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Déchirure des racines méniscales : Revue des concepts courants

Santiago Pache et al.



Résumé de l’étude :
 
Revue de littérature présentant les déchirures de racine méniscale : anatomie, biomécanique, diagnostic, traitement, résultats et réhabilitation post-opératoire. Les déchirures de racines méniscales devraient être réparées chirurgicalement. Ceci conduira à une amélioration des résultats cliniques et radiologiques comparé à la méniscectomie.

 
Déchirure des racines méniscales : Revue des concepts courants

Introduction
 
Les déchirures de racine méniscales sont définies comme des blessures d’avulsion osseuses ou de tissus mous des racines (1-4) ou comme une déchirure radiale à 1 cm de l’insertion de la racine du ménisque. Ces déchirures sont de plus en plus reconnues comme une cause de morbidité, de développement de l’arthrose (Osteoarthritis =OA) et d’altération de la cinétique de l’articulation quand elles ne sont pas réparées chirurgicalement (3, 5).
 
La prévalence d’une déchirure complète d’une racine de ménisque chez les patients avec une déchirure méniscale a été estimée à 9,1% du total des patients ayant subi une arthroscopie de genou (10).
De plus, les déchirures des racines postérieures des ménisques externes (Lateral Meniscus Posterior Root = LMPR) ont été 10,3 fois plus fréquentes lors de lésion du LCA que la déchirure de la racine postérieure du ménisque interne (Medial Meniscus Posterior Root = MPRT). Cette dernière était-elle 5,8 x plus souvent associée à une lésion chondrale concomitante que la LMPR.
 
Historiquement, les déchirures de racines méniscales étaient traitées avec méniscectomie partielle ou totale pour obtenir des bénéfices à court terme.
 
A l’heure actuelle, la réparation des déchirures des racines méniscales est le traitement de choix dans l’objectif de restaurer la cinématique articulaire, les pressions de contact, et retarder l’apparition de l’OA. (15,16)
Cette revue va se concentrer principalement sur les déchirures de racine méniscales postérieures, concernant l’anatomie, la biomécanique, l’évaluation clinique, les méthodes de traitement, les résultats, et la réhabilitation post opératoire.
 
Anatomie 
 
Les racines méniscales possèdent des sites d’attachements de fibres principaux et supplémentaires.  L’attache de la racine postérieure du ménisque latéral (Lateral Posterior Root Attachement = LPRA) et l’attache de la racine postérieur du ménisque médial (Medial Posterior Root Attachement = MPRA) sont illustrés figure 1 et 2.
Déchirure des racines méniscales : Revue des concepts courants

Déchirure des racines méniscales : Revue des concepts courants
Biomécanique
 
Les racines méniscales ont un rôle important pour le ménisque afin de convertir les charges fémoro-tibiale axiale en contrainte circulaire. (8)
La perte de l’ancrage méniscale sur le plateau tibial entraine la perte de la fonction méniscale normale, l’éjection du ménisque, et l’altération de la cinématique du genou.
Ceci amène à une répartition anormale des charges sur le genou, diminuant la surface de contact fémoro tibiale et augmentant le pic de pression de contact, au détriment du cartilage, et pouvant amener au développent future de l’OA si non traité de façon adéquate (23, 24).
En cas de lésion du LCA, la racine postérieure du ménisque latéral joue en rôle important dans la stabilisation du genou à la fois dans la translation antérieure et durant les activités pivots (25).
C’est pourquoi chez les patients classés grade 3 au Lachman et 3+ au pivot shift, une possible LPRT (Lateral Posterior Root Tear) doit être suspectée. La LPRA a aussi été rapporté comme étant le principal stabilisateur pour la rotation interne du genou à des degrés de flexion important. (25)
Sur ces données biomécanique, une réparation d’un LPRT devrait être réalisée de façon concomitante avec la reconstruction du LCA pour éviter une instabilité persistante et une augmentation des forces sur le greffon de LCA.
 
Diagnostic
 
Evaluation clinique
 
Les déchirures de racine méniscale peuvent être traumatiques mais la plupart du temps (environ 70% des cas des MPRT) elles surviennent de façon dégénérative (32,33)
La MPRA est la moins mobile des racines méniscales et par voie de conséquence a le plus haut taux de déchirure. L’incidence des MPRA est estimée entre 10 à 21% des fissures méniscales médiales (34-28). Dans le cas d’une d’atteinte ligamentaire multiple, son incidence est estimée à 3% (6,33,39,40).
 
De plus, 80 % des patients avec une ostéonécrose spontanée du genou, touchant typiquement le condyle fémoral médial, ont une MPRT associée, argumentant contre l’étiologie « spontannée » de l’overload syndrome (41).
 
Les facteurs de risques de l’étiologie du MPRT sont le morphotype en varus, l’âge avancé, un haut BMI et le genre féminin (35-47,42)
 
Les éléments les plus courants dans l’examination clinique du patient sont :
  • Douleur à la flexion totale (66,7%)
  • Sensibilité palpatoire de l’interligne (61,9%)
  • Test de Mc Murray positif (57,1%) (45)
 
Une MPRT peut entrainer une expulsion du ménisque, palpable le long de l’interligne articulaire antéro médiale quand un stress en varus est appliqué au genou en extension.
 
