Des babouins qui apprennent à lire : comment ?
Des babouins qui apprennent à lire ! Non, vous ne rêvez pas. Des chercheurs du laboratoire de psychologie cognitive du CNRS rattachés à l’université d’Aix-Marseille ont en effet réussi à apprendre à des babouins de Guinée à reconnaître des mots anglais de quatre lettres et à les distinguer de pseudo-mots, c’est-à-dire des mots vides de sens. Ces babouins vivent dans un enclos de 700 mètres carrés, entouré de verdure avec des préfabriqués attenants. Des ouvertures dans les préfabriquées permettent aux babouins d’accéder à des écrans tactiles reliés à des ordinateurs. C’est tout à fait librement que les singes entrent et sortent des laboratoires. L’objectif est d’optimiser la validité des résultats : aucune contrainte n’est exercée sur les sujets. Chaque singe est pucé grâce à un micro transpondeur implanté dans son bras. Ainsi, dès qu’un babouin entre dans le laboratoire, il est identifié par l’ordinateur qui adapte les tests au sujet, à son niveau et à ses capacités. Les expériences consistent à présenter sur l’écran un mot ou un pseudo-mot. Le singe tape sur le mot puis sélectionne la croix présente à l’écran s’il considère que l’item n’est pas un mot ou sur l’ovale s’il considère que l’item est un mot. Si la réponse est juste, un distributeur automatique lui délivre une graine de céréale. Au début, l’ordinateur présente plus de vrais mots que de pseudo-mots au sujet puis les proportions s’équilibrent. L’idée était d’apprendre aux babouins d’une manière similaire à celle dont les enfants humains apprennent à lire au contact de mots écrits.
Des babouins qui lisent : implications théoriques
Les résultats sont frappants. Un babouin en particulier, Dan, c’est son nom, a surpris les chercheurs. Il est en effet capable de reconnaître plus de 300 mots alors que ses congénères n’en reconnaissent en moyenne que 80 ! Les sceptiques diront que les babouins ont tout simplement fini par reconnaître la forme visuelle des mots et que la récompense alimentaire a fait le reste. Il n’en est rien ! Au contraire : dans 75% des cas, les babouins ont été capables de classer immédiatement un mot qu’ils n’avaient pas vu dans la bonne catégorie. Par exemple, le mot « bank », présenté pour la première fois à un singe, a été immédiatement classé dans la catégorie des vrais mots anglais. Et l’expérience s’est répétée de nombreuses fois, rendant ainsi les résultats valides. Il faut savoir que certaines séquences de lettres sont très fréquentes dans une langue, alors qu’à l’inverse d’autres sont impossibles : « rk » n’apparaît jamais en initiale de mot en anglais alors que « th » apparaît très souvent. Ainsi, un babouin voyant pour la première fois un mot commençant par « rk », le classe immédiatement dans les pseudo-mots… tout comme un anglais ou un américain le ferait ! Il apparaît donc deux choses. Tout d’abord, les scientifiques ont longtemps cru que l’apprentissage de la lecture nécessitait des compétences linguistiques. L’étude montre que l’apprentissage de la bonne orthographe des mots se fait, dans une certaine mesure, sans compétence linguistique mais juste avec des processus cognitifs spécifiques. La deuxième chose est que le cerveau n’enregistre pas une image globale du mot mais le décompose en plus petites unités non signifiantes mais pertinentes : la méthode globale est donc bel et bien morte et enterrée ; merci les babouins !
Des babouins qui savent lire, mais encore ?
Cette expérience sur les babouins peut avoir des répercussions extraordinaires sur les êtres humains, surtout dans l’avenir. Déjà, l’expérience a montré la non pertinence de la méthode globale qui a fait tant de tort à tant d’élèves de primaire. Les doutes sont enfin levés. Il n’est plus question ici de débats théoriques obscurs : une expérience scientifique sérieuse permet enfin de trancher. De plus, cette étude sur les babouins et leur apprentissage de la lecture peut donner lieu à de formidables découvertes sur les fonctionnements cognitifs de notre propre apprentissage de la lecture et du monde en général. Mais aussi, conjointement à cette étude, une autre a été menée, sur les mêmes babouins et qui aboutit à des résultats similaires. A la place des mots, ce sont deux formes qui ont été présentées aux babouins. Soit deux formes identiques, soit deux formes différentes. A partir de cela, les babouins devaient choisir entre deux propositions. L’expérience a montré que les babouins n’ont pas concentré leur attention sur les formes mais bien sur la relation entre ces formes. Ils sont capables de mener une réflexion analogique, c’est-à-dire de transposer une information d’un contexte à un autre contexte. Cela confirme l’expérience sur la lecture. Avec du travail et de l’entrainement, il sera donc possible d’aller bien plus loin dans le développement cognitif accompagné des babouins. La planète des singes ? C’est demain !
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