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Impacts d’une nuit de privation partielle de sommeil sur la récupération



Impacts d’une nuit de privation partielle de sommeil sur la récupération
Dale E. Rae
 

Introduction


Dans le contexte du sport, le sommeil est reconnu comme essentiel au bien-être et à la performance d'un athlète. Une grande partie de sa valeur réside dans son rôle sur la récupération. En effet, il permet aux systèmes neurologiques et physiologiques de récupérer et de se réparer. Cependant, un sommeil réduit a de nombreuses conséquences : altération de la récupération musculaire par augmentation de la protéolyse, augmentation de la tension artérielle systolique au repos, perturbation du système immunitaire, altération de l'humeur et de la motivation.
 

Objectif


Le but de cette étude est de déterminer si la privation partielle de sommeil entrave la récupération.
 

Méthodes


Seize cyclistes masculins ont participé à cette étude. Pour être inclus, ils devaient être âgés de 20 à 50 ans, dormir plus de 6 heures par nuit, s'entraîner au moins trois fois par semaine durant les 6 derniers mois. Les auteurs ont évalué la récupération des cyclistes après une seule séance d'entraînement par intervalles à haute intensité (HIIT). Ils bénéficiaient ensuite, soit d’une nuit normale de sommeil, soit d’une privation partielle de sommeil. Les paramètres évalués étaient la motivation à s'entraîner ; les douleurs musculaires et la fatigue ; la somnolence ; fréquence cardiaque au repos et la pression artérielle ; la puissance maximale, la fréquence cardiaque et la consommation d'oxygène ; l'activité de la créatine kinase ; la numération leucocytaire et le taux de sécrétion d'IgA salivaires au cours des 24 h qui suivent la séance de HIIT. L'hypothèse était qu'une nuit de sommeil complète et normale après une séance HIIT serait nécessaire pour faciliter la récupération, évaluée par la capacité à effectuer un test proche de maximum dans un test de puissance maximale 24 h après le HIIT. Les auteurs ont émis l'hypothèse que même une nuit de privation partielle de sommeil suffirait à nuire à la récupération.

Séance 1 (17h30) : les participants ont rempli un questionnaire afin renseigner leurs antécédents médicaux et sportifs, d’évaluer le chronotype en utilisant « Horne-Ostberg morningness-eveningness personnality questionnaire » et de mesurer la qualité du sommeil à l'aide de l'indice de qualité du sommeil de Pittsburgh. Ils ont également pratiqué le test de puissance de pointe (PPO). Pour les sept jours suivants, les participants portaient un poignet actigraphe pour établir leurs habitudes de sommeil. Ces données sont présentées dans le tableau 2.

Impacts d’une nuit de privation partielle de sommeil sur la récupération
-          Les participants ont dû jeûner 3 h avant la séance 2 (17:30) au cours de laquelle des mesures de base ont été reprises (le poids, la somnolence, la motivation à s'entraîner, les scores de fatigue musculaire et de fatigue générale, la fréquence cardiaque au repos et la pression artérielle, les échantillons de salive et de sang, et un test PPO. Cette séance a été suivie immédiatement par la session HIIT à 18h00. Les participants ont ensuite dormi au laboratoire dans des conditions de sommeil contrôle (CON) ou de privation de sommeil partiel (DEP).

-          Les séances de suivi 3 (06:30-07:00) et 4 (18:30) ont eu lieu 12 et 24 h après la session 2, respectivement, au cours de laquelle toutes les mesures de référence ont été répétées, à l'exception du test PPO. Les cyclistes ont répété l'essai (séances 5-7) dans l'autre condition de sommeil. Les cyclistes ont effectué des tests PPO au cours des séances 1, 2, 4, 5 et 7.

Le test PPO des sessions 2 et 5 ont fourni des valeurs de référence pour la performance aérobie maximale et ceux des sessions 4 et 7 ont permis d'évaluer 24 h de récupération sur la performance maximale après le HIIT dans les conditions CON et DEP.

La séance HIIT de 54 minutes a eu lieu 5 min après le test PPO de base lors des sessions 2 et 5, et correspond à un entrainement à haute intensité. Les cyclistes ont réalisé 18 intervalles de 1 min à la PPO, avec 2 min de récupération active (50 W) entre chaque intervalle. Pendant la session, ils ont eu un accès ad libitum à l'eau et à une boisson à base de glucides à 7%. Le volume d’eau et de boisson glucidique consommées pendant le HIIT était similaire entre les conditions. Pour les privations partielles de sommeil (DEP), les participants de nuit n'avaient droit qu'à la moitié de leur temps de sommeil habituel.