LaPrade et all. (2015) ont classé de 1 à 5 les déchirures des racines postérieurs sur un bilan arthroscopique: (Figure 3)

Déchirure des racines méniscales : Revue des concepts courants
Imagerie :
 
L’IRM est la modalité d’imagerie de choix pour le diagnostic des déchirures des racines méniscales et des pathologies concomitantes. (32,35, 49-51)
 
Traitement
 
Le traitement des déchirures des racines méniscales est variable en fonction de la sévérité de la blessure, du moment de l’intervention chirurgicale et de l’état du cartilage.
 
Les traitements les plus fréquents pour les déchirures des racines méniscales incluent le traitement conservateur, la méniscectomie partielle, ou la réparation.
 
Traitement conservateur
 
Il y a peu de scénarios ou il peut intervenir. Il s’agit des patients âgés avec une haut grade et diffus d’OA. Le traitement symptomatique avec analgésique, une modification de l’activité et ou une attelle de décharge peut atténuer une partie des symptômes.
 
Méniscectomie
 
Les patients avec des changements dégénératifs avancés et des symptômes mécaniques persistent comme le blocage du genou et qui ont échoués au traitement conservateur peuvent bénéficier d’un méniscectomie partielle ou complète (42).  Cependant le développement d’une future OA peut intervenir, rendant l’amélioration des symptômes transitoires par rapport à la réparation chirurgicale de la racine.
 
Réparation méniscale de la racine postérieure
 
La réparation anatomique de la racine méniscale doit être tentée tant que possible pour préserver les dommages du ménisques et l’OA. Les 2 techniques les plus couramment utilisée sont les sutures par ancrage et la réparation de la racine méniscale trans-tibiale.
 
 

Suture par ancrage
 
Les racines méniscales médiales peuvent être traitées par une suture par ancrage, avec une ancre et 2 sutures dans une technique « all-inside ». L’opération est exigeante techniquement et a été rapportée principalement chez les patients avec une rupture du ligament collatéral médial de grade 3.
 
Réparation trans-tibiale « pull-out »
 
Cette technique particulière nécessite de passer des sutures au travers de la racine méniscale, en les passant par des tunnels perforés dans le tibia en proximal et en fixant sur un bouton, ou un pont osseux antérieur.
 
Technique préférée de l’auteur
 
La technique préférée de l’auteur est la réparation « pull out » double tunnel trans-tibial utilisant 2 sutures simples attachées sur un bouton cortical.
 
Résultats
 
Méniscectomie partielle Vs Réparation de la racine méniscale
 
Dans une étude rétrospective comparant la réparation trans-tibiiale « pull out » de la racine la méniscectomie partielle après 5 ans de suivi, Chung et al. ont rapporté des résultats cliniques et radiologiques significativement meilleur dans le groupe réparation (24). Le taux de conversion à une arthroplastie totale de genou était de 34% dans le groupe méniscectomie partielle contre aucun dans le groupe réparation. (24)
 
Réparation méniscale et arthrose
 
Dans une méta-analyse de Chung et al, il a été rapporté que la progression vers l’OA était observée chez seulement 10% des patients après un suivi moyen de 30,3 mois et un âge moyen de 54 ans après réparation de la racine méniscale. (23)
Ainsi, il a été conclu qu’un minimum de 89,4% des patients n’avaient pas de progression de l’OA après réparation de la racine méniscale, et que cette technique pouvait ralentir la progression de l’OA.
 
Réhabilitation post opératoire
 
Le patient devrait rester en décharge pour un minimum de 6 semaines après une réparation trans-tibiale « pull-ou » de racine méniscale.  Les exercices de mobilisation passive dans une zone sécuritaire entre 0 et 90 degrés doivent débutés le premier jour post opératoire.
Après 2 semaines, le patient peut progresser dans son amplitude tolérée de flexion
La progression vers la mise en charge totale commence à la 6ème semaine.
La presse et les squats avec amplitude importante au delà de 70 degrés de flexion devraient être évités pendant les 4 premiers mois post opératoires.
 
Conclusion
 
Même si le management des déchirures des racines méniscales améliore les résultats des scores subjectifs, aucune étude randomisée contrôlée de longue durée n’a été menée jusqu’à maintenant. Cependant, avec un diagnostic adéquate, un bilan clinique et d’imagerie suivi d’une indication correctes, les déchirures de racines méniscales devraient être réparées.  Ceci conduira à une amélioration des résultats cliniques et radiologiques comparé à la méniscectomie.
 
Article Original : Santiago Pache, MD; Zachary S. Aman, BA; Mitchell Kennedy, BA; Gilberto Y. Nakama, MD; Gilbert Moatshe, MD; Connor Ziegler, MD; Robert F. LaPrade, PhD Meniscal Root Tears: Current Concepts Review Arch Bone Jt Surg. 2018; 6(4): 250-259.
 
Mots clés : Ménisque latéral, ménisque médial, déchirure de racine méniscale, résultats, réparation de racine
 
Bibliographie
 

Déchirure des racines méniscales : Revue des concepts courants