Grâce au cinéma, le « rêve marocain » devient ambition africaine La culture comme instrument de rayonnement continental

Mardi 26 Mars 2013

« Nous pouvons faire du cinéma un vrai facteur de croissance économique », a déclaré le ministre gabonais de la communication, lors de la 23ème édition du Fespaco (Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou), le plus grand festival de cinéma africain qui se déroule annuellement à Ouagadougou, au Burkina Faso. Dans cette perspective, les pays d’Afrique sont à la recherche d’un modèle à appliquer. Tous les professionnels africains s’accordent à dire que celui du Maroc est le plus réussi.

Le Maroc est depuis longtemps une destination privilégiée pour les cinéastes africains, qui viennent y profiter de l’existence d’infrastructures et d’équipements, en matière de post-production et de tirage de copies de films. De grands noms du cinéma africain, à l’instar du réalisateur égyptien Youssef Chahine et du sénégalais Sembène Ousmane, ont ainsi finalisé la production de quelques-unes de leurs réalisations au Royaume. Le jeune réalisateur ivoirien Owell Brown, qui a remporté le prix « Etalon de bronze » à la 23ème édition précitée, indique qu’il n’aurait jamais pu achever son film dans son pays, en proie à une grave crise politico-sécuritaire, où il n’avait « plus les moyens de terminer » son oeuvre. 


Outre son film, trois autres productions cinématographiques africaines ayant pris part au festival de cinéma de Ouagadougou cette année ont été transférées du support numérique sur pellicule dans les laboratoires marocains. En tout, le Maroc a coproduit cinq films africains concourant à ce festival, en plus de trois longs métrages nationaux également en compétition, dont l’un a été primé « Etalon d’Or ». Pour Ousseynou Diop, président du conseil d'administration du festival international du cinéma « Vues d'Afrique », organisé chaque printemps à Montréal, au Canada, « le Maroc tisse des liens cinématographiques entre son cinéma et le cinéma étranger ».

L’expérience dont le Maroc fait aujourd’hui profiter le cinéma africain a été forgée à l’échelle internationale, grâce à l’adoption de mesures incitatives par les décideurs politiques. « Aujourd'hui le Maroc est le deuxième pays au monde derrière la République tchèque pour la production de films étrangers », précise Noureddine Saïl, directeur général du Centre cinématographique marocain. Pour renforcer son attractivité, le Maroc a exonéré de certains droits de tournage et de la TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée) les films étrangers tournés au Maroc. Une stratégie qui lui rapporte actuellement quelques 60 millions de dollars par an, réinvestis dans l’aide à la production cinématographique. Alors que le site de tournage de Ouarzazate est devenu très couru par les cinéastes étrangers.    

Premier producteur de cinéma en Afrique et dans le monde arabe, avec 20 longs métrages et 60 courts métrages réalisés chaque année, le Maroc, est maintenant pris en exemple par les cinéastes africains. Ces derniers ont appelé, à travers « l’appel de Ougadougou », les gouvernements respectifs de leurs pays à adopter le « modèle marocain », désormais une référence sur le continent. Promu par une politique publique volontariste, le Maroc s’est doté, en 1980, d’un fonds de soutien à la production. En 1997, une loi promulguée stipule que 5% des recettes des chaînes de télévision publiques et privées iront renforcer ledit fonds. 

Aujourd’hui, le Maroc capitalise les efforts de ses investissements, ses productions cinématographiques ayant décroché, en 2012, 68 prix dans les 145 festivals de cinéma dans lesquels elles ont concouru.

Une prouesse culturelle qui fait du « rêve marocain » une ambition africaine.  


Alaa El Amrani - Lemag.ma