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Un consensus vers un protocole de récupération ?



Un consensus vers un protocole de récupération ?
Parallèlement aux soins de terrain, la récupération fait de plus en plus partie intégrante de la kinésithérapie du sport. Mise en avant par les médias comme un élément déterminant de la performance lors de compétitions sportives importantes, elle se rencontre bien souvent également de façon plus informelle dans les soins au cabinet que ce soit en rhumatologie ou en traumatologie où on demande aux patients de récupérer entre les exercices, de glaçer après la séance, de faire du retour veineux ou de faire des bains écossais dans le cas d’un œdème traumatique. La récupération n’est donc pas exclusivement limitée à la sphère sportive, c’est une éducation.
 
Mais ce qui frappe lors de compétitions sportives, c’est la disparité des « protocoles » des kinésithérapeutes en charge d’une équipe sportive. Ayant mis en place à plusieurs reprises des espaces de récupération (vélos, bains froids et appareils d’électrostimulation pour le retour veineux), j’ai pu constater que chaque physiothérapeute détenait son petit protocole qu’il respectait plus ou moins à la lettre. Le temps sur le vélo, le temps dans les cuves, chacun semble avoir son avis sur la question, certains allant même parfois jusqu’à vérifier précisément la température de l’eau avec un thermomètre !
En effet, les méthodes permettant une récupération optimale dépendaient pour les plus puristes de lectures scientifiques et pour d’autres d’un savant mélange de constatations cliniques, de science et d’empirisme. Chaque pays ayant sa petite manière de faire.
 
C’est la raison pour laquelle l’article écrit par F.Bieuzen, du service recherche de l’INSEP et paru en avril dernier dans PLOS one, une revue scientifique en libre accès [1], a attiré mon attention. Cette méta-analyse et revue systématique a tenté de faire le point sur les principales méthodes de récupération préconisées dans le « traitement » des micro-lésions induites par l’exercice: bains alternés, bains froids, bains chauds, récupération active (vélo,  footing), passive, compression et étirements.
 
Comparant l’efficacité des bains alternés aux autres méthodes de récupération sus-citées, il passe en revue 18 études éligibles (7 essais contrôlés randomisés, 11 essais croisés et groupes parallèles) pour un total de 356 sujets (301 hommes, 55 femmes) âgés de 14-36 ans. Divers marqueurs servant à évaluer le degré de récupération post-exercice à t : 0, 24h, 48h, 72h et 96h : douleur (EVA), force musculaire (dynamomètre), puissance (détente verticale) et des marqueurs biologiques de l’inflammation (IL-6 et CRP) et des dommages musculaires (CK, LDH et Mb) ont été retenus.
 
Concrètement qu’en ressort-il ?
Les conclusions de l’article suggèrent que les bains alternés sont plus efficaces que la récupération passive ou que le repos après un exercice intense. Les bénéfices étant liés à une réduction de la douleur musculaire et à l'amélioration de la fonction due à une diminution de la perte de la force musculaire et de la puissance. L'ampleur de ces effets semblent être cliniquement pertinent, mais peut-être plus applicable au sport d'élite. Il n'y a cependant pas de données disponibles pour déterminer une méthode optimale de bains alternés. En outre, il semble y avoir peu de différence dans les résultats de récupération lorsque ces derniers sont comparés aux autres méthodes de récupération telles que l'immersion en eau froide, en eau chaude, la compression, la récupération active ou les étirements. Ces conclusions ne sont pas définitives car basées sur de faibles qualités méthodologiques et des échantillons de petite taille.
 
Néanmoins, et je pense que tout l’intérêt de l’article réside aussi dans cette raison : par sa revue de littérature, il réalise une synthèse des méthodes « internationales » de récupération. Voici donc les bornes de travail qu’on pouvait retenir pour chaque méthode de récupération:
 
Bains alternés (Contrast Water Therapy) 
Température: froid (10-15°c)/ chaud (35.5-45°c : <40°c)
Durée immersion globale: 6-24min
Durée froid: 1min/ Durée chaud: 1-3min
Nombre de sessions : 1 à 4 (24h d’intervalle)
 
Bains froids (Cold Water Immersion)
Température: 8-15°c
Temps d’immersion : continue (6-24min) ou alternés (2 sets de 5min)
Nombres de sessions : 1 à 4 (24h d’intervalle)
 
Bains chauds (Warm Water Immersion)
Température: 36-38°c
Temps d’immersion : continue (14-24min)
 
Face à ces données brutes (valeurs moyennes) et en les combinant à des méthodes de récupération réalisées par diverses équipes de France (rugby, football…), voici donc un exemple simple de « protocole » que l’on pourrait appliquer selon les moyens mis à disposition :
 
Récupération active :
Vélo (10min, intensité confortable)
Footing (10min, allure confortable)
Etirements
Phase élastique, 3x30s/muscle
(retour extensibilité de repos)
Massage (dans 2h post-exercice/à distance)
Appuyé, longitudinal et tangentiel
Durée : variable selon la région
Bains alternés: 12min
Froid (1min, 10-15°c) 
Chaud (3min, 30-40°c)
Bains froids : 6min
Continue (6min, 10-15°c)
Alternée (1min in, 1 min out)
Bains chauds : 20min
Continue (20min, 30-40°c)
Alternée (4min in, 1min douche)
Electrostimulation
Retour veineux (20min)
Bas de compression
Efficace si > 20/30 mmHg
 
 
Chronologie : à adapter et abréger selon les circonstances (moyens, temps disponible, ressenti du sportif…) mais si on respecte une certaine cohérence, on pourrait proposer « idéalement » l’enchainement suivant :
Entrée : récupération active
Plat principal : bains alternés (ou froids)
Dessert : électrostimulation
Café : étirements/massage
 
Conclusion : cet article visait à évaluer les effets des bains alternés sur ​​la récupération sportive suite à des micro-lésions engendrées par l’exercice physique. La douleur musculaire, la force et la puissance semble tout à fait récupérer plus vite après des bains alternés par rapport à une absence d’intervention. Toutefois, lorsque ces derniers ont été comparés à d'autres modalités de récupération couramment employées,  peu de différence ont été observé. Par conséquent, tant que des études ultérieures n’offriront un éclairage plus net, les athlètes et le staff médical seront invités à choisir une modalité de récupération qui sera le mieux adapté à leurs horaires, leurs préférences et le type d’installations disponibles. Combiner avec cohérence les modalités de récupération semble être une bonne alternative.
 
Car comme le martèle depuis de nombreuses années M. Pujo et l’équipe de l’INSEP, il ne s’agit pas de juste récupérer, mais de récupérer juste ! Et c’est tout là le fond du problème !
 
Texte écrit par A. Douville de franssu
[1] Bieuzen F, Bleakley CM, Costello JT (2013) Contrast Water Therapy and Exercise Induced Muscle Damage: A Systematic Review and Meta-Analysis. PLoS ONE 8(4): e62356. doi:10.1371/journal.pone.0062356
Lien de l’article : http://t.co/wCNZFFywRY