Introduction
Une partie grandissante de la recherche est centrée sur l'entraînement des muscles du tronc (EMT). La stabilité du tronc repose sur un recrutement efficace des muscles du tronc (incluant les abdominaux, les dorsaux, les muscles du bassin et ceux de la hanche) menant à une production optimale de force et à un contrôle précis des mouvements hanche - lombaires - bassin, tel qu'un transfert de charge optimal entre le rachis et le bassin et les segments distaux [1]. En cela, l'EMT est considéré comme un facteur déterminant des performances motrices efficaces [2]. Pour supporter cette notion, remarquons que des muscles du tronc faibles ou fatigués sont associés à des frappes de tennis sous-optimales [1], à des mécanismes de pédalage altérés [2] et à une incidence augmentée des blessures sans contact du ligament croisé antérieur [4] et des ischio-jambiers [5]. De plus, des preuves préliminaires montrent que l'EMT réduit le taux de blessure [6] et augmente les performances [7] chez les sportifs de haut niveau et améliore les résultats à court terme de la rééducation chez des individus présentant des problèmes musculo-squelettiques [8].
Du fait de preuves en faveur des effets positifs de l'EMT en rééducation musculo-squelettique et en entraînement sportif, il a gagné en popularité en tant que composante des programmes d'entraînement [9]. Cependant, une récente méta-analyse [8] et une revue systématique [10] ont conclu que les études sur l'EMT montrent des résultats variés en termes d'efficacité de l'EMT pour améliorer les résultats d'entraînement sportif [10] et produire des réductions à long terme de la lombalgie chronique [8]. Ces résultats conflictuels peuvent être expliqués par plusieurs problèmes méthodologiques. Tout d'abord, l'EMT représente souvent l'une des composantes d'un programme d'entraînement plus large, rendant difficile l'évaluation des effets isolés de l'EMT. Ensuite, les formes d'EMT varient largement, d'exercices de renforcement musculaire spécifiques à un entraînement fonctionnel tel que le Tai Chi ou Pilates. De telles inconsistances dans la progression de l'entraînement et le manque de spécificité des entraînements fonctionnels sont à même de produire des résultats variés. Enfin, toutes les études ne rapportent pas des changements de performance des muscles du tronc après entraînement, suscitant un doute quant à savoir si les résultats de l'étude peuvent être attribuées à l'EMT [8,10]. Ainsi, l'évaluation de l'activité des muscles du tronc pendant différents exercices est fondamentale pour la pratique basée sur les preuves de l'EMT.
Les exercices de stabilisation du tronc peuvent être réalisés sur des surfaces stables ou instables (ex. ballon de Klein). Comparés aux exercices réalisés sur plan stable, ceux réalisés sur plan instable présentent un défi plus important pour maintenir la stabilité du tronc, prouvé par une augmentation de l'activité des muscles du tronc [11-13]. Les exercices réalisés en utilisant un système de suspension est l'une des formes d'EMT sur surface instable.
Ce type d'entraînement consiste en des mouvements dans tous les plans et dans toutes les articulations, et ce contre la gravité, avec le poids du corps en tant que résistance. Pendant, l'exercice, au moins un membre est supporté par une sangle telle une poignée, au bout d'un câble de suspension avec un unique point d'ancrage au-dessus de la tête (ex. mur ou plafond). Le niveau de difficulté du travail est ajusté en élevant l'angle de travail (ex. inclinaison du corps vers une position plus verticale) et/ou en ajoutant un équipement d'équilibration. Les exercices de suspension sont devenus un type d'EMT populaire grâce à leur variété, avec une installation simple, une faible occupation de l'espace et un large éventail de possibilités d'exercices. Comprendre l'activité des muscles du tronc pendant différents exercices peut aider les spécialistes de la rééducation à choisir des exercices thérapeutiques appropriés aux différents problèmes de santé de leurs patients et à leurs différents niveaux de rééducation.
Ainsi, l'objectif principal de cette étude parue en 2014 était d'examiner l'activité des muscles du tronc lors de 4 situations d'exercices en suspension.
Méthodes
18 participants sains (8 hommes et 10 femmes, âge 21,9 ± 1,7 ans ; taille 165,9 ± 0,9 cm ; poids 54,7 ± 6,6 kg) ont participé à l'étude. Les individus étaient exclus s'ils participaient i=un entraînement sportif de haut niveau, s'ils avaient un antécédent de plainte au niveau musculo-squelettique au cours de 6 derniers mois ou s'ils présentaient une quelconque contre-indication à l'exercice.
