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L'exercice de Shuttle-Run Sprint (test de la navette en sprint) en hypoxie chez les jeunes joueurs de football professionnels : une étude pilote



 
Voici pour commencer deux vidéos démontrant les 2 tests utilisés dans l'étude qui va être présentée :
            - le shuttle-run sprint (ou test de la navette en sprint)
                   
            - le Yo-Yo intermittent recovery test 
                   
 
 
 

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Introduction
 
L'une des caractéristiques importantes de performance des joueurs de football est une excellente capacité à réaliser des sprints répétés (CRSR) et de bonnes performances  au Yo-Yo intermittent recovery test (YYIR) (Krustrup 2006, Rampinini 2009). Les deux sont associés à des performances physiques pendant les matchs (Krustrup 2006, Rampinini 2007) et influencés par une cinétique de VO2 rapide et une grande capacité de tampon (Dupont 2010, Girard 2011). En outre, la CRSR a été montrée comme dépendante de la puissance maximale aérobie (VOmax), de la teneur en glycogène du muscle, de la concentration en enzymes aérobiques, de la taille des mitochondries et du nombre et de la densité des capillaires (Dupont 2010, Girard 2011, Rampinini 2009). Basé sur les observations qu'un entraînement de haute intensité en conditions hypoxiques améliore la capacité tampon (Faiss 2013, Girard 2013), les échanges et l'extraction du lactate, l'extraction de l'O2 des tissus (Faiss 2013, Girard 2013), l'activité de l'enzyme glycolytique (Hamlin 2010, Puype 2013), l'économie (Hamlin 2010), l'activité de synthèse du citrate et la teneur en myoglobine (Terrados 1990), il pourrait être spéculé que ce type d'entraînement pourrait améliorer la CRSR et les performances au test YYIR et donc influencer les performances physiques en football.
En conséquence, Faiss et al. (2013) ont constaté une plus grande amélioration de la CRSR (c'est-à-dire une augmentation du nombre de sprints jusqu'à épuisement) et Galvin et al. (2013) une plus grande amélioration au test YYIR après entraînement par sprints répétés en hypoxie par rapport à un entraînement normoxique. Cependant, l'entraînement était effectué sur cyclo-ergomètre (Faiss 2013), qui représente une activité inhabituelle pour les joueurs de football, ou sur un tapis roulant non motorisé (Galvin 2013). Pour des raisons évidentes, les entraîneurs de football peuvent généralement être réticents à l'utilisation de ces procédures. Par conséquent, de nouvelles formes d'entraînement et/ou de nouvelles technologies sont attendues pour surpasser cette restriction. La tente mobile hypoxique gonflable, décrite en détail par Girard et coll. (2013) peut être considérée comme une telle technologie nouvelle et prometteuse. Cependant, de nombreux centres de recherche et d'entraînement sont équipés avec de nombreuses chambres hypoxiques plus petites ne permettant pas la réalisation de sprints de longue distance.
Par conséquent, l'étude que nous présentons ici, parue en décembre dans le Journal of Sports Science and Medicine, a cherché à étudier si la réalisation de shuttle-run sprints - qui reflètent probablement un entraînement plus fréquemment utilisé dans la pratique du football que le cyclisme ou la course sur un tapis roulant non-motorisé - est faisable dans une chambre hypoxique normobare de taille limitée (4,75 x 2,25 m) et si un tel entraînement améliore la CRSR et les résultats au test YYIR. Les auteurs ont émis l'hypothèse que l'entraînement proposé par les shuttle-run sprints peut être effectué dans de petites chambres hypoxiques sans restriction de l'intensité de l'entraînement et que les entraînement de sprints répétés en hypoxie améliorent les CRSR et les résultats au test YYIR de manière plus importante que les entraînements normoxiques.
 
 
Méthodes 
Participants
 
Seize jeunes joueurs de football sains (joueurs en extérieur, âge 15 ± 0.5 ans, taille 1.73 ± 0.07 m et masse corporelle 62.6 ± 6.6 kg) d'un même centre d'entraînement ont été informés du protocole d'entraînement et ont donné leur consentement écrit pour participer à l'étude.
Les joueurs ont été assignés au hasard à un groupe d'entraînement en normoxie ou à un en hypoxie, en fonction de leurs CRSR et à leurs performances au test YYIR.
Trois joueurs ont été perdue de vue dans un groupe, 4 joueurs dans l'autre. Les joueurs n'étaient pas familiarisés avec les modalités d'entraînement décrites en détail ci-dessous.
 
