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Comparaison des fractures diaphysaires du tibia au ski chez l'enfant et chez l'adulte



Risque d'avalanche, dangerosité du hors piste, importance du port d'un casque... Pas une année sans que les médias ne nous rappellent les bonnes pratiques à avoir lors de la saison hivernale sur les pistes enneigées.
L'année 2014 ne déroge pas à la règle, d'autant plus qu'elle a été marquée par la grave chute d'un célèbre pilote automobile.
Grâce à l'étude présentée ici, nous allons faire le point sur l'une des fractures les plus communes au ski : la fracture du tibia.
 
Depuis quelques années, l'utilisation largement répandue de skis paraboliques permet la réalisation de virages plus rapidement et plus facilement qu'avec les skis traditionnels, ce qui a modifié les mécanismes de blessures, notamment au genou, chez les skieurs alpins. Du fait de ces changements, les auteurs d'une étude menée au Japon ont examiné les caractéristiques des fractures du tibia, spécialement au niveau de la diaphyse, survenues en ski alpin. Leur hypothèse était que les enfants présentaient des facteurs de risque ou des mécanismes de blessure différents des adultes. Le propos de l'étude était de comparer les niveaux des skieurs, les conditions neigeuses, les mécanismes et la direction mécanique des fractures diaphysaires du tibia entre les enfants et les adultes et de mettre en avant les différences de facteurs de risque.
 
Matériel et méthode
 
Cette étude a inclus tous les patients admis aux urgences du Sumi Memorial Hospital au Japon pour fracture diaphysaire du tibia pendant les saisons de ski de 2004 à 2012. Les analyses ont pris en compte les facteurs suivants : âge, genre, latéralité de la fracture, niveau de ski, mécanisme de la fracture (chute ou collision), lieu de la blessure (raideur de la pente), conditions neigeuses et temps (découvert, nuageux, etc). Dans cette étude, les patients d'âge inférieur à 16 ans ont été considérés comme des enfants.
 
Les différents paramètres étaient tels que :
- niveau de ski (auto-évaluation) : débutant, intermédiaire ou expert,
- mécanisme de fracture : chute isolée, collision avec un autre skieur ou mécanisme inconnu,
- raideur de la pente : plate, modérée, moyenne, raide ou inconnue,
- conditions neigeuses : piste gelée, neige compacte, piste humide, poudreuse ou inconnue,
- localisation de la fracture tibiale : plateau tibial, diaphyse ou extrémité distale,
- fracture de la diaphyse : spiroïde, transverse, oblique ou comminutive,
- mécanisme de fracture (évaluation par un chirurgien orthopédique de la direction mécanique de la force externe d'après les radios) : rotation médiale (RM) ou rotation latérale (RL).
 
Le schéma en spiroïde a été classé selon la classification Arbeitsgemeinschaft für Osteosynthesefragen (Association for the Study of Internal Fixation; AO) qui est la suivante :
- stade A : fracture simple,
- stade B : fracture avec fragment,
- stade C : fracture complexe.
 
Résultats
Profil des skieurs avec fracture tibiale
Il y a eu 276 fractures tibiales incluant 122 enfants (44,2 %) et 154 adultes (55,8 %). De tous les types de fractures tibiales, celle de la diaphyse est la plus commune tant chez les enfants (89,3 %) que chez les adultes (47,4 %), avec une prédominance pour le type spiroïde (92,7 % chez l'enfant, 100 % chez l'adulte). La suite de l'étude a porté sur ce type spécifique de fracture spiroïde de la diaphyse tibiale.
 
Comparaison épidémiologique entre enfants et adultes avec fracture de la diaphyse tibiale
 
Les résultats principaux sont les suivants :
- pas de différence significative de genre, de latéralité de la fracture, de mécanisme de fracture, de condition neigeuse ou de temps entre enfants et adultes,
- prévalence de débutants significativement plus importante chez les enfants (82,2 %) que chez les adultes (25 %)  (p < 0,0001),
- beaucoup de blessures par chute isolée (88,1 % chez les enfants et 94,5 % chez les adultes),
- lieu de blessure avec pente plus douce chez les enfants que chez les adultes.
 
