L'Eglise Shincheonji, une organisation sud-coréenne puissante et controversée

Jeudi 27 Février 2020

Séoul - L'Eglise Shincheonji de Jésus, au coeur de la propagation en Corée du Sud du coronavirus, est une organisation tellement riche et puissante qu'elle peut mobiliser des milliers de fidèles pour des spectacles de masse dignes de la Corée du Nord.


Egalement connu sous le nom de Temple du Tabernacle du témoignage ou sous la dénomination raccourcie de Shincheonji, ce culte est un des multiples groupes sectaires et religieux qui jouissent d'une influence immense dans la péninsule, où ils génèrent régulièrement la controverse.

Shincheonji fut fondée en 1984 par Lee Man-hee, aujourd'hui âgé de 88 ans. Ce mouvement régulièrement accusé d'être une secte avance que cet homme a endossé les habits de Jésus Christ et emmènera au paradis 144.000 personnes le jour du Jugement dernier.

Son site internet présente cette Eglise comme "la nation de Dieu, lancée par Lui pour créer sur la terre ce qui est au Ciel" et qu'elle réalisera la volonté de Jésus "en sacrifiant nos corps comme des bougies".

Son fondateur "crée le royaume de Dieu sur la Terre, exactement tel qu'il l'a vu au paradis", poursuit le site.

Le nombre de fidèles du culte est cependant largement supérieur aux 144.000 places promises.

Et les détracteurs de Shincheonji affirment que les fidèles doivent sans cesse prouver leur loyauté afin d'obtenir des indulgences et gagner leur salut, au prix de sacrifices dans leur vie quotidienne et de disputes avec leur famille, ainsi que d'efforts pour enrôler de nouvelles recrues.

Le mouvement dont le siège est à Daegu, la quatrième ville du pays, est ainsi accusé de chercher à élargir son assise en envoyant ses membres dans les congrégations protestantes pour tenter de convertir leurs fidèles, ce qui a amené de nombreux autres cultes à lancer des mises en garde contre le prosélytisme de Shincheonji.

Lors des rites, les membres de Shincheonji ont interdiction de porter des lunettes, des colliers ou des boucles d'oreilles. Ils s'assoient à même le sol, très proches les uns les autres, pour des prières collectives qui constituent selon les experts un terreau idéal à la propagation des maladies virales.

Cela vient de se vérifier avec l'épidémie de coronavirus, qui s'est répandue dans ses rangs comme une traînée de poudre à partir d'une de ses fidèles, une femme de 61 ans identifiée comme le patient 31.

Elle a commencé à souffrir de fièvre le 10 février et a assisté à au moins quatre célébrations de Shincheonji à Daegu avant d'être diagnostiquée comme porteuse du virus.

Près de 1.600 personnes sont désormais atteintes du coronavirus en Corée du Sud. Et 80% des cas se trouvent à Daegu.

Sous la pression populaire, Shincheonji s'est résignée à remettre une liste des noms de 212.000 de ses fidèles pour permettre aux autorités de vérifier s'ils présentent des symptômes.

Mais certains médias affirment que le Temple du Tabernacle s'est par le passé targué d'avoir plus de 240.000 membres, semant le doute sur la précision de la liste.

Shincheonji compte 12 branches en Corée du Sud qu'il appelle ses "12 tribus" et se dit présente dans une quinzaine de pays, parmi lesquels la Chine et les Etats-Unis. Elle affirme que des centaines de pasteurs ont renoncé à leur ministère pour la rejoindre.

Le Temple du Tabernacle a une emprise telle qu'il a été capable de mobiliser des milliers de fidèles pour des spectacles gigantesques à la nord-coréenne, comme en 2012 dans le stade olympique de Séoul, qui avait accueilli les Jeux de 1988.

Des centaines d'acteurs avaient rejoué des scènes bibliques sur la pelouse, tandis que des milliers d'autres, dans les tribunes, tournaient dans des séquences soigneusement élaborées des pages d'un livre coloré pour créer un arrière plan en perpétuel mouvement.

AFP