Le système de suspension (TRX® Pro Suspension Trainer, Fitness Anywhere LLC, San Fransisco, USA) consistait en un câble de nylon ajustable, de 3,66 m, avec des sangles en formes de poignées aux deux extrémités, et attaché au plafond (à environ 3 mètres du sol).
L'activité de 4 groupes musculaires du tronc, à savoir le grand droit de l'abdomen (GDA), l'oblique externe (OE), l'oblique interne / transverse de l'abdomen (OI/TA) et les multifides lombaires superficiels (MLS) du côté gauche du corps a été évaluée en utilisant un électromyogramme de surface (EMGs) pendant 4 activités en suspension.
Tous les participants ont bénéficié d'une session de familiarisation une semaine avant la session de recueil des données, pendant laquelle ils ont été familiarisés à l'installation expérimentale. Avant le recueil des données, chaque participant s'est échauffé par 5 minutes sur vélo [16] et par des étirements statiques des premiers muscles concernés par les exercices de suspension (incluant les trapèzes supérieurs, les pectoraux, les biceps, les triceps, les abdominaux, les extenseurs du tronc, les fléchisseurs et extenseurs de hanche, les quadriceps et les ischio-jambiers [17]). Les données de l'EMGs ont été collectées lors de deux tentatives de 5 secondes de contraction volontaire isométrique maximale (CVIM) contre résistance manuelle pour chaque muscle d'intérêt (chacun ayant été testé dans la position la plus appropriée pour l'évaluer), avec une période de repos de 2 minutes entre chaque essai [11,18].
Quatre positions différentes de suspension ont été testées :
- abduction de hanche en planche (position 1, figure A) : en procubitus et en appui sur les coudes (corps aligné horizontalement avec les épaules et les coudes à 90° de flexion), les avant-pieds dans les sangles, ajustés de manière à être à 25 cm du sol. Consiste en une abduction de hanche jusqu'à l'amplitude maximale tout en gardant le tronc dans un plan horizontal ;
- abduction de hanche en planche (position 1, figure A) : en procubitus et en appui sur les coudes (corps aligné horizontalement avec les épaules et les coudes à 90° de flexion), les avant-pieds dans les sangles, ajustés de manière à être à 25 cm du sol. Consiste en une abduction de hanche jusqu'à l'amplitude maximale tout en gardant le tronc dans un plan horizontal ;
- position de pompes (position 2, figure B) : pieds sous les ancrages, mains tenant les poignées, corps incliné de 70° vers l'avant, épaules fléchies à 90°, coudes tendus. Consiste en un abaissement du corps grâce à une abduction horizontale d'épaule jusqu'à 90° et flexion de coude à 90°, en maintenant la position de planche ;
- inclinaison à 45° (position 3, figure C) : position debout avec pieds sous les ancrages, corps incliné à 45° vers l'arrière, épaules fléchies à 90° et coudes tendus avec maintien des poignées. Consiste en une traction du corps vers les ancrages par une adduction des scapula, extension des épaules et flexion des coudes à 90° tout en gardant la position de planche ;
- en appui sur les talons (position 4, figure D) : chevilles positionnées dans les poignées à 18 cm du sol, avec les membres supérieurs sur le sol. Consiste en un soulèvement des fesses en appuyant sur les talons avec flexion des genoux à 90° tout en maintenant le tronc et les hanches en position de planche.
Pour chaque exercice, 5 répétitions ont été réalisées, en respectant le rythme suivant (imposé par un métronome) : 3 secondes de levée, 5 secondes de maintien, 3 secondes de descente, avec un minimum de 2 minutes de repos entre chaque répétition. Les participants devaient maintenir la position de travail en respirant normalement et sans parler, position pendant laquelle ont été collectées les données.
Résultats
Une précédente étude sur une population saine a rapporté une fiabilité importante à excellente des mesures de la CVIM pour les mêmes muscles du tronc avec des protocoles de traitement et un placement d'électrodes identiques [20]. En cohérence avec cette étude, les auteurs de la présente étude ont également trouvé une fiabilité importante des mesures de CVIM pendant les exercices de suspension (coefficient de corrélation intraclasse (3,3) = 0,64 (0,22)).
