Menno P. Veldman et Al.
Introduction
La stimulation neuromusculaire électrique (SNME) correspond à une application transcutanée d’un courant électrique permettant de cibler un groupe musculaire avec l’objectif de dépolariser le motoneurone et de générer ainsi une contraction musculaire d’intensité importante (allant de 10 à 60% de la contraction maximale volontaire).
La SNME est généralement utilisée pour le renforcement chez des sujets en bonnes santé et des athlètes mais également comme outils de réhabilitation pour améliorer ou préserver la fonction et la masse musculaire chez des patients ne pouvant pas réaliser de contraction musculaire volontaire. L’entrainement par SNME peut également améliorer les capacités oxydatives et entrainer la transformation des fibres musculaire de rapides à lentes ce qui pourrait potentiellement améliorer les performances en endurance.
Malheureusement, la littérature se focalisant à la fois sur les résultats mécaniques et cliniques est inexistante.
Objectif
Cette étude a pour but de confronter les résultats de littérature et de discuter de l’impact de l’entrainement par SNME haute fréquence et basse fréquence sur l’endurance musculaire et l’endurance fonctionnelle chez des patients en bonne santé comparés à une population clinique.
Méthode
Les auteurs se sont focalisés sur des études menées pendant au moins 3 semaines avec une utilisation journalière de la SNME, chez des patients en bonne santé et des patients cliniques. Il a été souhaité que les études permettent de distinguer l’efficacité de :
- La SNME basse fréquence non tétanique : fréquences continues proches de 10Hz en général.
- La SNME tétanique haute fréquence : fréquences intermittente proche de 50Hz
D’autre part, l’endurance fonctionnelle correspond à la consommation maximale d’oxygène ou charge maximale, à la distance parcourue en un temps donné ou le temps d’endurance concernant des exercices impliquant le corps dans sa globalité comme la marche ou le vélo.
Résultats
- Effets de la SNME sur l’endurance de la performance chez des sujets sains
Ces résultats semblent surprenant dans la mesure où une session unique de SNME haute fréquence induit un stress métabolique et cardiovasculaire important comparé à une contraction volontaire et un niveau élevé de fatigue musculaire principalement dû au fait que le SNME recrute un nombre accru d’unité motrice par rapport à la contraction volontaire.
D’autre part, cette SNME haute fréquence induit un changement dans la nature de la fibre (rapide à lente) avec une augmentation de la capacité oxydative et de la capillarisation des muscles stimulés. Ces adaptations correspondent à celles que l’on retrouve lors de l’entrainement d’endurance. Cependant, les limitations méthodologiques compliquent l’interprétation des données recueillies.
Les données concernant les effets de la SNME de basse fréquence sur le muscle et l’endurance fonctionnelle chez les patients en bonne santé sont relativement rares. Trois études mettent en évidence une amélioration de l’endurance fonctionnelle (amélioration de la capacité de travail, de la consommation d’oxygène au seuil anabolique) potentiellement dues à des adaptations du métabolisme aérobie oxydatif et à l’augmentation de la capillarisation.
Malgré des données limitées, les effets de la SNME basse intensité sur l’endurance fonctionnelle semblent plus importants que ceux de la SNME haute intensité malgré la transition subie par les fibres musculaires (rapide à lente) présente dans les deux modes.
De telles différences sont probablement dues à des différences méthodologiques : la haute fréquence est généralement appliquée de façon intermittente et à des intensités plus élevées. De ce fait, la basse fréquence est mieux tolérée et les séances sont généralement plus longues pouvant aller jusqu’à 240 minutes de courant continu par jour (contre 20 à 30 minutes pour la haute fréquence).