Comparaison du type de fracture entre enfants et adultes
 
Les résultats principaux sont les suivants :
-  chez l'enfant, fractures simples (stade A) significativement prédominantes (72,3 % des cas),
- chez l'adulte, fractures complexes (stade C) significativement prédominantes (19,2 % des cas),
- direction mécanique en RL significativement plus fréquente chez l'enfant (66,3 %) que chez l'adulte (13,7 %) (p < 0,0001),
- fracture fibulaire associée significativement moins fréquente chez l'enfant (12,9 %) que chez l'adulte (87,7 %, p < 0,0001)
 
Comparaison épidémiologique entre rotation latérale et rotation médiale chez l'enfant et l'adulte
 
Chez l'enfant :
            - significativement plus de filles dans le groupe RM que dans le groupe RL,
            - pas de différence significative de latéralité de la fracture, de niveau de ski, de lieu de blessure, de conditions neigeuses, de temps ou de classification OA entre les groupes RM et RL,
            - chutes isolées significativement plus fréquentes dans le groupe RM,
            - collisions significativement plus fréquentes dans le groupe RL.
 
Chez l'adulte :
            - significativement plus de femmes dans le groupe RL que RM (inverse chez l'enfant),
            - pas de différence significative de niveau de ski, de mécanisme de blessure, de conditions neigeuses ou de temps entre les groupes RM et RL,
            - significativement plus de fractures à droite dans le groupe RL que RM,
            - significativement plus de fractures complexes dans le groupe RM que RL.
 
Discussion et conclusion
 
L'étude révèle différentes caractéristiques des fractures de la diaphyse tibiale chez l'enfant :
- la forme la plus commune est la spiroïde,
- plus de 80 % des enfants présentant ce type de fracture étaient des débutants et se sont blessés sur des pentes douces (ce qui montre que ces fractures chez l'enfant sont le résultat d'un traumatisme à faible énergie),
- les enfants présentent des fractures plus simples que celles des adultes, et le mécanisme en RL est le plus fréquent chez l'enfant.
 
Il est mis en évidence via les divers résultats trouvés que les mécanismes à l'origine de fractures de la diaphyse tibiale sont différents entre l'enfant et l'adulte.
 
 
 
 
N'oublions pas qu'au ski :
- les accidents n'arrivent pas qu'en faisant du hors-piste mais aussi sur les pistes en elles-mêmes (même vertes),
- les collisions ne sont pas les seules raisons d'accidents : faire attention aux autres, mais ne pas oublier de faire attention à soi aussi !
 
Voici parmi tant d'autres quelques petits conseils à rappeler avant de rejoindre les pistes :
- suivre quelques cours,
- porter un casque même en tant qu'adulte,
- faire régler et ajuster ses fixations,
- s'échauffer un peu en début de journée avant de "foncer",
- écouter sa fatigue (combien se sont blessés juste après avoir dit "allez, une dernière !"),
- penser à s'hydrater et à manger suffisamment,
- se préparer physiquement avant son séjour, et pourquoi pas chez son kiné ? La prévention fait aussi partie de nos compétences !
 
Bonne glisse !
 
 
Hamada TMatsumoto KIshimaru DSumi HShimizu K. Comparison of Tibial Shaft Ski Fractures in Children and Adults. Clin J Sport Med.  2013 Dec 16. [Epub ahead of print].
 
Les mutuelles aussi font de la prévention :
http://www.lamutuellegenerale.fr/le-mag-sante/prevention/accidents-de-ski-prevenir-les-entorses-du-genou.html
http://www.axaprevention.fr/objectif-securite/vacances-loisirs-securite/Pages/accident-ski-snowboard.aspx