Activité EMGs (% CVIM) normalisée groupée par type d'entraînement :
- Différence globale significative d'activation des 4 muscles pendant les positions A, B et D (F3,51 = 20.2, 10.8 et 20.3 respectivement ; p < 0,001) ;
- Pendant la position A, meilleure activation de l'OE [69,5 (19,3 %] que du GDA et des MLS ;
- Pendant la position D, meilleure activation des MLS [53,6 (27,8 %)] que de tous les autres muscles abdominaux ;
- Pendant la position B, meilleure activation du GDA et de l'OE que de l'OI et des MLS, sans différence entre l'activation du GDA et de l'OE ;
- Pas de différence globale significative d'activation des 4 muscles pendant la position C (F3,51 = 20,3 ; p = 0,099).
Activité EMGs (% CVIM) normalisée groupée par muscle :
- Activation significativement différente du GDA en fonction des 4 types d'entraînement (F3,51 = 38,7 ; p < 0,001) ;
- Activation du GDA pendant les positions A [39,1 (13,8 %)] et B [37,3 (21,9 %)] supérieure à celle pendant les positions D [10,0 (7,5 %)] et C [7,9 (5,4 %)], mais pas de différence entre les positions A et B d'une part et entre les positions C et D d'autre part.
- Activation de l'OE également significativement différente (F3,51 = 88,0 ; p < 0,001) : activation plus importante lors de la position A [69,5 (19,4%)] que lors des positions B [28,6 (19,6 %)], D [14,7 (10,8 %)] et C [10,1 (7,3 %)].
Une différence significative d'activation entre les 4 types d'entraînement a aussi été trouvée pour l'OI/TA (F3,51 = 84,7 ; p < 0,001).
Enfin, l'activation des MLS était significativement différente entre les 4 types d'entraînement (F3,51 = 2695,3 ; p < 0,001). L'activation des MLS pendant les positions A et D [53,6 (27,8 %)] était plus importante que pendant les positions C [14,2 (8,6 %)] et B [7,0 (4,8 %)], mais il n'y avait aucune différence entre les positions A et D d'une part, et B et C d'autre part.
Discussion
Le but de cette étude était d'examiner l'activité de 4 groupes musculaires du tronc pendant différents entraînements en suspension. Une activation plus importante des muscles abdominaux a été observée pendant les positions A et B, alors d'une activation plus importante des MLS a été observée pendant la position D. Aussi, pour une même position dorsale / ventrale, une activité musculaire plus importante peut-elle être observée pendant des entraînements à partir des membres inférieurs qu'à partir des membres supérieurs.
De manière générale, les niveaux d'activation observés apparaissent être suffisants pour produire un effet de renforcement musculaire. Ainsi, les auteurs préconisent l'utilisation d'exercices de suspension en tant que forme d'EMT.
Quelques limitations de cette étude nécessitent d'être considérées. D'abord, l'étude inclut un petit nombre de participants sains sans plaintes musculo-squelettiques antérieures, ce qui peut limiter la généralisation des résultats à d'autres groupes d'âge ou à des populations pathologiques. Ensuite, l'évaluation par EMGs, même si elle a été sélectionnée en référence à de précédentes études, les effets entre électrodes ne peuvent pas être exclus. Cependant, de précédentes études rapportent une bonne fiabilité et une bonne validité du placement des électrodes pour les muscles abdominaux et les MLS [20]. Enfin, l'inspection visuelle de la position du tronc peut avoir influencer les schémas d'activation musculaire.
Conclusion
L'étude montre que la position A est celle qui active le plus efficacement l'OE et l'OI/TA, alors que la position D active le plus efficacement les MLS. Ainsi, ces exercices pourraient améliorer le force de différents groupes musculaires. De plus, l'entraînement en suspension peut entraîner une meilleure activation des muscles du tronc que les exercices sur surface stable ou sur ballon de Klein.
Implications pratiques
Les exercices de suspension renforcent les muscles du tronc chez les adultes jeunes et en bonne santé.
Les séances d'entraînement à partir des membres inférieurs activent plus les muscles du tronc qu'à partir des membres supérieurs.
Les exercices de suspension peuvent activer davantage les muscles du tronc que des exercices similaires réalisés sur des surfaces stables et des ballons suisses.
