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PERFORMANCE ET PREVENTION - QUELLE PLACE POUR L’ECHAUFFEMENT ?



 
Sportifs comme entraîneurs ont déjà été sensibilisés dans leur parcours à la pratique de l’échauffement, considéré aujourd’hui comme essentiel pour produire une performance optimale. 
Essentiel peut-être, mais malgré les années, les preuves scientifiques restent encore très pauvres sur ce sujet. Il est d’ailleurs plus souvent retrouvé des échauffements s’appuyant sur les expériences passées des entraîneurs ou des sportifs eux-mêmes; que sur des bases scientifiques solides. Il est encore très difficile de résumer et de s’appuyer sur les conclusions d’études déjà publiées. En effet, de nombreuses études ont été mal contrôlées, avec trop peu de participants ou encore sans analyse statistique.
L’échauffement en lui-même est l’activité mise en œuvre pour atteindre une condition physique et psychologique optimale avant une activité sportive. Cette mise en activité se doit d’être croissante en intensité et prenant au fur et à mesure le chemin de la spécificité de l’activité pratiquée. 
L’échauffement rentre dans le cadre d’une routine permettant aux sportifs de se préparer à l’effort à venir tant sur les plans physiologique et technique que psychologique. Cette routine, en plus d’aider à l’optimisation de la performance sportive, est souvent présentée comme aidant à la prévention des blessures. 
 
L’ECHAUFFEMENT SELON COMETTI
 
En France G. Cometti a été un grand artisan d’une réalisation structurée et justifiée de l’échauffement. Il divise ainsi l’échauffement en 2 phases (5 étapes) :
 
1- Une phase analytique (augmentation de la température musculaire) :
Enchainement « contractions analytiques concentriques contre résistance - relâchement » des grands groupes musculaires permettant d’augmenter la vascularisation (travaux de Masterovoï)
Puis sollicitation excentrique avec une résistance maximale de 50% ainsi que des mouvements de lancers avec blocage excentrique pour se rapprocher d’une sollicitation musculaire plus spécifique de l’activité.
Et enfin mouvements dynamiques explorant l’amplitude active nécessaire à l’activité.
 

2- Une phase globale (température globale) :
 
Réalisation d’exercices spécifiques à la discipline sportive avec augmentation progressive de l’intensité jusqu’à une intensité de compétition.
Et enfin une phase de potentiation s’appuyant sur les travaux de Gullich et Schmitbleicher. Cette phase consiste à augmenter l’efficacité musculaire (travail musculaire court et intense ou encore travail de sprint sur courte distance). 


Au fil des années, les protocoles d’échauffement utilisés ont été de différents types (actif ou passif) et structures (intensité, durée, récupération…).
 Alors que de nombreuses études ont porté sur les réponses physiologiques de l’échauffement, très peu se sont intéressées à leurs impacts sur la performance à suivre. 
 
 

La chaleur est-elle suffisante pour s’échauffer ?  

Au cœur des vestiaires avant un match de rugby, le kinésithérapeute répond souvent aux demandes de massages à la crème chauffante. Ce massage intervient généralement avant même l’échauffement de terrain.
L’effet de ces crèmes est bien évidemment limité. Elles permettront certes une ouverture des vaisseaux sanguins de la peau mais resteront insuffisantes pour la préparation des muscles engagés à l’effort.
Contrairement aux idées reçues, s’échauffer n’a pas comme objectif une augmentation de la chaleur corporelle qui augmente de toute façon lors la production d’un effort physique. Comme décrit par Bishop en 2003, l’objectif est bien d’augmenter la température musculaire.
Néanmoins Bishop relève que l’échauffement passif  douches chaudes, bains, saunas, lampes, crèmes…) présente l’avantage de compléter et surtout de maintenir les hausses de température produites par l’échauffement actif, surtout lorsqu’il y a un délai entre l’échauffement et l’activité, ou encore quand la température extérieure est froide.


Quel impact de l’échauffement actif sur la performance ?   
        
D’après Bishop, certaines grandes conclusions peuvent quand même être tirées de la bibliographie en ce qui concerne l’impact de l’échauffement actif sur la performance.
Ce type d’échauffement tendrait à aboutir à de plus grandes améliorations dans la performance à court terme (< à 10 secondes) par rapport à un échauffement passif. Cependant, les performances à court terme peuvent être dégradées si le protocole d’échauffement est trop intense ou ne permet pas une récupération suffisante, avec une diminution de la disponibilité des phosphates à haute énergie avant le début de l’activité.
L’échauffement actif semble améliorer à la fois la performance à long terme (> 5mn) et la performance intermédiaire ([5s - 5mn]) s’il permet au sportif de commencer son activité sans fatigue mais avec une consommation en oxygène élevée (VO2).
 Il a également été rapporté une amélioration des performances en endurance tant que l’échauffement est actif et ne provoque pas de contrainte de thermorégulation.
En jouant sur l’intensité, la durée et la récupération, de nombreux protocoles d’échauffement peuvent atteindre des mesures physiologiques et de performances similaires.
Echauffement et risque de perte de performance :
Une des grandes difficultés réside dans le dosage de l’échauffement. La progression est nécessaire mais à quel moment risquons-nous d’altérer la performance en puisant un peu trop dans les réserves du sportif ?
-       Suite aux travaux de Bishop, une étude publiée en 2011 par Tomaras et col. a traité ce sujet.  Les auteurs ont étudiés les effets de 2 différents types d’échauffement chez des cyclistes. Les résultats de l’étude mettent en avant le fait qu’un échauffement dit classique (20mn en continu de 60% à 95% de la FCmax + 4 sprints de 6s) entraînait une fatigue musculaire responsable d’une altération de la performance par rapport à un échauffement expérimental (15,5mn en continu de 50% à 95% de la FCmax + 1 sprint de 6s).

Ainsi, les auteurs suggèrent de préférer un échauffement plus court et moins intense.
 


Erwann LE CORRE
Bibliographie
Bishop D., Warm up I: potential mechanisms and the effects of passive warm up on exercise performance. Review. Sports Med. 2003a;33(6):439-54. Review.
Bishop D. Warm up II: performance changes following active warm up and how to structure the warm up. Sports Med.  2003;33(7):483-98.
Cometti G. L’échauffement. 2004. Centre d’Expertise de la Performance DIJON
Centre d’expertise de la performance G. Cometti. Newsletter N°6 - Octobre 2012
Tomaras EK et McIntosh BR. Less is More: Standard Warm-up Causes Fatigue and Less Warm-up Permits Greater Cycling Power Output. J Appl Physiol 111: 228-235, 2011