« Les Centiments », un récit sensuel et initiatique

Mireille Rossi nous propose sa vision de femme confrontée à notre société patriarcale, parfois obligée à se taire, parfois hurlant au détours des pages d'une colère évidente mais retenue. Loin de tout plan de carrière, Mireille se livre et dévoile tout un monde intérieur. Ses expériences, son passé c'est le sien mais il trouve aussi une résonance avec nos propres expériences.

Elle fonctionne à l'instinct et au désir. A travers l'ouvrage organisé en plusieurs saisons l'auteur exprime ses doutes, ses envies, son rapport à la famille, ou bien le désir de maternité . Mireille Rossi évoque aussi les hommes, ses hommes et leurs « désespérante humanité ». En quelques phrases bien décochées elle déboulonne la statue de cet homme objet de désir et de ressentiment à la fois.

« Les Centiments » raconte en plusieurs saisons, le parcours d'une femme. Partant de souvenirs familiaux, elle n'hésite pas à évoquer ses aventures sentimentale. Elle nous fait partager ses doutes, ses espoirs et même parfois des moments d'extase lors d'une aventure d'un soir avec un inconnu de passage.

Ah ces hommes (hélas pour nous) parfois infidèles, souvent couards, voir méprisants, souvent méprisables mais tellement humain (l'honneur est sauf). Mireille Rossi distille de l'émotion durable à chaque page. « Les Centiments » font rimer amour et sensualité et cyber sexualité, Mireille décrit avec justesse les fantasmes d'hommes et de femmes rencontrés sur le net. (échanges furtifs, cyber marivaudage) l'imagination des amants est toujours sans limite. Attention aux sms !

Cruelles rencontres qui se terminent au petit jour après une nuit torride ou après d'une succession de mails enflammés dans la plus profonde solitude. En résume Le roman « Les Centiments » s'apprécie avant tout comme un « roman d'initiation ». Un guide de l'homme pour la femme et inversement.

Comme elle le précise au cours de la soirée, le roman « Les Centiments » ne constitue aucunement un « roman triste ». « Les Centiments » s'avère plutôt une plongée dans le passé encore vibrant des souvenirs intimes de l'auteur. La plume plutôt légère ; elle maîtrise parfaitement la langue française, sa langue française.

Passée par les Beaux Arts, l'enseignement, les lettres ou le théâtre, Mireille Rossi démontre une véritable sensibilité à fleur de peau, sans sombrer dans l'autosatisfaction ou la mièvrerie. Son style direct accroche dès la préface le lecteur. Le ton de l'ouvrage est donné, alors que celle-ci invective la missive informelle, insuffisamment motivée du refus de donner une suite favorable à un de ses recueils d'un éditeur lambda.

Avec réel talent Mireille Rossi fustige nos petites entraves quotidiennes, nos comportements stéréotypés et préfère à ce monde factice, magnifier les fulgurances de l'existence, célébrer les émotions, revisiter nos illusions, nos doutes nos espoirs. « Les Centiments », se présente sous un format 12X21, compte 144 pages. Prix 14 € .

Voici un extrait d'un paragraphe en guise de conclusion d'un chapitre intitulé confidence : « Il s'étaient rencontrés sur Internet. Ils ont fait l'amour deux ou trois fois, passionnement comme un prolongement aux longues discussions qui les unissaient. Et se sont séparés aussitôt. Comme on éteint un ordinateur ». La journaliste couchant sur le papier des témoignages anonymes de couples rencontrés sur le net. Edifiant et totalement juste.

La parenthèse raconte le séjour d'une jeune femme citadine venue oublier son chagrin dans les Cévennes. Elle fera la connaissance d'un vieil hermite et de son chien Hector. Récit fantastique, elle mélange avec habilité et intelligence vie réelle et imaginaire. D'une langue proche de la poèsie, je peux le dire l'atmosphère qui y règne ressemble étrangement aux romans fantastiques d'un Edgar Allan Poe ou dans une référence plus contemporaine aux romans du maître du supense américain Stephen King. Banalité du quotiden, elle fait surgir du néant des individus au destin hors du commun porteurs souvent d' insondable détresse.

La rencontre avec une employée d'un bureau de tabac témoignera de cette ambiance d'un livre vrai qui se déguste en quelques heures. « Tu étais tombé sous le charme d'une longue blonde amoureuse venue de son pays nordique couper le raisin de l'ardèche ».

Ce beau récit autrefois publié chez l'éditeur Mirandole sera bientôt disponible en réédition dans le catalogue des auteurs de la maison d'édition vauclusienne Elan sud, dans la collection dédiée aux femmes pour les femmes. Elan d'elle. Collection féminine mais pas féministe, comme le précise la directrice de collection Corinne Niederhoffer. Elan Sud privilégie avant tout le style, le texte, la beauté de la langue française et le partage de valeurs profondément humaines.

« Parler des sentiments, de leurs fluctuations, parler des adieux et des abandons, de ce qu'il faut lâcher pour vivre encore. Parler du deuil de ce qui n'a jamais été. Parler de l'adieu à l'enfant qui n'est jamais né, de l'adieu aux rêves, aux illusions. Parler de création. D'écriture et de cœur qui bat. De ce qui au jour le jour me façonne et me fascine. La puissance de la Vie malgré tout. Et le lâcher prise comme ultime espérance »