Lecture dans le rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur le Sahara occidental

Jeudi 18 Avril 2013

Le 08 avril 2013, le bureau du Secrétariat général des Nations Unies, à New York, a publié sur le site internet de l’organisation mondiale le rapport annuel du Secrétaire général sur la situation au Sahara occidental. La presse s’est fait l’écho de ce document en rapportant de façon intensive un de ses paragraphes évoquant la nécessité d’un mécanisme indépendant de surveillance des droits de l’Homme au Sahara et dans les camps de Tindouf en Algérie. La concentration des médias sur ce point a malheureusement servi à éluder plusieurs détails importants qui transparaissent dans la rédaction du rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur le Sahara.

 

En effet, la lecture du rapport en question apporte beaucoup d’interrogations. La première est l’absence d’un certain nombre d’informations pertinentes qui devraient êtres portées à la connaissance des membres du Conseil de sécurité. Ainsi, de nombreuses personnes, bénéficiaires du système d’échange de visites familiales entre les populations des camps de Tindouf en Algérie et le Sahara, mis en place dans le cadre des mesures de confiance par le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), ont choisi de rester définitivement auprès de leurs familles au Sahara. Ce nombre s’élève aux alentours de la centaine et rien dans le rapport du Secrétaire général ne vient l’évoquer, et encore moins en préciser les raisons. De plus, le rapport du Secrétaire général traite clairement du cas d’un bénéficiaire du programme de visite, victime d’un accident de la route à Laâyoune et qui a été hospitalisé à Marrakech. Néanmoins, le rapport oublie de mentionner que la personne considérée a également souhaité rester au Maroc.

 

Comment de telles omissions peuvent-elles être expliquées ? Il ne fait nul doute que de telles données ont été rapportées par le HCR et ont été contenues dans la contribution de celui-ci au rapport du Secrétaire général. Ces informations ne peuvent raisonnablement pas avoir été méconnues par le Haut Commissariat. Ces manquements ne peuvent malheureusement s’expliquer que par une altération de la contribution initiale du HCR par les rédacteurs du rapport à New York. Quelles sont les raisons d’une telle altération ? Une réponse serait hasardeuse, mais il est de la responsabilité des Etats membres du Conseil de sécurité de demander des éclaircissements sur la question.

 

Par ailleurs, les paragraphes du rapport du Secrétaire général des Nations Unies montrent un déséquilibre flagrant entre ce qui est rapporté sur le Maroc et ce qui est rapporté sur les séparatistes du Polisario. En effet, la question des violations du cessez-le-feu ainsi que celle relative à la situation des camps de Tindouf, en Algérie, semblent être incomplètes, ou du moins trop générales. L’explication à cela est des plus simples, et se trouve dans la lettre même du rapport du Secrétaire général sur le Sahara. Ainsi, face aux dégradations de la situation sécuritaire au Sahel, la Mission des Nations Unies pour l’Organisation d’un Référendum au Sahara Occidental (MINURSO), organe des Nations Unies chargé de la surveillance du respect du cessez-le-feu, a demandé la protection de ses membres par les éléments armés du Polisario. Cette démarche contraire aux principes de base du droit international - la sécurité des membres des Nations Unies et de celle ses missions incombent aux Etats, et non aux entités non étatiques - place la MINURSO dans une position de dépendance vis-à-vis du Polisario et de ses soutiens. Une telle dépendance ne peut que conduire à une compromission grave de l’exercice impartial et équilibré par la MINURSO de son mandat.

 

Il s’agit là d’autant de signes incompréhensibles pour un lecteur attentif du rapport du Secrétaire général sur le Sahara occidental. Il reste à espérer que la frénésie médiatique actuelle ne permettra pas de passer outre de telles incohérences.

Pascal Fritscher 

Spécialiste de la politique étrangère des Etats-Unis d’Amérique


Pascal Fritscher