Exclusif: Fatima-Zahra Mansouri fustige les décisions "abusives" du secrétaire général du PAM

Mercredi 29 Mai 2019

PARTIS - Elle avait jusque-là choisi de ne pas s’afficher, de ne pas prendre part à “un débat qui n’en était pas un”. Fatima-Zahra Mansouri, présidente du conseil national du PAM, plus haute instance décisionnaire du parti, s’est finalement décidée à sortir de son silence. Au lendemain du limogeage d’un des fondateurs du parti, Ahmed Akhchchine, du bureau politique par le secrétaire général, Hakim Benchamach, elle publie un communiqué dans lequel elle transmet un message clair: refus catégorique des “règlements de comptes”, de “l’abus de pouvoir”, des “décisions unilatérales”... En quatre pages, l’ancienne maire de Marrakech fustige l’état “chaotique” du PAM, réaffirmant, toutefois, son attachement au parti et espérant que “la raison” finira par prendre le dessus. 

“Oui, c’est un cri du cœur”, déclare au HuffPost Maroc Fatima-Zahra Mansouri, soulignant qu’elle s’est longtemps retenue d’une prise de parole par crainte de “tomber bas” et de se retrouver “dans une guerre intestine”. Sa sortie, cependant, a été dictée par “le devoir d’assumer ses responsabilités au sein du parti”, affirme-t-elle, refusant “la mise à mort” du parti et surtout du “projet” qu’il représente. “C’est le projet d’une jeunesse qui pensait pouvoir contribuer positivement à la gouvernance de son pays et insuffler l’espoir à ses semblables souvent désemparés face à la réalité socio-économique”, rappelle-t-elle.

Un projet qui semble s’être éclipsé au bout de 11 ans d’existence, cédant la place à ce que la présidente du conseil national appelle “la guerre des égos et des intérêts”. Face aux décisions post 18 mai, date de la tenue de la réunion controversée du comité préparatoire du congrès national du parti, Mansouri ne cache pas sa déception. Des décisions “prises sous le coup de l’émotion et pas de la raison”, estime-t-elle.

Partageant l’avis d’une dizaine de membres du bureau politique du PAM, à l’annonce de la première décision du SG de retirer à Mohamed Hamouti la fonction de président du bureau fédéral, Mansouri estime qu’il s’agit de “décisions personnelles qui n’engagent que celui qui les prend et ne sont pas opposables au tiers”. La présidente du conseil national brandit alors le non respect du règlement intérieur et l’absence de recours à l’une des instances, bureau politique et bureau fédéral. Sans ces principes, prévient-elle, “que ce soit la décision relative à Akhchichine, ou celle des secrétaires régionaux virés sans droit (...) Ces décisions ne sont pas réglementaires et sont abusives”. Rappelant que Benchamach est l’“un des fondateurs et militant du parti”, elle soutient, cependant, qu’“il est très mal conseillé par de petites gens”. 

Une situation qui a amené Mansouri à appeler au calme. Elle compte sur “les bonnes volontés du parti pour s’asseoir autour d’une table en vue de trouver une solution et faire disparaître les égos”. Aller de l’avant pourrait justifier la tenue d’un conseil national extraordinaire, mais sa présidente estime plus urgent de passer d’abord par une étape de dialogue pour apaiser la tension. “Pour cela, il faut des personnes qui ne soient pas motivées par leurs propres ambitions. Personnellement, je n’ai aucune ambition ni pour le secrétariat général, ni pour le conseil national”, tranche-t-elle.  

Se montrant fière de son parcours de militante dans différents fronts et au parti depuis sa naissance en 2008, Mansouri assure qu’elle ne veut pas renoncer, aujourd’hui, à “servir une cause” à condition que celle-ci ne devienne pas “une purge”. “C’est quelque chose que je ne peux pas accepter. Comment peut-on donner des leçons de démocratie quand on n’a pas nous même la maturité démocratique?”, s’interroge la militante. 

Elle dit s’être engagée corps et âme au PAM pour atteindre un but. “Mon ambition, au sein de ce parti, était de voir une jeune génération s’installer dans le champ politique, qu’elle soit intègre, crédible et compétente et qu’elle puisse surtout le redynamiser”. Mais, force et de constater, ajoute-t-elle, qu’“il n’y a pas que le PAM qui est dans le chaos, il y a un malaise et un marasme dans le champ politique qui handicapent le projet démocratique et génèrent une médiocrité généralisée”. 

À son appel à la raison s’ajoutent deux autres appels qui ont résonné au PAM ces dernières semaines.  L’“Appel à la responsabilité”, lancé par 5 leaders du partis, et l’“appel pour l’avenir”, initié par la jeunesse du parti, se sont donné pour objectif commun de rassembler les troupes et désamorcer une crise de plus en plus intense. “Les deux se complètent. Il n’y a pas, ici, ni de conflit générationnel, ni de tentative de détruire les fondateurs”, assure-t-elle. Et de préciser que durant 11 ans, le parti a vu naître et grandir “une génération 100% PAM qui n’a pas démérité et où les jeunes sont profondément convaincus que le parti est un projet moderniste et progressiste”. Déclarant son soutien indéfectible à la jeunesse du parti, Mansouri veut que celle-ci ait son mot à dire sans condition aucune d’âge. “Les jeunes n’ont pas à être muselés au sein du parti!”, revendique-t-elle.

Porte-voix de cette jeunesse dont elle fait partie, la présidente du conseil national estime que “contrairement à l’image conflictuelle que l’on peut dégager, il y a aussi ceux qui se battent pour leurs idées”. Pour Mansouri, il faut se résigner à mettre cette jeunesse devant la scène, lui passer le relais. “Mon seul conseil, pour elle: ne laissez pas ceux qui sont incapables de discuter d’idées prendre le dessus sur vous”. 



Source : https://www.huffpostmaghreb.com/entry/exclusif-fat...

Leïla Hallaoui