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Echographie musculo-squelettique et mobilisation tissulaire



L’échographie musculo-squelettique ou échoscopie  attire de plus en plus les masseur-kinésithérapeutes, ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, elle apparait comme un outil de diagnostic efficace pour tous les patients sportifs qui arrivent dans nos cabinets sans examen préalable et donc parfois sans réel diagnostic. Pour des pathologies des tissus mous, elle serait alors d’une aide précieuse pour définir plus précisément une étiologie, le cas échéant, et un plan de traitement.  De même, l’échographie a tout son intérêt pendant le traitement devenant alors un véritable bilan intermédiaire et permettant de guider les soins de façon individualisée et mesurée. Elle permettra d’identifier les changements structurels dans les tissus et aux voisinages des articulations (processus de cicatrisation, adhérences, œdème persistant…) et pourra même fournir un feedback dynamique intéressant au patient et au thérapeute lors, par exemple, de la contraction musculaire [1]. Cette analyse en temps réel (Real Time Ultrasound en anglais (RTUS)) de l’état physiologique du muscle et de son processus de guérison est un outil précieux pour une évaluation précise du stade de réhabilitation. Son aspect non-invasif et irradiant, portatif et relativement peu onéreux sont d’autres caractéristiques de l’échographie qui en font un outil sur lequel il faudra compter dans les années à venir au sein des cabinets de kinésithérapie.

Nous avons déjà publié au sein de précédents speed-meeting l’intérêt de la mobilisation instrumentée des tissus mous (Scraping, Graston technique, Gua Sha….) lors d’atteintes chroniques de ces derniers (adhérences, cicatrices, densité tissulaire augmentée…). Ces techniques sont reconnues comme un complément efficace aux méthodes traditionnelles d’étirements, contractions excentriques ou autres.  Une littérature peu abondante existante aujourd’hui sur l’utilisation conjointe de l’échographie dans l’évaluation et le traitement des lésions musculaires.  L’étude présentée ci-dessous publiée en 2012 dans l’International Journal of Sports Physical Therapy [2] a cherché à évaluer et documenter au travers d’un cas clinique l’efficacité du traitement des tissus mous lors d’une lésion musculaire récidivante du quadriceps fémoral.


Le cas étudié est un coureur cycliste de 24 ans ayant subi une récidive sur une lésion musculaire du tiers moyen du droit fémoral apparu lors d’une partie de football (phase de décélération suite à un sprint) douze mois auparavant. N’ayant pas suivi formellement de traitement physiothérapique lors de l’atteinte initiale et repris le cyclisme à 4 semaines, le patient reconnaissait avoir encore à 12 mois post-blessure un déficit d’extensibilité et des douleurs persistantes lors d’activités comme le football (changements de directions et appuis). La nouvelle lésion est survenue cette fois ci un peu plus haute sur le 1/3 proximal de la cuisse lors de la même activité sportive ayant déclenchée la lésion initiale (football). L’échographie à 7 jours a confirmé la récidive avec une présence importante de tissu fibreux en lieu et place de la première lésion, un œdème et une zone hyperéchogène reflétant les dommages tissulaires autour de la nouvelle atteinte du droit fémoral.
Le traitement a duré 6 semaines et a constitué en une mobilisation instrumentale  tissulaire douce (Graston) augmentant progressivement dans les contraintes au fur et à mesure de l’amélioration clinique du patient. Elle fut d’abord passive puis dynamique avec des extensions de genou ou des mouvements fonctionnels (presse, fentes) et accompagnée d’un programme d’exercices excentrique (tous les 2 jours) et d’extensibilités (étirements).
L’échographie à 8 semaines a servi à évaluer l’efficacité du traitement. Elle montre que la taille du tissu cicatriciel survenue lors de la lésion initiale a peu évolué mais que l’œdème et les dommages tissulaires de la seconde lésion se sont significativement résorbés. La comparaison des deux images au deux stades de la lésion permet une évaluation objective de l’efficacité du traitement effectué. Le patient relevait une nette amélioration durant les 6 semaines de réhabilitation tant au niveau de la douleur et de la fonction. Il a ensuite repris le football sans retour des symptômes et sans douleur dans la zone touchée.

L’utilisation de l’échographie pour les thérapeutes est donc une véritable aide au traitement, tant pour le patient que pour le soignant. En raison du manque de disponibilité de l’IRM et de son coût prohibitif, l’imagerie musculo-squelettique par ultrasons dans les cabinets de kinésithérapie est une véritable alternative aux diagnostics classiques faits par les médecins ou radiologues qui peuvent souvent prendre du temps à être faits, voire même complétements absents au début de la rééducation. De plus l’intérêt grandissant de ce type d’utilisation a conduit à des améliorations notables dans la technologie et le développement de machines plus petites, moins chères et avec une meilleure résolution 14. Très peu fréquentes en France à l’heure actuelle, elles sont déjà beaucoup utilisées par nos confrères physiothérapeutes d’outre-Atlantique.
Texte écrit par Arnaud Douville de franssu
[1] Stokes M, Hides J, Nassiri D. Musculoskeletal ultrasound imaging: diagnostic and treatment aid in rehabilitation. Phys Ther Rev 1997; 2: 73–92
[2] Faltus J, Boggess B, Bruzga R.The use of diagnostic musculoskeletal ultrasound to document soft tissue treatment mobilization of a quadriceps femoris muscle tear: a case report. Int J Sports Phys Ther. Jun 2012; 7(3): 342–349.
 [3] Conaghan PG.: Musculoskeletal ultrasonography: Improving our senses. Arthritis Care Res 2005, 53:639–642