L’hôtellerie de luxe à Marrakech continue à faire des victimes

Mercredi 17 Octobre 2018

Si certains hôteliers de luxe à Marrakech gagnent très bien leur vie, d’autres ont du mal à joindre les deux bouts. En effet, la ville ocre continue de réserver des fortunes diverses aux acteurs qui s’y sont positionnés sur le segment de l’hôtellerie premium en marge d’une décennie 2008-2018, qui a connu l’arrivée...

Si certains hôteliers de luxe à Marrakech gagnent très bien leur vie, d’autres ont du mal à joindre les deux bouts.

En effet, la ville ocre continue de réserver des fortunes diverses aux acteurs qui s’y sont positionnés sur le segment de l’hôtellerie premium en marge d’une décennie 2008-2018, qui a connu l’arrivée sur le marché d’une offre abondante pour l’hébergement haut de gamme, voire très haut de gamme (Aman Jenna, Banyan Tree, Four Seasons, Ritz-Carlton, Mandarin Oriental, l’Intercontinental, etc). Aussi, si certains palaces ont retrouvé depuis quelques années le chemin de la rentabilité (comme par exemple le mythique Palace Mamounia qui a récemment mis fin à plusieurs années dans le rouge ou le Sofitel qui se hisse parmi les meilleurs contributeurs à l’EBITDA consolidé du groupe Risma qui détient les actifs de la chaîne AccorHotels au Maroc), cela est loin d’être le cas d’autres groupes hôteliers qui continuent à numéroter les abattis, alors qu’ils ont investi massivement pour prendre pied dans la ville qui reçoit le plus de touristes au Maghreb.

Le dernier en date qui n’arrive pas à remonter la pente, n’est autre que le groupe mauricien New Mauritius Hotels (NMH), plus connu sous la marque Beachcomber, qui a essuyé jusqu’à présent pas moins de 585 millions de DH en pertes cumulées dont 485 millions de DH au titre de ses activités hôtelières et 100 millions de DH au niveau de ses investissements immobiliers (certes non encore totalement livrés). Des pertes qui ont causé à ce leader de l’hôtellerie à l’Ile Maurice (avec près de 15% des capacités hôtelières), de fortes dépréciations d’actifs sur ses comptes consolidés qui regroupent ses activités domestiques, ainsi que celles opérées au Maroc et aux Iles Seychelles.

Il faut dire que NMH a lancé son projet ambitieux d’un complexe immobilier et touristique comprenant un hôtel de 134 suites, un golf 18 trous, un club house et des dizaines de villas de très haut standing en pleine crise de 2008, laquelle avait durablement affecté le tourisme au Maroc et particulièrement à Marrakech où une surcapacité commençait à poindre à l’horizon. Et ce n’est qu’en 2013 que l’hôtel Beachcomber Marrakech a ouvert ses portes, sans jamais atteindre un taux d’occupation qui lui permet de sortir la tête de l’eau. Après quatre ans de vaches maigres (où le taux d’occupation était inférieur à 30% ce qui rend éloignée toute perspective de rentabilité), le groupe créé en 1952 s’est résolu en 2017 à confier la gestion de son fleuron de l’hôtellerie marrakchi au français Accor qui l’exploite depuis, sous la marque Fairmont Hotels & Resorts. Certes le taux d’occupation a atteint en 2017 et pour la première fois la barre de 40% mais l’EBITDA (marge opérationnelle) est toujours négatif avec -12,5 millions de DH en 2017 et ce malgré l’ouverture du country club en septembre. Quant au projet immobilier qui a dû être redimensionné en cours de route, il a généré des pertes continues malgré la livraison presque totale de la première tranche (EBITDA négatif de -43 millions de DH en 2017 contre -41 millions de DH un an plus tôt). Pour l’instant, toutes activités confondues, NMH a perdu au Maroc en 2017 quelque 57 millions de DH en EBITDA en 2017 (pour des revenus de plus de 214 millions de DH) et 11 millions de DH à fin juin 2018.

C’est dire qu’il sera difficile pour la maison mère qui a investi plus de deux milliards de DH à Marrakech de rentabiliser sur un horizon raisonnable son aventure marocaine. Le management du groupe demeure, toutefois, confiant pour réaliser un premier bénéfice dès 2019 grâce, d’une part, à la montée en puissance du Fairmont Marrakech dont le taux d’occupation devrait enfin approcher les 50% (ce qui normalement est assez suffisant pour le segment du luxe pour être rentable) et, d’autre part, au lancement de la deuxième tranche du projet de villas par Royal Palm Marrakech (l’entité qui porte les activités immobilières au Maroc) et dont la commercialisation a démarré cette année. A suivre. 

Source

Salim Mansouri