Revue de la presse quotidienne internationale maghrébine du 13/02/2018

Mardi 13 Février 2018

Tunis - La presse maghrébine a consacré, mardi, ses commentaires à la décision d’Ennahdha, parti au pouvoir en Tunisie, de porter plainte contre les journalistes qui le critiquent ou le dénigrent et la position «jusqu’au-boutiste» des syndicats de l’enseignement et des médecins résidents et ses répercussions sur le climat social en Algérie. 

Les journaux tunisiens reviennent sur la décision du bureau exécutif du mouvement Ennahdha de porter plainte contre tout journaliste ou tout organe de presse qui "s'inscrirait dans une campagne de dénigrement à son encontre", la considérant comme un "retour des takfiristes".
Pour "Ennahdha", cette décision survient afin de mieux défendre la liberté de la presse pour que celle-ci puisse servir l'agenda national et éclaircir l'opinion publique tunisienne, ajoutent-ils.

Dans ce sens, la chroniqueuse du journal "'Le Temps" souligne que "Sieur Ghannouchi se fait menaçant. Et dans la nuance et dans les propos".
"Pour le moment, il a envie de crier sa haine et son courroux dans la foulée, contre ceux qui osent, ô suprême sacrilège! critiquer Ennahdha si douce colombe et ses dirigeants plus blancs que blancs (..) . Qui n'ont pas trempé dans l'assassinat de Belaid et n'ont pas les mains liés dans celui de Brahimi", écrit-elle sur un ton d'ironie.

Dans le même ordre d'idées, elle ajoute que ces dirigeants "si respectueux de la démocratie, qu'ils en ont fait leur cheval de bataille pour les décades à venir parce que oui, il faut les croire: Ils ont changé. Viscéralement?".

Il est permis d'en douter avec les conséquences qu'il faut, explique le journal qui ajoute que pour tous ceux qui ont fait parjure et qui continuent de nier, "un ennemi qui se respecte n'avance pas masqué..".
Sous le titre "les mauvais réflexes font de la résistance", "Le Quotidien" souligne que la liberté d'expression est, certainement, le seul acquis après la révolution, précisant que cet acquis qui représente la seule bouffée d'oxygène dans une Tunisie étouffée par la corruption et les abus du pouvoir, est fortement menacée par plus d'un.

Il énumère plusieurs "signes indéniables" démontrant que la liberté d'expression est en danger, rappelant dans ce sens la mise en garde d'Ennahdha contre les journalistes.
Le journal relève qu'il est du droit d'Ennahdha et de tout autre parti politique de porter plainte contre les médias qui sont au-dessus de la loi, en s'adressant directement à la justice, mais le fait de publier un communiqué hostile en menaçant les journalistes ne peut être qu'une tentative d'intimidation et un retour aux pratiques odieuses de l'ancien régime.

Pour sa part, "Echourouq" écrit que la majorité des politiques excellent dans l'alimentation de la tension et échouent à transformer leur adversité politique en connivence intelligente.
Il relève que décidément, pour de nombreux Tunisiens, assister à une scène politique sans tensions est une chimère, rappelant les déclarations des responsables des partis Ennahdha et du Front Populaire qui laissent croire qu'aucun pacte d'entente n'est envisageable entre ces deux tendances politiques diamétralement opposés.

"La Presse de Tunisie" revient de son côté sur la position du Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT) qui a demandé au mouvement Ennahdha d'apporter un éclairage sur le contenu de sa déclaration publiée le 10 février dernier au sujet "des campagnes de diffamation dirigées contre le parti et l'acharnement de certaines figures médiatiques à colporter de fausses accusations à son encontre".
Dans une déclaration citée par le journal, le SNJT a réaffirmé son "refus de toute forme de pression exercée sur les journalistes ou les établissements médiatiques de quelque partie que ce soit", indiquant être "concerné par la défense de la liberté d'expression et de l'information, non seulement en tant que principes constitutionnels, mais aussi en tant que cadre effectif pour le dialogue et la discussion".

"Proférer des menaces contre les journalistes et les menacer de poursuites judiciaires, relève de l'intimidation et de la restriction de la liberté d'expression", explique le syndicat, qui déplore le fait que plusieurs parties dont le mouvement Ennahdha se livrent à des discours de nature à impliquer les journalistes dans des batailles qui ne les concernent pas, menaçant de poursuites judiciaires tous ceux qui ne se joignent pas au mouvement dans cette perspective.

Pour "Al Maghreb", cette décision d'Ennahdha qui a chargé ses services juridique, contentieux et de la communication de prendre les mesures juridiques nécessaires, " vise à défendre les acquis de la révolution dans un environnement démocratique sain et une information libre et professionnelle".
Il précise que cette décision intervient suite à un "certain nombre de campagnes de diffamation dirigées contre Ennahdha et l'acharnement de certaines figures médiatiques colportant de fausses accusations à son encontre".

Sur ce même ton de dénonciation, relèvent-ils, cinq syndicats du secteur de l'éducation ont dénoncé «l’utilisation abusive du droit de grève». La Fédération nationale des travailleurs de l’éducation (Fnte-ugta) et quatre autres syndicats autonomes accusent le Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l’éducation (Cnapeste) d’entrave à l’aboutissement du nouveau statut des travailleurs de l’éducation, en décrétant une grève illimitée «alors que la commission mixte regroupant les représentants de dix syndicats est aux dernières retouches du texte portant l’amendement de l’avant-projet de loi du statut des travailleurs de l’éducation», dénonce M. Belamouri, président de la fédération Snapap de l’éducation, lors d’une conférence de presse tenue hier à Alger.

«Nous avons tenu, à la fin du mois de janvier, la 53e rencontre de la commission chargée d’élaborer des propositions relatives à la révision du statut. Les propositions de la commission s’orientent vers plus de justice et d’équité pour les catégories actuellement lésées, et cette tendance dérange ce syndicat qui a appelé à une grève illimitée», argumente le même syndicaliste.

Et d’ajouter que le débrayage illimité du Cnapeste serait motivé, selon cette alliance syndicale, par «la volonté de ce syndicat d’échapper à la présentation du bilan de sa gestion des œuvres sociales, comme le réclament les représentants des travailleurs du secteur».

«Le Quotidien d’Oran», quant à lui, estime que l’hostilité de toute la société face à l’impasse engendrée va certainement pousser le gouvernement à prendre des mesures pour interdire les grèves dans le secteur. Les représentants syndicaux ont dénoncé «l’opportunisme» de certains enseignants grévistes, qui n’ont pas hésité à assurer des cours particuliers dans des locaux commerciaux alors qu’ils sont grévistes au niveau de leurs établissements, indique-t-il.

Son confrère «L’Expression» relève que sur le terrain, si aucune voix ne vient apaiser quelque peu la situation, l'absence de celles des députés est, de loin, la plus regrettable. Bien qu'élus pour légiférer, les membres de l'Assemblée nationale populaire ont également reçu mandat des citoyens-électeurs pour les représenter et parler en leur nom face au pouvoir exécutif, soutient la publication, arguant que ce rôle implique nécessairement une proximité dans l'action de nos élus et bien entendu une écoute permanente de l'ensemble des catégories sociales, avec en prime, un souci constant d'éviter une fracture profonde, susceptible de conduire à l'impasse. 

«Les députés font la sourde oreille», titre à sa Une le quotidien qui souligne qu’en tant qu'institution, l'Assemblée populaire nationale n'a pas jugé utile d'ouvrir un débat sérieux autour de cette question pour proposer une voie médiane entre les propositions des syndicats et celles de leurs ministères de tutelle respectifs.

MAP