Schéma expérimental
 
L'entraînement par shuttle-run sprint a commencé au cours de la 3e semaine de la phase de préparation d'hiver et a été organisé en accord avec les entraîneurs. Outre le régime d'entraînement normal, qui était le même pour les deux groupes, 8 sessions (les participants ayant réalisé seulement 7 sessions ont également été inclus dans les analyses) d'un programme d'entraînement par shuttle-run sprint ont été effectuées pendant une période de 5 semaines. L'entraînement a été réalisé chaque semaine le mardi et le jeudi. Du fait de la période d'entraînement de 5 semaines, les participants ont été autorisés à être absents trois fois maximum, avec la demande qu'au moins une session d'entraînement soit réalisée au cours de la dernière semaine. L'entraînement a été effectué dans une chambre hypoxique normobarique à air conditionné (21 ° C) (taille 4,75 x 2,25 m).
Pour le groupe en hypoxie, la FiO2 a été fixée à 14,8 %, ce qui équivaut à environ 3300 m,  montré comme non réducteur de la puissance pic en efforts de sprints répétés (Goods 2014).
Le groupe en normoxie a été entraîné dans une chambre d'entraînement séparée dans les mêmes conditions en termes de conditions de sol et de distance du cône, à une FiO2 de 20,95 %.
La répartition des groupes a été faite de manière à mettre les joueurs en aveugle (ils n'ont pas été informés de l'intervention en hypoxie et n'étaient pas conscience de cette technique).
Les auteurs ont considéré que cela était éthiquement acceptable car aucune complication n'était attendue avec cette modalité d'entraînement. Une semaine avant et une semaine après la période d'entraînement par shuttle-run sprint, les CRSR et le test YYIR ont été effectuées.
 
Protocole de test
 
Le test de CRSR était composé de 6 x 40m de sprints (aller-retour) avec 20 secondes de récupération passive entre les sprints. Les joueurs ont commencé 0.5m en avant d'un système de cellules photoélectriques puis ont fait un sprint sur 20m, ont touché un cône d'une main et ont fait le sprint retour le plus rapidement possible.
Le test de YYIR niveau 2 consistait en 2 x 20m répétés de course aller-retour entre le départ, le retournement et la ligne d'arrivée  à une vitesse en augmentation progressive jusqu'à épuisement. La vitesse a été contrôlée par des bips sonores. Entre chaque test, le joueur avait une période de repos actif de 5s, composé de 2 x 2,5 m de jogging. La fin du test était déterminée lorsque les joueurs ne parvenaient pas deux fois de suite à atteindre la ligne à temps (évaluation objective) ou s'il étaient incapables d'en faire un autre (évaluation subjective) (Wahl 2014, Krustrup 2006). Le nombre de navettes réalisées et la distance parcourue résultante ont été enregistrés.
Environ 3-5 min après que le test, le sang capillaire a été prélevé au lobe de l'oreille pour déterminer la concentration de lactate.
 
Programme d'entraînement
 
Chaque session d'entraînement a été effectuée selon un protocole précédemment utilisé par Faiss et al. (2013a) et a été mise en place après avoir réalisé une heure d'entraînement d'équipe sur le terrain.
L'entraînement comprenait 3 séries de 5 x 10s de sprints aller-retour effectués à une intensité maximale. Le temps de récupération entre les répétitions était de 20s et entre les séries de 5 min (Faiss 2013a). La distance de sprint était de 4.5 m et était déterminée par des cônes.
Les joueurs devaient toucher le cône (30.5 cm en hauteur) avec leur main avant de se tourner et de sprinter jusqu'à l'autre cône.
 
Analyse statistique
 
Des tests t non appariés ont été utilisés pour examiner les différences entre les groupes au début de l'entraînement. Des ANOVA avec mesures répétées ont été utilisées pour déterminer les changements dus à l'intervention d'entraînement (effet principal : l'entraînement) et pour déterminer les différents changements entre les groupes d'entraînement en hypoxie et en normoxie (interaction : entraînement x groupe). Les tailles de l'effet ont été calculées pour tous les paramètres de performance. Les effets intra-groupe ont été analysés par des tests t appariés. Les résultats sont présentés sous forme de moyenne ± écart-type. Le degré de significativité a été fixé à p ≤ 0,05.
 
 
Résultats
 
Les joueurs du groupe avec entraînement par sprints répétés en hypoxie ont réalisé 7.2 ± 1.1 sessions d'entraînement et ceux du groupe avec sprints répétés en normoxie 7.8 ± 0.4 (p = 0.306). L'intensité d'entraînement, indiquée par le nombre de navettes complété, ne différaient pas entre les groupes (7.8 ± 0.1 vs 7.7 ± 0.2, p = 0,228 navettes moyennes effectuées au cours des sessions d'entraînement).
Les concentrations de lactate mesurées après la 1ère session d'entraînement ne différaient pas entre les groupes (8.7 ± 0.8 vs 9.4 ± 2.2 mmol/L-1, pour le groupe en hypoxie et le groupe en normoxie, respectivement, p = 0,562) et n'ont pas changé après la période d'entraînement (7.7 ± 1.9 vs 9.6 ± 2.6 mmol/L-1 pour les groupes hypoxie et normoxie, respectivement ; effet principal : entraînement, p = 0,685, interaction : entraînement x groupe p = 0,475).
 
Les performances au test YYIR ont été améliorées après l'entraînement (p = 0,045) et la concentration de lactate a diminué après le test YYIR (p = 0,002), sans différences entre les groupes. Après l'entraînement sous hypoxie, la pente de la courbe de la fatigue était plus basse comparée aux conditions normoxiques (p = 0,024 ; figure 1).