie du travail, comme en sciences du management, les émotions constituent une question cruciale qui a suscité un profond débat de nombreux spécialistes et praticiens notamment avec la nouvelle tendance appelée ‘‘intelligence émotionnelle’’ considérée comme l’une des qualités indispensables d’un bon leader. Ce dernier repose sur la conscience et la maîtrise de soi, de ses émotions, ses ressentis et ses sentiments ainsi que le fait d’agir intelligemment face à ceux d’autrui afin de l’investir en intelligence collective favorisant un climat sain et productif.

En cela, cet article tend à sensibiliser les organisations à l’importance de la prise en compte des phénomènes émotionnels qui restent encore peu examinés voire négligés entraînant souvent des coûts cachés. L’employé étant qualifié comme une ressource humaine est avant tout un être humain disposant d’un cerveau composé de trois systèmes : reptilien, néocortex et limbique. Ce dernier est reconnu comme le siège principal des émotions et des pulsions conscientes ou inconscientes, plaisantes ou déplaisantes. Il contient également plusieurs zones de commande telles que l’hypothalamus, l’hippocampe, l’amygdale, le bulbe olfactif, l’hypophyse, le septum, le fornix et une partie du thalamus associés au stockage de la charge énergétique des émotions ainsi qu’à leur régulation.

Émotions et phénomènes affectifs associés
Ajoutons à cela que les émotions sont majoritairement manifestées dans certaines situations incluant d’autres aspects affectifs tels que les sentiments, les motivations, les états d’humeur, les ambitions, les désirs et les prédilections. Dans le même sillage, il est important de savoir distinguer l’antinomie entre les séquences émotionnelles et celles de l’humeur ; l’état émotionnel correspond à la perception de modifications psychophysiologiques immédiates spécifiques survenues face à une situation d’alarme, d’urgence ou de fortes motivations données tandis que l’humeur est définie démantèlement comme une disposition affective intense, durable et généralement située entre les pôles extrêmes du chagrin et de la joie.

De nombreuses situations professionnelles sont susceptibles de produire un tas de vagues de tsunamis émotionnels qui peuvent être source du plaisir ou de souffrance : la réception des témoignages d’appréciation et de reconnaissance ou l’octroi d’une promotion interne ou d’une augmentation salariale entraineraient des sentiments positifs tels que la satisfaction et la fierté. Le départ d’un collègue coéquipier peut nous faire entrer dans un état de tristesse voire de démotivation. Une sage-femme qui assiste au décès subit d’un nourrisson peut sentir une certaine frustration ou une douloureuse culpabilité. Un agent de sécurité qui fait face aux harcèlements moraux des clients peut éprouver de l’humiliation et du dégoût, etc.

Les émotions mal-vécues au travail peuvent-elles générer une perte ?
Face à la croissance du rythme de changements organisationnels et d’innovation technologique, quelques responsables et managers admettent que les émotions se limitent qu’à la vie privée et qu’ils n’ont aucune utilité dans l’univers professionnel. Parallèlement, les astreintes mentales et physiques atteignent souvent un niveau paroxystique provoquant par la suite une sorte d’accumulation d’un surmenage significatif impliquant une forte fatigue émotionnelle. Ceci affecte plus ou moins directement l’ambiance du travail et pousse les sujets concernés à former des bureaux de revendication salariale et dans certains cas d’inadaptation à présenter des lettres de démission prématurée. De plus, une méconnaissance des émotions aura également des effets nuisibles, notamment lors du processus de prise de décision. Lorsque nous sommes ballotés par nos émotions incontrôlables, notre capacité à faire de bons choix est très faible du fait de la succession des perceptions subjectives voire biaisées.

Quelques facettes boutantes du bien-être
Par ailleurs, des réflexions affirment que l’émotion peut prendre parfois la forme d’une énergie contagieuse et exploitable jouant un rôle déterminant dans la dynamisation du travail, le renforcement de la cohésion, du « team-work » et des aptitudes humaines telles que : le leadership participatif, l’adaptabilité, la créativité, l’ouverture d’esprit, la courtoisie et l’entraide.

Gérer ses émotions : un arsenal précieux pour une bonne hygiène de vie
En effet, le travail ne se limite pas seulement à la production, il constitue également un espace de construction et de développement de l’individu dans la logique du « vivre ensemble » comme l’évoque le professeur et psychiatre Français Christophe Dejours « Travailler n’est jamais uniquement produire, c’est également se transformer soi-même ». Sur ce, la gestion des émotions n’est pas un don tombé du ciel, nous en sommes des artisans, c’est à force de forger qu’on devient forgeron.

La bonne attitude consiste d’abord à ne passe laisser envahir et submerger par les émotions négatives inhibitrices de la pensée rationnelle comme la honte ou l’angoisse et de faire un pas vers la maturité qui mène à un état d’aisance, de plénitude et de flexibilité. Tout cela doit se faire sans modération ni excès au niveau des manifestations tout en minimisant le facteur menaçant par le recours à la focalisation de nos schèmes cognitifs sur des faits agréables afin de répondre adéquatement aux sollicitations professionnelles.

Il existe de nombreuses autres astuces efficaces à savoir : l’adoption d’une alimentation saine et équilibrée, la réactivation des centres d’intérêt et des activités sportives, l’organisation des cérémonies festives, la pratique de la sophrologie basée sur la technique de respiration profonde, la dégustation des fruits de la Zen attitude ‘‘Yoga et méditation de pleine conscience’’, le suivi des séances de l’Art-thérapie et de coaching, l’application de la technique de libération émotionnelle (Emotional Freedom Technique), etc.

En dernier lieu, il faut se rappeler qu’il est conseillé de demander l’aide d’un psychologue en cas de difficulté en vue de verbaliser son vécu émotionnel et retourner son équilibre intérieur plutôt qu’à trouver les clés d’or pour aller de l'avant dans son parcours professionnel.

EL BOUANANI Omar
Praticien et enseignant en psychologie

 

El Bouanani Omar