Résultats


Efficacité de la session HIIT : Les participants ont rapporté des quantités de sommeil similaires et avaient des poids similaires avant les séances HIIT. Vingt-quatre heures après la séance HIIT dans la condition CON, les cyclistes se sentaient moins motivés à s'entraîner, présentaient plus de douleurs musculaires et de fatigue et avaient une pression artérielle systolique au repos, de PPO absolue, et FCmax plus basses. Collectivement, ces données suggèrent que la séance HIIT a perturbé la physiologie des cyclistes, produisant un stimulus dont ils avaient besoin pour se rétablir.

Effets de la privation partielle de sommeil après la récupération : Douze heures après la séance HIIT, les participants étaient somnolents, se sentaient moins motivés à s'entraîner et montraient une réduction de la PAS dans le groupe DEP par rapport au groupe CON (Tableau 3). La figure 2 montre les réponses individuelles sur 12 h, où les données sont exprimées en pourcentage de changement pour les conditions CON (cercles vides) et DEP (cercles pleins) :

Impacts d’une nuit de privation partielle de sommeil sur la récupération

Impacts d’une nuit de privation partielle de sommeil sur la récupération
Figure 3

-          Par rapport à avant la session HIIT, tous les participants, sauf deux, ont déclaré se sentir plus endormis 12 h après la séance HIIT dans la condition DEP par rapport à la condition CON (figure 2a).

-          Dix participants se sentaient moins motivés à s'entraîner après le HIIT dans la condition DEP par rapport à la condition CON ; pour deux cyclistes, le changement de motivation à s'entraîner après le HIIT était le même entre les conditions ; et deux autres se sentaient plus motivés à s'entraîner 12 h après le HIIT dans la condition DEP par rapport à la condition CON (figure 2b).

-          Douze participants ont présenté une réduction plus faible ou même une augmentation de la PAS 12 h après le HIIT dans la condition DEP, tandis que quatre ont montré des réductions plus importantes de la PAS dans la condition DEP (Figure 2c).

Les données à vingt-quatre heures de la session HIIT sont présentées dans le tableau 4 et les figures 3 et 4. Les différences entre les conditions de somnolence et de la PAS ont persisté 24 h après la séance HIIT. Les réponses individuelles pour la PPO relative, la somnolence, la motivation à s'entraîner et la SBP sont représentées sur la figure 3.

La PPO relative était inférieure 24 h après la session HIIT dans la condition DEP par rapport à la condition CON.

Les réponses individuelles pour la FCmax, la VO2max et le RERmax (quotient respiratoire) atteints au cours de la PPO sont représentées sur la figure 4. Comme pour la figure 3, la colonne de gauche montre les données absolues et le panneau de droite montre le changement de pourcentage à 24 h dans les variables. Pour tous les cyclistes à l'exception de trois, la FCMax était plus faible pendant la PPO, 24 heures après le HIIT comparé à avant dans la condition DEP par rapport à la condition CON (figure 4b). Ni la VO2max ni le RERmax n'ont changé entre DEP et CON (Fig. 4c, e, respectivement), et les réponses individuelles ont varié (Fig. 4d, f, respectivement).

Les cyclistes présentaient des changements similaires dans l'activité CK, le taux de sécrétion des IgA et le nombre de cellules leucocytaires à 12 et 24 h après la séance HIIT dans les deux conditions de sommeil. Les effets de temps indiquaient que les WBC (numération totale de globules blancs) et de neutrophiles étaient plus bas, et les basophiles plus élevés 24 h après la séance HIIT.

Impacts d’une nuit de privation partielle de sommeil sur la récupération

Discussion

La privation de sommeil a entrainé une diminution de la PPO à 24h après la HIIT, à la différence du groupe ayant eu une nuit de sommeil normale. Les cyclistes ont également signalé des niveaux plus élevés de somnolence et moins de motivation à s'entraîner, et la réduction induite par le HIIT sur la pression artérielle systolique au repos le jour suivant était atténuée dans la privation partielle de sommeil. Ces données suggèrent que la récupération à partir d'une session HIIT est compromise lorsqu'elle est suivie d'une seule nuit de privation partielle de sommeil, et qu'une nuit de sommeil. La puissance de pointe relative est diminuée de 5% après la séance de HIIT dans la condition DEP, comparativement à une réduction de seulement 1% dans la condition CON. La mesure en laboratoire de la puissance de pointe est couramment utilisée pour évaluer la performance dans le cyclisme. En termes de performance chez les cyclistes d'élite, où une altération de 1% de la performance est considérée comme importante, la réduction de 5% observée semble être significative.