En résumé, nous avons peu de connaissance en ce qui concerne l’impact de la SNME sur l’endurance musculaire et fonctionnelle chez des individus sains. La haute intensité aurait peu d’influence, voir un impact négatif sur l’endurance musculaire alors que pour l’endurance fonctionnelle, la basse fréquence semble bénéfique, probablement parce que les sessions réalisées sont plus longues. Les études menées sur les sujets sains ont généralement ciblé des muscles souffrant de l’effet limite. Les auteurs émettent l’hypothèse qu’en choisissant des muscles moins sollicités et en utilisant des protocoles d’études plus stricts il serait plus simple de fournir de réelles preuves concernant l’efficacité de la SNME
- Effets de la SNME sur l’endurance de la performance dans une population de patients
En général, dans les groupes de patients souffrant de Bronchopathie Obstructive Chronique (BPCO) ou de troubles cardiaques chroniques (CHF), la SNME augmente la force musculaire et la fonction respiratoire et de ce fait, améliore l’endurance fonctionnelle ((augmentation de l’absorption d’oxygène, de la charge de travail, des temps d’endurance et des distances parcourues généralement indexée grâce au test des 6 minutes de marche).
Il y a cependant peu de données concernant l’endurance musculaire après SNME de basse ou haute intensité dans les populations de patients. Seulement 3 études rapporteraient des améliorations de l’endurance musculaire. Les études cliniques appliquant la SNME de haute et basse fréquence se concentrent généralement sur l’endurance fonctionnelle en raison de leur pertinence clinique.
La figure 1A qui contient les données recueillis dans 14 études cliniques montrent plus d’effets favorables dans la SNME haute fréquence que dans la SNME basse fréquence au niveau de l’endurance fonctionnelle. Ces résultats sont assez inattendus et surtout dus aux diverses définitions de l’endurance fonctionnelle, à l’absence de répartition en fonction de la condition physique et à l’hétérogénéité des paramètres de la SNME.
Cinq études, menées chez des patients souffrant de BPCO, utilisant uniquement la SNME haute fréquence ont montré de meilleures améliorations de l’endurance fonctionnelle (43%) en comparaison à 9 autres études réalisées chez des patients souffrant de troubles cardiaques chroniques auxquels ont dispensé uniquement la SNME basse fréquence (12% d’amélioration de l’endurance fonctionnelle).
Quoiqu’il en soit, le taux d’amélioration pourrait aussi dépendre de la sévérité de la pathologie. La durée totale des traitements par SNME de 8 études différents menées sur des patients souffrant de troubles cardiaques chroniques semblent être reliés à l’amélioration de la performance d’endurance (Figure 1B).
En résumé, que ce soit de la haute ou de la basse fréquence, le SNME améliore l’endurance fonctionnelle dans les populations de patients, même si son influence reste encore méconnue sur l’endurance musculaire. L’impact des protocoles de SNME sur l’endurance de la performance apparaissent comme nettement dépendant du type de pathologie, de la sévérité et de l’exposition au traitement.
Conclusion
Que ce soit par haute ou basse fréquence, la SNME peut améliorer l’endurance fonctionnelle dépendamment des conditions initiales. Les patients inactifs souffrant de pathologies avancées sont plus à même de tirer des bénéfices de la SNME que les patients actifs.
La SNME basse fréquence semble être particulièrement efficace chez les patients souffrant de troubles cardiaques chroniques avec des durées de traitement plus important entrainant de plus grandes améliorations de l’endurance fonctionnelle, alors que chez les patient BPCO, il est difficile de fournir des recommandations quant au choix de la haute ou de la basse fréquence pour l’utilisation de la SNME.
La SNME de haute ou de basse fréquence semble être efficace en ce qui concerne l’amélioration de la performance d’endurance. Même si les effets physiologiques semblent être relativement bien connus chez les patients sains, il serait nécessaire de fournir d’autres études basées sur des preuves afin d’optimiser les traitements chez différentes populations de patients.
Article original
Effects of neuromuscular electrical stimulation training on endurance performance, Veldman et AL. Frontiers in Physiology, Nov 2016, doi: 10.3389/fphys.2016.00544
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