"Rabouz" ou le soufflet traditionnel, un ustensile qui renait de ses cendres à chaque fête de l'Aïd Al Adha

Mercredi 1 Octobre 2014

Meknès - A chaque fête de l'Aïd Al Adha, des métiers traditionnels authentiques, qui continuent de résister aux nouveaux modes de vie, en profitent pour s'offrir des moments de répit, même éphémères.


A Meknès, l'un de ces métiers lutte pour perpétuer une tradition jalousement entretenue par des artisans marocains dévoués. Il s'agit de la fabrication du "Rabouz" ou le soufflet traditionnel marocain, qui reste incontournable dans de nombreux foyers, notamment dans les campagnes et les régions montagneuses ou reculées. Dans les villes, c'est spécialement à l'occasion de l'Aïd Al Adha que cet ustensile devient de plus en plus visible.


Pourtant, le soufflet traditionnel marocain ne date pas d'hier. Il remonte à environ deux siècles lorsque les juifs marocains installés à Fès, Marrakech, Meknès, Salé, Rabat, Errachidia, Chefchaouen ou encore à Ouezzane étaient les premiers à utiliser cette sorte de soufflet qui permet de maintenir des braises allumées en les alimentant en air.

Aujourd'hui, de nombreuses villes s'efforcent de perpétuer cet héritage. Le soufflet devient de plus en plus prisé à l'occasion de l'Aïd Al Adha, et les quelques ateliers qui le façonnent tournent à plein régime.

A Meknès, les quartiers du Mellah et de Brima, connus au niveau national, sont pris d'assaut par les meknassis, mais surtout par les commerçants venus de régions environnantes où le soufflet trouve toujours acheteur.

Selon Mohamed Benkit, un artisan spécialisé dans la fabrication des soufflets, ce métier connait un bel essor depuis quelques années, après une longue période de marginalisation, ajoutant que la créativité des artisans qui ont su accompagner l'évolution des goûts des consommateurs a eu raison à la fin.

"La preuve du regain d'intérêt de ce métier c'est que je produis 140 pièces chaque semaine, soit 20 soufflets par jour, de toutes les tailles, les formes et les sculptures", a-t-il confié à la MAP.

Le métier de "Rabouz", a-t-il poursuivi, a dépassé son seul usage traditionnel, en s'ouvrant aux secteurs de l'art et de la décoration et en réussissant à pousser notamment les portes des foires d'artisanat, des maisons luxueuses et des hôtels.

Toutefois, les artisans font encore face à de nombreuses contraintes. Mohamed Benkit cite notamment l'absence de la formation par apprentissage de ce métier, le recul du nombre des ateliers de fabrication, la cherté des matières premières, l'absence du contrôle des prix des produits et la multiplication des intermédiaires qui contribuent à la dégradation de la qualité.

Pour Allal Sidqi, premier vice-président de la chambre d'artisanat de Meknès, les raisons de détérioration de ce métier sont à chercher dans le changement des modes de vie du citoyen et de développement d'outils modernes qui remplacent de plus en plus les ustensiles traditionnels.

Toutefois, l'apparition de certaines maladies dues à l'usage de certains outils modernes dans la cuisine et les effets néfastes que pourraient causer les bonbonnes de gaz ont contribué au nouvel essor du métier du soufflet traditionnel, estime-t-il.

D'où, relève-t-il, l'intérêt de l'introduction de ce métier dans le système de formation par apprentissage, l'encouragement des participations dans des foires artisanales, la formation des jeunes artisans et le regroupement des artisans dans des associations et coopératives. Des efforts qui ne risquent pas de partir en fumée sachant que 60 pc de la population des campagnes et 10 pc des villes utilisent toujours cet ustensile, conclut-il.


MAP - Ahmed Guermali