Les explications possibles des différences dans la susceptibilité à la privation de sommeil et de l'influence qu’elle a sur la performance maximale peuvent être liées au chronotype, aux temps de sommeil ou aux habitudes. Par exemple, les sujets se couchant plus tard (type « soir »), peuvent mieux faire face à la privation de sommeil par rapport aux types « matin » qui auront tendance à se coucher plus tôt. Ainsi, le rôle potentiellement modérateur du chronotype sur la privation de sommeil et la récupération qui s'en suit n'a pu être évalué. Des travaux futurs devront être réalisés dans ce domaine pour tester ce concept.

Un exercice tel que le HIIT, est censé modifier l'équilibre sympathico-vagal en faveur du système parasympathique. Ainsi, lorsque des individus physiquement fatigués ou n’ayant pas récupérés font de l'exercice à intensité maximale, ils atteignent généralement des fréquences cardiaques maximales plus basses indiquant une réduction de l’influx sympathique. Les réductions de la PAS au repos et de FC maximale observées dans la phase de récupération du HIIT après un sommeil normal dans la présente étude sont censées refléter ces changements. On peut donc supposer que la diminution de la PAS au repos observé dans cette étude en condition de privation de sommeil suggère que toute augmentation de l'activité parasympathique induite par l'exercice est shuntée par l'augmentation de l'activité sympathique induite par la privation de sommeil. Des recherches futures sur le rôle potentiel du système nerveux autonome sur la récupération dans l'état de manque de sommeil sont justifiées.

Les exercices intenses chez les athlètes et la privation de sommeil réduisent l'immunité innée et acquise. Bien que cette étude ait observé des changements dans les leucocytes sanguins 24 h après le HIIT, la mesure dans laquelle cela s'est produit n'était pas différente entre les groupes. Par conséquent, la perturbation du système immunitaire ne semble pas jouer un rôle dans le rétablissement après un seul épisode de HIIT dans des conditions de privation partielle de sommeil.

Bien que non mesurés dans cette étude, les conséquences à plus long terme des nuits répétées de privation partielle de sommeil lors du rétablissement doivent être prises en compte. Non seulement l'adaptation à l'entraînement peut être compromise, mais des séances d'entraînement répétées avec un sommeil insuffisant pendant la phase de récupération peuvent accroître le risque de surentraînement. Les données de cette étude suggèrent qu'un sommeil insuffisant après une seule séance d'entraînement à charge élevée augmente le temps nécessaire pour récupérer. Par conséquent, on pourrait spéculer que des cycles de sommeil courts et réguliers pendant des périodes d'entraînement à charge élevée peuvent entraîner un dépassement de capacités non fonctionnel.
 

Conclusion


Cette étude confirme le rôle du sommeil dans la récupération de l'entraînement et contribue à notre compréhension des effets physiologiques de la privation partielle de sommeil sur la récupération.

Ces données suggèrent que la récupération nécessaire pour produire des efforts maximaux est incomplète lorsqu'un athlète n'a pas une nuit complète de sommeil après une séance de HIIT. La conséquence de ceci peut être que si une séance d'entraînement est prévue pour le jour suivant, l'athlète peut ne pas être capable de travailler à haute intensité

Les recherches futures dans ce domaine pourraient étudier la sensibilité individuelle à la privation de sommeil lors du rétablissement, en accordant une attention particulière au rôle du chronotype. Étant donné qu'il existe des preuves suggérant qu'un certain nombre d'athlètes souffrent d'un sommeil de mauvaise qualité, les effets d’un sommeil fractionné sur la récupération nécessite d’être surveillés. Enfin, il reste à déterminer si un sommeil insuffisant chronique dans la phase de récupération de l'entraînement prédispose un athlète à une performance détériorée ou à un risque de surentrainement.
 
Article original
One night of partial sleep deprivation impairs recovery form a single exercise training session, Dale E. Rae et Al. Eur J Appl Physiol, 2017, Doi: 10.1007/s00421-017-3565-5.
 
 
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