Références
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Résultats
Une précédente étude sur une population saine a rapporté une fiabilité importante à excellente des mesures de la CVIM pour les mêmes muscles du tronc avec des protocoles de traitement et un placement d'électrodes identiques [20]. En cohérence avec cette étude, les auteurs de la présente étude ont également trouvé une fiabilité importante des mesures de CVIM pendant les exercices de suspension (coefficient de corrélation intraclasse (3,3) = 0,64 (0,22)).
Activité EMGs (% CVIM) normalisée groupée par type d'entraînement :
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- Pendant la position A, meilleure activation de l'OE [69,5 (19,3 %] que du GDA et des MLS ;
- Pendant la position D, meilleure activation des MLS [53,6 (27,8 %)] que de tous les autres muscles abdominaux ;
- Pendant la position B, meilleure activation du GDA et de l'OE que de l'OI et des MLS, sans différence entre l'activation du GDA et de l'OE ;
- Pas de différence globale significative d'activation des 4 muscles pendant la position C (F3,51 = 20,3 ; p = 0,099).
Activité EMGs (% CVIM) normalisée groupée par muscle :
- Activation significativement différente du GDA en fonction des 4 types d'entraînement (F3,51 = 38,7 ; p < 0,001) ;
- Activation du GDA pendant les positions A [39,1 (13,8 %)] et B [37,3 (21,9 %)] supérieure à celle pendant les positions D [10,0 (7,5 %)] et C [7,9 (5,4 %)], mais pas de différence entre les positions A et B d'une part et entre les positions C et D d'autre part.
- Activation de l'OE également significativement différente (F3,51 = 88,0 ; p < 0,001) : activation plus importante lors de la position A [69,5 (19,4%)] que lors des positions B [28,6 (19,6 %)], D [14,7 (10,8 %)] et C [10,1 (7,3 %)].
Une différence significative d'activation entre les 4 types d'entraînement a aussi été trouvée pour l'OI/TA (F3,51 = 84,7 ; p < 0,001).
Enfin, l'activation des MLS était significativement différente entre les 4 types d'entraînement (F3,51 = 2695,3 ; p < 0,001). L'activation des MLS pendant les positions A et D [53,6 (27,8 %)] était plus importante que pendant les positions C [14,2 (8,6 %)] et B [7,0 (4,8 %)], mais il n'y avait aucune différence entre les positions A et D d'une part, et B et C d'autre part.
Discussion
Le but de cette étude était d'examiner l'activité de 4 groupes musculaires du tronc pendant différents entraînements en suspension. Une activation plus importante des muscles abdominaux a été observée pendant les positions A et B, alors d'une activation plus importante des MLS a été observée pendant la position D. Aussi, pour une même position dorsale / ventrale, une activité musculaire plus importante peut-elle être observée pendant des entraînements à partir des membres inférieurs qu'à partir des membres supérieurs.
De manière générale, les niveaux d'activation observés apparaissent être suffisants pour produire un effet de renforcement musculaire. Ainsi, les auteurs préconisent l'utilisation d'exercices de suspension en tant que forme d'EMT.
Quelques limitations de cette étude nécessitent d'être considérées. D'abord, l'étude inclut un petit nombre de participants sains sans plaintes musculo-squelettiques antérieures, ce qui peut limiter la généralisation des résultats à d'autres groupes d'âge ou à des populations pathologiques. Ensuite, l'évaluation par EMGs, même si elle a été sélectionnée en référence à de précédentes études, les effets entre électrodes ne peuvent pas être exclus. Cependant, de précédentes études rapportent une bonne fiabilité et une bonne validité du placement des électrodes pour les muscles abdominaux et les MLS [20]. Enfin, l'inspection visuelle de la position du tronc peut avoir influencer les schémas d'activation musculaire.
Conclusion
L'étude montre que la position A est celle qui active le plus efficacement l'OE et l'OI/TA, alors que la position D active le plus efficacement les MLS. Ainsi, ces exercices pourraient améliorer le force de différents groupes musculaires. De plus, l'entraînement en suspension peut entraîner une meilleure activation des muscles du tronc que les exercices sur surface stable ou sur ballon de Klein.
Implications pratiques
Les exercices de suspension renforcent les muscles du tronc chez les adultes jeunes et en bonne santé.
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Les exercices de suspension peuvent activer davantage les muscles du tronc que des exercices similaires réalisés sur des surfaces stables et des ballons suisses.
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