Enseignement des matières scientifiques : Oui, la langue est bien un problème ! Mais…

Mardi 13 Février 2018

Ces dernières années, les débats autour de l’éducation au Maroc se suivent et ne se ressemblent pas. Mais parmi les grandes questions non encore résolues, il y a celle des langues, et plus précisément la langue d’enseignement. Entre constat d’échec de l’arabisation et retour à peine voilé à la francophonie, il y a franchement de quoi se poser des questions.

Qu’on se le dise tout de suite : il n’est dit nulle-part qu’une langue est plus adaptée qu’une autre à l’étude des sciences. Il serait même aberrant de dire que l’arabe serait moins adapté que le français, par exemple, sachant d’où les algorithmes tirent leur nom. Mais les résultats sont bien là, et il reste tout de même difficile de nier un échec de l’arabisation. Il ne faut toutefois pas se tromper de diagnostic. Ce n’est pas la langue arabe, qu’il faut mettre en cause, mais la nature même de cette communément appelé « arabisation ».


Arabisation de l’enseignement : Ah vraiment ?

En tant qu’ancien élève de l’école publique marocaine, je trouve cela étonnant que personne (du moins, pas à ma connaissance) ne soulève la question de la situation hautement contradictoire dans laquelle la pseudo arabisation de l’enseignement au Maroc nous met. À supposer que l’élève moyen ait acquis les bases en langue arabe, il se retrouve à étudier des maths, de la physique et de la chimie d’un nouveau genre. Un genre où les formules sont éloignées de toute capacité d’abstraction parce que formulées dans une langue étrangère : le français ! En d’autres mots, les formules en mathématiques, en physique et en chimie sont étudiées comme des gribouillis à apprendre par cœur plutôt que comme façon de décrire un phénomène donné. Cela reste mon avis, mais il me parait que ce point, à lui seul, suffit à dérouter même les élèves les plus assidus.


Langue d’enseignement au Maroc : quel avenir ?

En jetant un petit coup d’œil aux réformes prévues dans ce sens, il apparaît très clair qu’une réhabilitation de langue arabe comme langue d’enseignement n’est aucunement au goût du jour. Au contraire, c’est plutôt vers une réhabilitation de langue française que nous semblons nous diriger, au côté d’une place renforcée pour l’anglais et l’espagnol. Toujours est-il que la place accordée à la langue française, qui je le rappelle est officiellement considérée comme langue étrangère, a de quoi intriguer, au-delà même de l’enseignement. Voilà une langue largement dominante, dans un pays qui ne la tient pas pour langue officielle. Une bien étrange façon de faire les choses.

Nabil Goumri