Libye, vers une guerre civile ?

Hier, dimanche 20 février, des opposants se sont rassemblés dans la capitale tandis qu’une unité de l’armée s’est mise du côté des manifestants à Benghazi. De même, les chefs de tribu s’en sont pris verbalement au colonel Kadhafi. Le gouvernement promet des réformes mais un avocat de Benghazi a témoigné à la BBC que tout cela n’était que des mensonges depuis les 42 ans de pouvoir du Président Kadhafi. À Benghazi, les bâtiments gouvernementaux étaient saccagés et les opposants au pouvoir ont obligé l’armée et la police de battre en retraite. Les manifestants auraient pris le contrôle de la ville. Pour la première fois, la ville de Tripoli, a elle aussi participé aux manifestations. Des fusillades ont eu lieu durant la nuit et les policiers ont utilisés des gaz lacrymogènes pour disperser les opposants au régime. Selon un chirurgien de Benghazi, à l’hôpital Al Jalae, il y a eu plus de 200 blessés amenés et environ 50 morts par balles. Les habitants de Tripoli ont témoigné qu’ils voyaient des voitures en flammes, qu'ils entendaient des coups de feu et certains d'entre eux n'osaient pas sortir. Le dirigeant de la tribu Al Zouaya a menacé de cesser les exportations de pétrole de la Libye vers les pays occidentaux d’ici 24 heures si les heurts ne s'arrêtaient pas. Les conséquences de la révolte sont politiques, économiques, sociales… Quelles sont donc les positions du pouvoir en place ?

Saif al Islam Kadhafi a déclaré à la télévision libyenne dans la nuit de dimanche à lundi que son père irait jusqu’au bout pour rester au pouvoir et que l’armée ferait le nécessaire en cas de poursuites des révoltes. Il a accusé publiquement les exilés libyens de fomenter la révolte depuis l’étranger et a promis une hausse des salaires. Il a aussi annoncé que le Parlement libyen et le Congrès général du Peuple se réuniront en ce jour pour décider des réformes. Il a aussi expliqué que la Libye était composée de tribus et de clans ainsi que d’alliances ce qui impliquerait que le pays risquerait d’être divisé en plusieurs états. Selon l’organisation de défense des Droits de l’Homme, il y aurait eu 233 tués ces derniers jours alors que le fils du colonel Kadhafi trouve que cela est exagéré et annonce le chiffre de 84 morts. Il a également affirmé que des erreurs de gestion ont été commises dans l’armée et dans la police durant ces contestations. Le colonel Kadhafi qui explicitait au début que les émeutes étaient un problème provincial sur Benghazi est obligé de reconnaître que les affrontements ont désormais également lieu dans la capitale, Tripoli et dans d'autres villes du pays. Expliquons à présent les réactions au niveau mondial face à la montée de la violence en Libye.

L’Union Européenne a demandé à rapatrier ses citoyens résidant en Libye. Le fils de Mouammar Kadhafi dénonce un complot pour une république islamiste et qu’un nouveau code pénal, de nouvelles libertés et une nouvelle constitution vont être élaborés. Il est à noter qu’environ 750 Français habitent la Libye et comme la France craint une guerre civile, on les sollicite fortement de rentrer en France. Notre pays a également condamné l’usage de la violence sur la population libyenne employée par le gouvernement. Les 27 membres de l’Union Européenne se réunissent aujourd’hui à Bruxelles et vont revoir leurs positions vis-à-vis des dictatures, il s'agit également de réviser les finances concernant ces pays et d'émettre d'éventuelles sanctions contre le Président libyen. Les États-Unis examinent actuellement les possibilités de réformes significatives du régime libyen de même qu'ils considèrent toutes les mesures appropriées pour répondre à la violence contre les manifestants. L’Union Européenne a déjà annoncé que : "Le Conseil condamne la répression en cours contre des manifestants pacifiques en Libye et déplore la violence et la mort de civils" et que "La liberté d'expression et le droit de rassemblement pacifique sont des droits fondamentaux pour chaque être humain qui doivent être respectés et protégés." Le Conseil européen énonce clairement que la population libyenne a tout à fait le droit de manifester et qu’ils ne doivent pas être les cibles de l'armée ou de la police parce qu'ils s'affichent contre le pouvoir. Courage pour les manifestants et pensons aussi que les protestations ont lieu dans de nombreux pays du Moyen-Orient : le Yémen, la Jordanie, l’Iran, le Maroc, l’Algérie, le Bahreïn après le succès du peuple en Tunisie et en Égypte.